Selon Zannier, «cette définition concentre l'ambiguïté des définitions qui sont données actuellement de la psychologie clinique, et de l'activité du psychologue clinicien». Pour cet auteur, le psychologue clinicien est considéré par certains «comme un praticien qui étudie le fonctionnement psychique sain ou pathologique pour en donner une définition en termes de capacités, de caractéristiques cognitives ou affectives, ou encore de diagnostic (dans ce dernier cas, il est assimilé à un psychopathologiste). Pour d'autres, le psychologue clinicien exerce en plus des précédentes fonctions, ou exclusivement, des activités de conseil et de psychothérapie (de soutien ou spécifique)». Zannier conclut, qu'en fait, ces définitions partielles ne font que refléter la diversité des fonctions exercées par ces psychologues, dont beaucoup sont spécialisés dans l'une ou l'autre d'entre elles. Hormis «une solide formation théorique au cours de laquelle le psychologue clinicien est censé avoir reçu les connaissances et habiletés scientifiques propres à la psychologie, à sa pratique professionnelle et au bien-être des personnes de son environnement (pas uniquement ses patients !), le travail du psychologue clinicien va de la prévention et de l'intervention précoce de problèmes mineurs d'ajustement à l'intervention sur des problèmes pour lesquels l'individu a besoin d'être mis en institution. De ce fait, les psychologues cliniciens sont amenés à travailler directement auprès des individus (qu'ils soient des enfants, des adultes ou des personnes âgées) ou des groupes (familles, patients souffrant de psychopathologies similaires…) en utilisant un vaste éventail de méthodes d'évaluation et d'intervention destinées à promouvoir la santé mentale et à diminuer l'inconfort et les difficultés d'adaptation. Dans la majorité des pratiques, le psychologue clinicien s'insère dans une équipe pluridisciplinaire, auprès d'autres professionnels de la santé (médecins, orthophonistes, rééducateurs…), avec l'objectif de définir la condition psychique de ses patients, de proposer, en lien avec les autres disciplines, des méthodes de prévention, de soin, de compensation ou de rééducation. Il peut également être amené à participer à la formation d'autres professionnels (médicaux, paramédicaux, d'assistance…) et à la recherche». (Zannier, ibid) Le travail du psychologue clinicien est d'abord et avant tout «l'évaluation pour déterminer la nature, les causes et les effets potentiels de la détresse personnelle (cela inclut des dysfonctions personnelles, sociales et professionnelles) et des facteurs psychologiques associés aux troubles physiques, comportementaux, émotionnels, nerveux et mentaux. Les procédures d'évaluation peuvent être, par exemple, des entrevues, des évaluations comportementales, l'administration et l'interprétation de tests d'habiletés intellectuelles, d'aptitudes, de traits personnels et d'autres aspects de l'expérience humaine et des comportements ayant trait au trouble» (http://psychologie.psyblogs.net/2011/12/que-fait-le-psychologue-clinicien.html). Ce travail d'évaluation peut ensuite donner lieu à une intervention destinée «à prévenir, traiter et corriger des conflits émotionnels, des troubles de la personnalité, des psychopathologies et des déficits d'habiletés sous-jacents à la détresse humaine ou à la dysfonction» (http://psychologie.psyblogs.net/2011/12/que-fait-le-psychologue-clinicien.html). Mais qui dit intervention en psychologie, dit aussi psychothérapie. Or, il se trouve que la formation de base des cliniciens n'est pas suffisante pour exercer une psychothérapie spécifique. «En effet, le constat que l'on peut faire c'est reconnaître qu'en l'état actuel des choses, les formations proposées sont très en deçà des attentes, même si les psychologues possèdent les connaissances nécessaires pour pratiquer des activités de counselling ou de soutien psychologique» Zannier (op.cit.). La formation de psychothérapeute se trouve donc en dehors des universités. En effet, hormis les pays d'Amérique du Nord, les formations en psychothérapie se font en dehors de l'enseignement académique universitaire. Ces formations sont souvent prises en charge par des institutions privées. De ce point de vue malheureusement, en