Les ministres présents à la cérémonie organisée à El Aurassi pour le 8 Mars ont adopté la même attitude. C'est un Président peu bavard qui est apparu hier à la cérémonie consacrée aux femmes, à l'hôtel El Aurassi. Habituées aux discours-fleuves et aux envolées lyriques à chaque fête du 8 Mars, les invitées ont été déçues de n'avoir droit qu'à un concert de musique chaâbi interprété par la voix mielleuse de Rym Hakiki et à un repas sans saveur. Le Président s'est réfugié dans un silence déroutant tout au long de la réception en l'honneur des femmes. Les ministres présents à la cérémonie ont adopté la même attitude. Militaire jusqu'aux bouts des ongles, l'ancien du Malg, le ministre de l'Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni, a stoppé net les journalistes qui souhaitaient l'approcher. « Pas de presse », apostrophe-t-il, de loin. Plus subtil, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, par ailleurs ancien diplomate, s'en sort avec une belle pirouette. « Aujourd'hui, c'est la fête, je ne peux pas faire de déclaration », s'excuse-t-il, promettant de se montrer plus loquace lors de la réunion de son parti, le RND, vendredi prochain. Hésitant, le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, répond aux questions des journalistes en laissant percer un certain agacement. « Pourquoi faut-il prendre la température des relations algéro-françaises quotidiennement comme on s'enquérait de la santé d'un malade », dit M. Medelci, à propos des relations entre Alger et Paris. Le ministre des Affaires étrangères n'a pas souhaité s'attarder sur la question des tensions entre Alger et Bamako. « Les relations entre les deux pays sont bonnes », précise-t-il. Mais la palme de la plus belle dérobade médiatique revient au ministre de l'Energie et des Mines. « Un silence assourdissant comme l'est mon portable ces derniers temps », dit, pour tout commentaire, Chakib Khelil, au sujet de l'affaire Sonatrach. Le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de la Communication, Azzedine Mihoubi, se montre aussi prolixe que souriant. Il revient longuement sur les textes en préparation pour la réorganisation des médias publics et privés qui devront, promet-il, assurer une protection de la corporation des journalistes ainsi que de restructurer la publicité. A la question de savoir ce qu'il pense de la grève des journalistes, travaillant au cachet, de la radio El Bahdja, la langue de bois ressurgit. « Il faut savoir que les journalistes du secteur public sont bien mieux lotis que ceux du privé », répond-il. Pour sa part, le président de l'APN, Abdelaziz Ziari, souligne que le projet de loi devant criminaliser le colonialisme est actuellement entre les mains du gouvernement. « Cela fait 15 jours que nous avons remis notre projet. Le gouvernement a un délai de deux mois pour nous donner une réponse », explique M. Ziari. Le président de la République a délégué à la ministre déléguée chargée de la Famille et de la Condition féminine, Nouara Djaâfar, le soin de remettre des distinctions à deux femmes de la presse écrite. La directrice du journal El Fedjr, Hadda Hazam, et celle du journal Horizons, Naâma Abbas, ont ainsi été honorées pour les efforts entrepris dans un secteur qui n'est pas des plus faciles. A la fin de la cérémonie des femmes, le président de la République s'est offert un petit bain de foule. Au milieu des youyous et des bousculades, il paraissait pâle mais souriant.