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«Le nom de Yamina Oudaï ne figure pas sur la liste des 405 martyrs»
Publié dans El Watan le 08 - 11 - 2016

Comment avez-vous été amené à vous intéresser à la défunte Yamina Oudaï, l'une des figures de proue de la résistance algérienne ?
C'est tout simplement une partie du parcours de l'une des héroïnes algériennes parmi tant d'autres, qui avaient sacrifié leur vie pour que leur pays retrouve sa liberté et son indépendance. Yamina Oudaï avait fait déjà l'objet d'un livre de l'académicienne Assia Djebar.
Une femme sans sépulture, tel est le titre de cette œuvre. Je ne sais pas si aujourd'hui, non pas en Algérie, mais à travers le monde, on peut trouver une femme qui est d'abord l'épouse d'un martyr de la Révolution, ensuite la maman d'un martyr de la Révolution et enfin, en arrive à confier ses enfants en bas âge à une famille voisine, afin de retrouver le maquis et continuer son combat.
Elle a été désignée par l'officier de l'ALN, Ghebalou Ahmed, à la tête d'une organisation politico-militaire au niveau d'un secteur qui s'étend de la région de Menaceur jusqu'à Hadjret Ennous. Elle avait organisé des réseaux de soutien constitués de femmes et d'hommes à Cherchell.
L'audace, l'esprit d'initiative, l'amour de la patrie, sa disponibilité pour le sacrifice, son courage, son sens inné de l'organisation, sa détermination, son intelligence, son abnégation, telles sont ses qualités qu'elle a su personnifier à travers ses actes et ses actions. Capturée le 15 octobre 1957, elle avait subi les pires tortures durant 10 jours. Elle n'avait pas dénoncé ses réseaux.
Son dernier acte restera historique, car elle avait craché sur le visage de l'officier militaire de la France coloniale, en présence des populations rurales. Humiliés, les militaires français avaient entraîné l'héroïne menottée, Yamina Oudaï, loin de la foule, avant de l'abattre froidement. La martyre était arrivée à adresser une courte allocution à ses compatriotes, en les exhortant à continuer la lutte jusqu'à l'indépendance. C'était le 25 octobre 1957. A ce jour, nous n'avons pas pu trouver sa tombe. Son nom ne figure même pas sur la lite des 405 martyrs qui se trouve au niveau du bureau de l'ONM de Menaceur.
Comment s'est effectué ce travail de recherche ?
Les recherches étaient laborieuses, car j'étais soucieux de l'authenticité des témoignages. Je remercie toutes les personnes qui avaient contribué à cela. Depuis presque une dizaine d'années, je recueillais les témoignages. Ma qualité de journaliste m'a aidé. Grâce au soutien des walis de Tipasa, Ouchen Mohamed et Layadi Mostefa, j'ai pu organiser des rencontres publiques avec la présence de témoins, dont certains sont décédés. Je suis arrivé à prendre note des témoignages de sa fille Khadidja, de Ghebalou H'mimed, Boualem Benhamouda,
Hadj Oulhandi Mohamed, Benmokadem Assia, Belegroune et bien d'autres. Il fallait être patient. Je n'ai pas récupéré tous les documents des mains des témoins pour écrire ce livre, cela aurait pu être facile. Son fils Mohamed m'avait remis des copies des services de la police coloniale. Quant à l'écriture, elle a duré une année, car j'ai d'autres obligations dans ma vie.
Ce livre, qui a été dédicacé par Louisette Ighilahriz, se veut un outil pour les historiens, les chercheurs et la jeunesse de demain. Je le souhaite. Il ne faut pas monopoliser l'écriture des évènements historiques. Chacun est libre d'écrire. En ce qui me concerne, j'ai essayé d'apporter modestement certains faits qui se sont déroulés durant la Guerre de Libération nationale. J'espère que d'autres interviendront pour enrichir l'histoire de notre pays. C'est ma conception. Seuls les historiens algériens pourront assainir ces témoignages et ces archives pour écrire et transmettre l'authentique passé de l'Algérie.
Sinon, est-il facile de passer de l'écriture journalistique à l'écriture historique ?
Chacune a sa particularité. En ce qui me concerne, j'ai trouvé l'écriture littéraire plus compliquée, car il s'agit de relater des faits historiques qui peuvent être analysés par des spécialistes. Peut-être que mon inexpérience est à l'origine de cette difficulté. L'écriture journalistique, c'est encore délicat. Il faut rapporter les faits réels sans recourir au scoop. Vous êtes journaliste depuis des décennies et vous savez qu'il y a des règles à respecter, d'abord ne pas dépasser le nombre de signes, tout en relatant l'événement.
Le lendemain, on peut revenir sur le sujet. Ce n'est pas le cas d'un livre qui essaye de rendre compte des faits historiques. Notre journal m'a appris beaucoup de techniques dans le traitement de l'information. Sincèrement, cette expérience s'est avérée positive. Elle m'a permis de tenter cette aventure littéraire. J'ai d'autres projets d'écriture, toujours sur l'histoire. Je ne suis pas un historien ni un chercheur, tout simplement un journaliste qui essaye de contribuer modestement, à sa manière, en portant un coup de projecteur sur des sujets inconnus du grand public.


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