L'affaire a été mise en délibéré et le verdict sera prononcé le 13 juillet, soit deux jours avant la clôture de l'année judiciaire prévue pour le 15 de ce mois. C'est lors d'une audience, pratiquement exceptionnelle, ayant pour objet la déconstitution du collectif des avocats tenue hier au tribunal de Bir Mourad Raïs, que le collectif de la défense d'El Khabar a présenté des lettres individuelles relatives à la déconstitution des avocats. «Cette déconstitution intervient en dehors de l'instruction», a indiqué le juge à l'avocat qui représente le collectif de défense d'El Khabar. Le juge a donné ensuite la parole aux deux avocats du ministère de la Communication, dont Me Nadjib Bitam qui conteste d'emblée la décision de déconstitution qu'il trouve injustifiable. «La loi a déterminé les raisons d'une déconstitution», rappelle Me Nadjib Bitam, estimant que ce retrait ne doit avoir aucun impact sur les procédures. «On reste attachés à nos demandes qui figurent dans le mémoire. Nous avons présenté au tribunal les éléments prouvant que la même personne (Issad Rebrab) est propriétaire de deux quotidiens», précise l'avocat. Il est à rappeler que les avocats du groupe El Khabar avaient annoncé, la semaine dernière, leur retrait collectif dans l'affaire de fond après la décision «inexpliquée» du tribunal de geler les effets du contrat de cession des actifs au profit de NessProd. Me Bergheul Khaled a dénoncé alors ce qu'il qualifie de «parodie de justice», tandis que Me Bourayou a parlé d'une «arnaque» qui vise à terme la liquidation d'El Khabar. Il y a quelques jours, le juge Mohamed Dahmane a demandé à Me Saïdani Lotfi, représentant du collectif composé d'une quarantaine d'avocats, de «présenter la requête de déconstitution dans la même forme que la constitution». Le président de la séance a demandé, auparavant, à l'avocat de la défense de présenter la lettre de déconstitution le jour même ou le lendemain. Après la contestation de l'avocat sur les délais insuffisants, le juge s'est retiré pour revenir annoncer que la défense a jusqu'au 4 juillet (hier) pour confirmer individuellement l'interruption de l'instance. Pour Me Bergheul, la programmation de la déconstitution dans un délai record démontre que l'Etat veut classer cette affaire avant la clôture de l'année judiciaire. «Toutes nos prévisions se sont vérifiées sur le terrain. Nous avions raison de nous déconstituer dans l'affaire sur le fond. Le magistrat a bien calculé son coup. Il savait que l'affaire allait coïncider avec la clôture de l'année judiciaire, d'où la célérité avec laquelle l'opération de déconstitution s'est faite», s'insurge Me Bergheul, précisant que toutes les affaires présentées au même titre que la leur ont été reportées à septembre ou octobre. «Pourquoi notre affaire a été traitée dans l'immédiat. L'objectif du pouvoir est clair, il veut en finir avec cette affaire en procédant à l'annulation de la transaction. Une annulation qui posera un véritable problème pour son application», explique Me Bergheul. Pour la genèse de l'affaire, rappelons que le ministère de la Communication avait introduit une action en référé auprès de ce tribunal sur la conformité du rachat du groupe de presse El Khabar par NessProd en s'appuyant sur les dispositions de l'article 25 du code de l'information. Cette décision a fait sortir les journalistes d'El Khabar de leur silence pour manifester leur colère contre un pouvoir qui veut mettre à genoux un média qui dérange. Cette affaire a suscité un élan de solidarité de la part de toute la classe politique et la société civile. Notons qu'elle a connu cinq renvois avant que le juge des référés n'ordonne le gel de la transaction et c'est à ce moment-là que les avocats de la défense ont décidé, en accord avec leurs clients, de ne pas faire appel de l'ordonnance de gel notifiée à l'entreprise NessProd et se déconstituer.