Algérie, c'est le no man's land. Il n'y a pratiquement pas de formations proposées. Je veux saluer dans cet article et sur ce point précis les efforts considérables de l'Association pour l'aide, la recherche et le perfectionnement en psychologie (SARP), pratiquement la seule association à proposer des formations en psychothérapie. Ceci dit, il y a quand même ça et là des initiatives pour pallier ce vide, mais elles restent insuffisantes tant la demande de formation est grande. Pour bien comprendre la problématique à laquelle est confrontée la formation des psychologues en Algérie, il faut partir d'un petit historique de la formation universitaire en Algérie et bien sûr de la formation des psychologues cliniciens en particulier. Précisons que le but de l'université a toujours été académique, ce n'est qu'avec l'introduction du LMD que les choses ont un petit peu changé avec l'introduction des masters professionnels. Malheureusement, comme nous allons essayer de le démontrer, les masters professionnels n'ont pas vraiment répondu à l'attente des psychologues qui se destinent à la pratique psychologique pour plusieurs raisons que nous évoquerons plus loin. La formation en psychologie Il y a quelques années, la licence en psychologie était préparée en quatre années d'études et sanctionnée par la rédaction d'un mémoire de fin d'études sous la direction d'un enseignant et soutenu devant un jury composé essentiellement d'enseignants en psychologie. Ces quatre années sont divisées en deux étapes : deux années pour le tronc commun, et deux années pour la spécialisation. Au terme des deux années du tronc commun, l'étudiant en psychologie devra choisir une spécialisation entre quatre possibilités qui lui sont offertes. Soit la psychologie clinique, les sciences de l'éducation, la psychologie industrielle ou enfin l'orthophonie. Au bout de ces quatre années d'études et une fois le mémoire de fin d'études soutenu, l'étudiant est enfin détenteur d'un diplôme qui est la licence en psychologie qui lui ouvre automatiquement l'accès à la vie professionnelle et même à la pratique psychologique, notamment pour les licenciés en psychologie clinique. Cependant, ce savoir acquis au terme de ces quatre années d'études les prépare-t-ils réellement à affronter le monde du travail et plus spécifiquement la prise en charge psychologique pour les licenciés en psychologie clinique ? Ce savoir, cette formation sont-ils suffisants pour la formation d'un psychologue ? En un mot, sont-ils psychologues pour autant après ces quatre années d'études ? Desfarges (1982, p.272) a écrit à propos de cette formation que «l'étudiant reçoit un savoir très éclectique à base de philosophie, de sociologie, de mathématiques, de sciences naturelles, de biologie, de pédagogie, de linguistique, de psychiatrie et actuellement surtout de psychanalyse. De toute cette encyclopédie du savoir, il ne retient que quelques bribes de théories dont il ignore la pratique. Un tel enseignement ne permet pas, selon lui, de structurer chez l'étudiant ni une pensée ni une pratique». Pour Desfarges (ibid., p.275), dans cette formation «on se soucie davantage de la psychologie que des psychologues». Ceci est d'autant plus vrai que ce savoir inculqué, malgré les remaniements dont il est l'objet, à savoir les multiples refontes des programmes, reste totalement coupé de la réalité pratique. Malgré les stages et les sorties sur terrain, l'étudiant ne découvre en fait la réalité de la pratique qu'une fois sorti de l'université. C'est alors qu'il peut mesurer le fossé qui sépare sa formation de ce qui est concrètement attendu de lui. Avec les multiples réformes qu'a subies la formation universitaire, nous ne sommes plus dans cette optique d'une licence en quatre années. En effet, nous sommes passés d'une licence en quatre années à une licence en trois années dans le système LMD. Enfin, avec les toutes dernières réformes, nous sommes arrivés à une licence en deux années à cause du socle commun propre aux sciences humaines et sociales, pour finir enfin avec une licence en une année à cause de l'année de tronc commun dans laquelle on partage des unités d'enseignement avec toutes les autres spécialités de psychologie. A l'heure où nous pensions avoir réussi à donner un semblant