Depuis le concours organisé par les services de Nouria Benghabrit en 2016, cette question laisse perplexes certains pédagogues et plusieurs diplômés de langues étrangères. Aujourd'hui, ils posent la question : selon quel critère le choix des épreuves a été fait ? Car il faut signaler que les candidats sont soumis à une seule épreuve dans la matière essentielle – français ou anglais – et trois en langue arabe ! Cette question a suscité l'étonnement, voire l'opposition de certains pédagogues à une telle démarche. Pour Magri Mehannaoui, retraité et ancien directeur d'un établissement scolaire basé à Tadjenanet (Mila), le concours devrait être le premier pas vers l'amélioration du niveau scolaire et un glissement vers une pédagogie saine et correcte. «C'est une question de maîtrise ici et non pas de traduction. Du fait que nous parlons de langue étrangère, beaucoup de critères s'imposent. Le critère de base, c'est de savoir quelles sont les aptitudes et les compétences linguistiques du candidat. Quel est son degré de maîtrise de cette langue étrangère ? Ceci dit, les sujets de culture générale ou autres doivent être formulés en langue étrangère», a-t-il expliqué. Et de poursuivre : «Que va transmettre à l'élève un candidat maîtrisant la langue arabe plus que son outil pédagogique, le français par exemple ? C'est très simple, il inculquera des notions fausses à l'apprenant, qui sera un futur enseignant.» Pour bien fonder son argument, M. Mehannaoui a précisé que la contrainte qui se pose est bel et bien d'éviter de parler en arabe durant la séance de français et vice versa. Les enseignants contemporains tombent dans le piège petit à petit, selon ses dires, et le recours à la langue arabe deviendra abusif. Ce qui a créé le phénomène de l'alternance codique, qui est jugée illogique, antipédagogique et totalement improductive, par les spécialistes du secteur. Notre interlocuteur lance un appel à la tutelle pour revoir les sujets des épreuves pour ce prochain concours et ne pas commettre «la même erreur» de l'année écoulée. Le Dr Soumeya Merad, enseignante à l'ENS de Constantine, partage le même avis que M. Mehannaoui. Pour elle, il serait plus judicieux de proposer des épreuves uniquement en langue française. «Dans le cas de l'enseignement en Algérie, nous n'enseignons pas avec la langue française, mais nous enseignons la langue française. Si nous partons de ce constat, nous réalisons que le recours à une autre langue n'est même pas envisageable, car il s'agit bien évidemment de deux langues complètement différentes», a-t-elle souligné. Et de clarifier : «Je dirai même qu'il s'agit des antipodes. L'alternance codique serait envisageable si la langue française était utilisée comme moyen didactique afin de transmettre un enseignement de mathématiques ou d'histoire.» Le Dr Merad ajoute que l'alternance codique est devenue monnaie courante dans nos établissements ; les enseignants de français font face à des difficultés d'incompréhension, non pas à cause de reformulations, mais plutôt de traduction, ce qui crée une mémorisation restreinte et erronée chez l'apprenant. «Je conseille souvent à mes étudiants d'utiliser les images, la littérature de jeunesse et les gestes. L'enseignant devrait être polyvalent (il doit avoir des talents d'enseignant, d'acteur, narrateur et de metteur en scène) afin de pallier les lacunes des apprenants et les aider à mieux assimiler le cours, mais surtout à apprivoiser cette langue», a-t-elle conclu.