Une fête religieuse, en l'occurrence le Mawlid, censée être la plus belle de toutes, la plus attendue, a été, au fil du temps, transformée en évènement sanglant, faisant chaque année des victimes qui se comptent par dizaines. Les réflexes belliqueux et les comportements dégénératifs sont réitérés avec la même ténacité, aboutissant à tous les excès, tant que ces meurtriers de l'ombre, honteusement indifférents à tout principe, la conscience sourde aux dangers encourus par des enfants en mal de loisirs, continuent d'importer des produits pyrotechniques. Qui sont-ils ? Sont-ils au-dessus des lois ? Beaucoup le pensent, notamment certains parents de victimes. Fatima, la mère du petit Yacine, raconte le calvaire enduré par son petit garçon de 5 ans, lors du Mawlid 2009, quand un jeune adolescent lui lancera un pétard à la figure qui lui causera de graves lésions aux yeux. « Ces nuits à l'hôpital, se souvient-elle, ont été les plus longues de ma vie. J'ai cru que mon enfant était devenu aveugle. La douleur a failli le tuer. Il a mis longtemps à se remettre ». Et d'ajouter : « Pourquoi l'Etat permet-il à ces gens sans foi ni loi de ramener ces produits dangereux dans notre pays ? Est-ce ainsi qu'on fête la naissance de notre prophète ? En agressant nos semblables ? » Meurtrie, cette mère l'a été. Cette année s'annonce semblable aux autres. Des étals sont d'ores et déjà garnis de pétards et autres pièces d'artifice de tout calibre, et aucune mesure coercitive n'a été prise dans ce sens, alors même qu'il y a eu des victimes, à l'instar de ce petit garçon de quatre ans éborgné par une fusée d'artifice, que tous ont vu au journal télévisé de 20h, diffusé vendredi dernier sur la chaîne ENTV. Pour rappel, Constantine a enregistré durant le Mawlid écoulé 40 victimes des produits pyrotechniques. Lors de notre visite aux urgences du CHU, nous avions vu des personnes en sortir avec des brûlures aux mains et au visage. Le service d'ophtalmologie avait, à lui seul, enregistré 25 victimes de jets de pétards, alors que celui des brûlés avait reçu plusieurs personnes souffrant de graves brûlures aux mains et au thorax. Le personnel du service ORL avait soigné 5 personnes, dont 2 enfants qui présentaient des brûlures au visage et des perforations du tympan dues à une hyperpression, sans compter d'autres patients assistés aux urgences chirurgicales pour des blessures importantes, voire graves pour certains. On apprendra ainsi qu'un pétard appelé « chitana », (diablesse) dont la dangerosité est particulièrement élevée, est à l'origine de ces catastrophes. Nous avions également constaté de visu des jets de pétards à partir de fenêtres et balcons. Les abords des établissements scolaires n'ont pas été non plus épargnés par ces projectiles, dont le plus souvent sont victimes les filles. La liste des dérives sera longue encore tant qu'il y aura des parents démissionnaires et des autorités permissives.