de crédibilité aux études en psychologie grâce au système LMD, cette énième réforme vient tout simplement saper tous les efforts que nous avons déployés pour donner à la psychologie et à la pratique psychologique une visibilité et des perspectives qui permettent aux futurs psychologues de se projeter dans une profession balisées par un enseignement qui tienne compte des savoirs, des savoirs-faire et savoir-être. Jugez en vous-mêmes : Dans le cadre du système LMD, il y a deux masters : un master académique et un master professionnel. Le master académique prépare l'étudiant à entrer dans le monde de la recherche universitaire, et à cet effet, dans l'offre de formation que nous sommes aujourd'hui contraints d'abandonner, nous avons veillé à permettre à l'étudiant à : – acquérir les compétences d'un chercheur scientifique, indépendamment de son domaine ou sujet spécifique de recherche. Ces compétences répondent à des exigences d'ordre méthodologique, pratique, organisationnel ; – acquérir une formation qui s'articule entre pratique et recherche, et à problématiser les questions rencontrées dans la clinique de terrain ; – former des chercheurs et enseignants-chercheurs destinés à l'enseignement supérieur ou aux organismes publics ou privés de recherche. Compte tenu du fait que ce master est un master recherche, les enseignements ont surtout été axés sur la méthodologie de la recherche (méthodes et technique de collecte des données, méthodologie de la recherche, statistiques appliquées aux sciences humaines, traitement informatique des données) ; en plus de ces unités d'enseignement technique, il y a des séminaires thématiques au cours desquels l'étudiant est en principe invité à présenter sa problématique, ses hypothèses et sa méthodologie devant ses pairs et face à un jury, et ce, dès le troisième semestre, avant d'arriver à la rédaction de son mémoire, et ce, pour lui permettre de bien cerner tous les tenants et les aboutissants de son thème de recherche, ce qui facilitera grandement la rédaction de son mémoire. Outre ces enseignements techniques, certains enseignements sont proposés aux étudiants sur des thématiques plus pointues, plus spécialisées qui n'ont pas été abordées en licence, et ce, afin de permettre à l'étudiant d'avoir une vision plus exhaustive du savoir psychologique, surtout pour ceux qui veulent aller vers un doctorat. Ces unités d'enseignement additionnelles leur ouvrent des horizons sur des thématiques et des approches récentes en psychologie comme la psychologie et la psychopathologie développementale, les neurosciences, les états de stress post-traumatique, les violences et les maltraitances, ainsi que la psychopathologie du nourrisson et des interactions précoces, encore que cette unité d'enseignement aurait pu être introduite dès le niveau de licence parce que c'est vraiment une unité d'enseignement fondamentale. En effet, la base de la psychopathologie se situe à ce niveau, c'est-à-dire dès les premiers instants de la vie. Aussi, la connaissance de ce qui se passe au cours de cette période de la vie, au cours de ces moments précoces où tout va se jouer, est capital à saisir pour bien comprendre la pathologie. Dans cette unité, sont abordées les nouvelles conceptions des relations mère-enfant (Brazelton, Mazet et Houzel…) ainsi que la théorie de l'attachement. Pour le master professionnel, nous avons veillé à permettre, autant que faire se peut, à l'étudiant désirant exercer dans le domaine de la psychologie clinique et de la psychopathologie d'acquérir une compétence professionnelle théorique et pratique. La formation développe des compétences en psychopathologie (diagnostic symptomatique et structural, diagnostic de la personnalité et stratégies de prises en charge) et en psychologie clinique (évaluation clinique dans une perspective intégrative du fonctionnement normal et pathologique à tous les âges de la vie). Elle vise aussi à développer les connaissances et les compétences cliniques et psychopathologiques nécessaires à la compréhension des phénomènes psychopathologiques, que leurs expressions soient psychiques ou somatiques chez l'adulte, l'enfant et le nourrisson. Dans ce master, à côté de certaines unités d'enseignement communes avec le master