Un jugement en référé, ordonnant l'arrêt immédiat de la grève et la reprise des cours, a été rendu hier. Réfractaire à faire plus des « concessions » aux enseignants grévistes, le ministère de l'Education nationale escompte bien régler ce conflit de la manière forte : une action en justice afin de faire plier les syndicats. « Après moult appels à la raison, et un dialogue qui n'a jamais été rompu, afin de sauvegarder l'intérêt suprême des élèves, nous avons saisi en urgence la justice, par le biais de la chambre d'administration », explique le conseiller à la communication du ministère. Cette procédure a abouti à une décision, rendue hier, en fin de journée : un jugement en référé, ordonnant l'arrêt immédiat de la grève et la reprise des cours. Est-ce pour autant que les enseignants reprendront le chemin des classes ? Eh bien, rien n'est moins sûr, car en dépit des assurances du ministère de tutelle, il n'a vraisemblablement pas été fait part de cette décision aux deux syndicats autonomes, le Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest) ainsi que l'Union nationale des personnels de l'éducation et de la formation (Unpef). « Nous n'avons pas été notifiés de ce jugement », affirme Messaoud Boudiba, chargé de la communication au sein du Cnapest. Il ajoute que le cas échéant, « cela ne concernerait pas les responsables du syndicat, puisque toutes les décisions reviennent à la base. C'est elle qui a décidé de la reprise et du maintien de la grève et qui statuera quant à la reprise ou non des cours », assure M. Boudiba. Ce dernier tient d'ailleurs à rappeler qu'une procédure similaire avait été engagée à la suite de la grève de trois semaines du mois de novembre 2009, mais qui n'avait pas pour autant dissuadé les syndicalistes d'aller au bout de leur action. Même son de cloche du côté de l'Unpef qui « n'a pas été destinataire d'une telle notification », et qui confirme que la grève se poursuit et se poursuivra jusqu'à « satisfaction totale », garantit Sadek Dziri, président de l'Unpef. « La base de l'Union reste déterminée et mobilisée, et ce n'est certainement pas en brandissant la menace de poursuite qu'ils réussiront à casser la grève », déclare-t-il. Pis, ces mesures judiciaires n'auront pour résultat final qu'une « discréditation de la justice », confie M. Boudiba, puisque ce débrayage est « tout ce qu'il y a de plus légal », commente-t-il. « Nous attendons des solutions réelles et concrètes du ministère de tutelle qui seront à même de convaincre la base de l'implication et de la sincérité des autorités », déclare M. Dziri. « Et non pas des pressions et des intimidations, qui ne feront que compliquer davantage une situation des plus délicates », poursuit-il. Pressions de toutes parts Pourtant, le ministère de l'Education nationale reste sourd à cette protesta et n'en démord pas, puisqu'il considère avoir « répondu favorablement à toutes les revendications des syndicats grévistes et fait tout ce qui était possible », afin de tenter d'aplanir les différends entre les antagonistes. « Nous ne comprenons même pas pourquoi ils s'entêtent dans cette voie et ont repris leur mouvement de grève », affirme le conseiller à la communication auprès du ministère de l'institution. L'on comprend dès lors que ce conflit risque, selon toute vraisemblance, de perdurer, les deux parties étant déterminées à camper chacune sur ses positions, et ce, au détriment de la scolarité des élèves, et pour le plus grand désarroi de leurs parents, qui tentent de défendre comme ils peuvent les intérêts de leurs enfants. Ainsi, Khaled Ahmed, président de l'Union nationale des associations des parents d'élèves, tiendra, en compagnie des syndicats grévistes, une réunion de travail « dans les prochaines 48 heures ». L'objectif de cette séance sera évidemment de « convaincre les enseignants de rejoindre les établissements », explique-t-il. Khaled Ahmed, qui considère que la responsabilité de cette impasse « est partagée », affirme toutefois que le ministère de tutelle « aurait dû entamer des actions plus concrètes », afin de contenter les enseignants, dont les revendications sont « plus que légitimes ». Quant à la Fédération nationale des associations des parents d'élèves (Fnape), son président, Bachir Dellalou, a rendu public hier un communiqué, dans lequel on dénonce « cette menace sur l'avenir des enfants ». La Fnape en appelle donc aux valeurs « religieuses et morales » et à la conscience professionnelle des enseignants grévistes.