Vous sentez-vous plutôt conteuse ou plutôt comédienne ? A vrai dire, les deux. J'ai une formation académique puisque j'ai fait l'académie des arts de Montpellier, des stages avec Ariane Mouchkine, ensuite j'ai travaillé avec des ballets africains, et une compagnie de spectacles pour enfants. Tout au long de mon parcours, j'ai travaillé sur une forme de conte qui est indissociable de la danse et la musique africaine, et que j'ai présenté au Festival des arts de l'Ahaggar. Vos contes sont-ils dédiés uniquement aux enfants ? Théoriquement, il ne devrait pas y avoir de différence entre les adultes et les enfants. Cependant, en France il a fallu faire la différence entre les deux, d'ailleurs, dans ma formation artistique, j'ai un peu suivi cette démarche. Je les ai adaptés aux enfants français, car la symbolique africaine ne correspond pas à leurs repères, à leurs attentes de happy-end ! Je raconte des contes où le héros peut se rattraper, alors que dans les contes africains, les personnages meurent parfois à la fin… Je ne suis pas pour les happy-end, car dans la vraie vie, ça ne se passe pas toujours comme ça. Mieux vaut confronter l'auditoire aux événements difficiles que vit le personnage. Les contes africains sont le miroir de la société, c'est une autre forme d'initiation et d'apprentissage. Aujourd'hui avons-nous réussi à préserver la tradition orale africaine ? La société africaine évolue à deux vitesses : elle est traditionnelle mais marche aussi avec la modernité. C'est une société qui demeure orale — car tout le monde ne va pas à l'école — il y a pas mal de personnes qui n'ont pas accès la télévision, donc l'oralité perdure forcément. Et il existe une conscience collective qui travaille justement pour la sauvegarde des contes africains.