académique, l'étudiant est amené à suivre des enseignements plus spécifiques destinés à le préparer à affronter la pratique de la psychologie avec confiance dans la mesure où il est outillé à cet effet. Parmi ces unités d'enseignement spécifiques : le bilan psychologique, la formation à l'entretien, l'examen et le suivi psychologique, le bilan psychopathologique et la prise en charge du nourrisson et du jeune enfant, le bilan, la prise en charge en psychopathologie de l'adulte et le bilan et la prise en charge en psychopathologie du vieillissement. Nous avons voulu avec ce master, autant que faire se peut, outiller les psychologues qui se destinent à la pratique pour leur permettre de faire face à toutes les situations, que ce soit en psychopathologie du nourrisson et de l'enfant, en psychopathologie de l'adulte et même en psychopathologie du vieillissement. Au terme de ce master, en principe l'étudiant est capable de mener un entretien clinique à visée diagnostique, faire une évaluation, proposer un diagnostic et surtout faire un suivi psychologique. Ainsi, même s'il n'est pas psychothérapeute, il peut faire de l'écoute et du suivi psychologique. Nous avons justement veillé à ce que l'étudiant puisse s'investir psychologiquement dans ce type de prise en charge en introduisant une unité d'enseignement très technique, qui est le transfert et le contre-transfert, et ce, afin que l'étudiant comprenne que dans toute relation de face à face, il y a des phénomènes transférentiels et contre-transférentiels qui doivent être pris en compte et que parfois tout le travail thérapeutique peut porter uniquement sur l'analyse de la situation transféro-contre-tranférentielle. En vérité, quelle que soit la force de ce master professionnel, il reste qu'on ne professionnalise pas sérieusement une formation en accolant simplement le terme de professionnel au diplôme délivré comme l'écrit Zannier (2010). La professionnalisation ne peut se réduire à un ou deux stages en institution. L'acquisition de «l'expérience professionnelle, justifiée par l'aspiration des étudiants à trouver rapidement un emploi, nécessite un apprentissage sur la durée. Cette durée de professionnalisation est inhérente à la nature même des savoirs et des savoir-faire enseignés (standards des métiers visés), l'expérience étant acquise lors d'un véritable parcours. Elle est aussi nécessaire en raison des origines diverses de nos étudiants. Le besoin criant de qualification, d'une part, l'aspiration d'un public étudiant prêt à s'investir sur un projet lisible et débouchant sur un emploi qualifié, d'autre part, sont les raisons convergentes d'une réhabilitation de la place de la professionnalisation dans les missions de l'université» (Zannier, 2010). Il faut donc assurer une lisibilité du cursus et du diplôme délivré, une garantie de qualité de la professionnalisation. Mais comment assurer cette lisibilité quand les programmes d'enseignement changent d'année en année. En effet, en l'espace de deux décennies, on est passé d'une licence en quatre années à une licence en trois années avec le système LMD, à une licence en une année par la grâce de cette nouvelle refonte des programmes. Avec cette toute dernière réforme, nous ne sommes plus dans le système LMD, je ne sais d'ailleurs plus dans quel système on est avec un socle commun en sciences sociales et humaines dans lequel on enseigne pêle-mêle des matières sans connexion les unes avec les autres, pour la plupart des introductions (introduction à l'anthropologie, à la psychologie, à la sociologie, à la philosophie, à l'économie, de la statistique descriptive, histoire culturelle de l'Algérie…) pour aller ensuite vers une année de tronc commun en psychologie, pour enfin une année en spécialité (clinique, sciences de l'éducation, psychologie du travail et orthophonie). Si on compte bien, la licence en psychologie clinique, puisque c'est d'elle qu'il s'agit ici, se prépare en à peine une année. Plus grave encore, ce sont les programmes qui posent le plus de problèmes et qui soulèvent moult interrogations. Je ne sais pas qui est à l'origine de cette offre de formation, mais ce qui est proposé est une véritable régression par rapport à ce qu'on enseignait dans le cadre du système LMD, ou encore dans le cadre de l'ancienne licence. Les programmes proposés n'ont apparemment pas été élaborés sur une critique objective de ce qui est déjà enseigné, sur une analyse des programmes déjà en vigueur pour en déceler les faiblesses et éventuellement les corriger. Il s'agit d'une véritable «khalota» avec des enseignements qui se répètent (psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent enseignée en licence et qu'on retrouve en master comme les troubles du spectre de l'autisme enseigné en licence et qui se répète en master sous l'appellation : les différents troubles autistiques ; les troubles alimentaires en licence et en master ; les troubles de la sexualité en licence et en master sous des appellations différentes. Par manque de temps semble-t-il, on a condensé dans une seule unité d'enseignement des savoirs qui auraient dus être proposés séparément comme les TDAH, les TOP et les troubles de l'adaptation sociale qui devraient faire l'objet d'un enseignement à temps plein, ainsi que les troubles des compétences sensori-motrices qui étaient enseignés à temps plein dans une unité d'enseignement intitulée : les troubles du développement sensori-moteur. Il en est de même pour l'unité d'enseignement «les troubles de la personnalité chez l'adulte» enseignés en licence et qu'on retrouve en master sous l'appellation «psychopathologie de l'adulte et du vieillissement», alors même que ces deux pathologies sont totalement différentes et nécessitent chacune un enseignement à temps plein). Sans oublier les théories explicatives des troubles mentaux enseignées en première année de master. Cet enseignement est une unité de base, une unité fondamentale qui aurait dû être inscrite en première année, ou au plus tard en deuxième année de licence. D'autres unités d'enseignement qui devraient être enseignées séparément ont été rassemblées dans un seul module, en l'occurrence le module de psychophysiologie qui regroupe à la fois un enseignement sur les sensations et la perception et un enseignement sur l'anatomie et la physiologie du SNC, avec en prime tout un éventail de données sur le système visuel, le système auditif, la mémoire, l'intelligence et les arcs réflexes. L'intention est louable, mais elle pèche par excès parce qu'il est impossible en deux semestres d'enseigner tous ces éléments. Si, comme par le passé, on avait le temps, la mémoire, l'attention et l'intelligence, de même les sensations et la perception auraient pu faire l'objet de deux unités d'enseignement séparées de l'enseignement de la biologie du système nerveux central, ce qui se faisait par ailleurs dans la licence classique, notamment avec le module «psychologie des fonctions», qui est un enseignement capital en psychologie puisque de telles connaissances sont indispensables dans toute psychologie scientifique à l'heure où la psychologie, par les formidables avancées des neurosciences et des découvertes en imagerie cérébrale, est en passe de devenir une neuropsychologie. Nous constatons également que tout l'aspect pathologie du système nerveux a été tout simplement scotomisé. Le master doit être un enseignement plus spécialisé, il doit préparer l'étudiant à affronter une pratique où, pour ceux qui se destinent à la recherche, les préparer à la rédaction d'une thèse. J'ai comme l'impression que les auteurs de cette offre de formation ne se sont pas donné la peine de définir les objectifs à atteindre et les prérequis pour les atteindre. Aucune offre de formation ne peut faire l'économie du préalable qui est la définition des objectifs : qui doit-on former ? Pour quelle pratique et comment ? Toute pédagogie a une finalité qui se définit comme un but à atteindre. Ainsi, en fonction de cette finalité, les objectifs à atteindre doivent être déterminés. L'objectif peut être défini par ce que l'apprenant est censé être capable de faire seul une fois le processus pédagogique achevé. Cinq étapes doivent être considérées dans l'élaboration d'une pédagogie à objectif : n définir et identifier le comportement final. En d'autres termes, définir l'objectif à atteindre. Un objectif doit se définir en termes de comportements objectivement observables ; – approfondir le comportement final en décrivant les conditions dans lesquelles il doit être normalement ; – Préciser les critères de performance acceptable et décrire les moyens dont l'apprenant doit les exécuter. (http://mrdalshim.free.fr/pages_web_(.htm)/staps_deug_1/v1.13/ppo.htm) Pour ne pas heurter la sensibilité des puristes de la pédagogie, je dois juste ajouter que même si nous nous situons dans une approche par objectif, nous tenons également compte du fait que ce qui est visé par la formation doit être le développement de compétences chez l'apprenant, le rendant ainsi capable de s'insérer professionnellement. De ce fait, notre approche se situe beaucoup plus au confluent de l'approche par objectif et de l'approche par compétence. D'après un article mis en ligne par Nico Hirtt le 25 janvier 2011, l'approche par compétences est née de la rencontre d'une double attente du monde de l'entreprise — disposer d'une main-d'œuvre adéquatement formée et rationaliser ses coûts de formation — et de conceptions pédagogiques axées sur le résultat individuel plutôt que sur les savoirs — la pédagogie par objectifs inspirée du behaviorisme anglo-saxon et le cognitivisme (www.skolo.org, site de l'Appel pour une école démocratique). Pour l'auteur de cet article, il y était question d'«amener tous les apprenants à s'approprier des savoirs et à acquérir des compétences qui les rendent aptes à apprendre toute leur vie et à prendre une place dans la vie économique, sociale et culturelle». C'est ainsi, selon l'auteur, qu'on trouve associées officiellement, et pour la première fois, deux idées : celle de viser le développement de «compétences» (même si en 1996 on les place encore sur le même pied que les «savoirs») et celle d'utiliser plus efficacement l'enseignement obligatoire au service de la «vie économique». A la différence de la pédagogie par objectif, ce qui caractérise l'approche par compétences, c'est que les objectifs d'enseignement n'y sont plus de l'ordre de contenus à transférer, mais plutôt d'une capacité d'action à atteindre par l'apprenant. Une compétence ne se réduit ni à des savoirs, ni à des savoir-faire ou des comportements. Ceux-ci ne sont que des «ressources» que l'élève ne doit d'ailleurs pas forcément «posséder», mais qu'il doit être capable de «mobiliser» d'une façon ou d'une autre, en vue de la réalisation d'une tâche particulière. Une compétence, dit l'un des promoteurs de cette approche, est «une réponse originale et efficace face à une situation ou une catégorie de situations nécessitant la mobilisation, l'intégration d'un ensemble de savoirs, savoir-faire, savoir-être…» (Bosman et al. 2000, cité par Nico Hirtt, ibid). Je ne vais pas faire ici un cours sur la pédagogie par objectif et de la pédagogie par compétences, mon propos est juste de dire qu'aucune offre de formation viable ne peut faire l'économie de la définition des objectifs d'un enseignement et de ce qui est attendu de cet enseignement, c'est-à-dire ce que l'apprenant est censé pouvoir faire au terme de sa formation. Ceci pour dire également que tout auteur d'une offre de formation doit d'abord être un bon pédagogue, mais il doit aussi maîtriser le domaine de compétences de sa spécialité. S'agissant plus spécifiquement de la psychologie clinique où il est question de la formation de psychologues qui vont être appelés à travailler auprès de personnes qui ont besoin d'aide et de soutien, tout auteur doit, en plus d'une stature pédagogique avérée, fruit de l'expérience et d'un solide curriculum vitae qui atteste de ses capacités scientifiques, en plus de ce prérequis, il doit pouvoir être capable de savoir exactement ce dont à besoin un psychologue, quels savoirs il lui faut et pour quelles compétences ? En fait, l'idéal serait de pouvoir proposer une formation qui tienne compte des trois «savoirs» : savoir, savoir-faire et savoir-être. Ce qui revient à dire que le psychologue qui sort de l'université doit nécessairement être en possession d'un savoir, mais également d'un savoir-faire et d'un savoir-être. Dans l'offre de formation qui vient d'être abandonnée, nous avons essayé de tenir compte, autant que faire se peut, des lacunes de l'ancienne formation en essayant de proposer une formation plus qualifiante. Pour ce faire, nous avons été voir ce qui est enseigné ailleurs dans les autres universités en Europe et en Amérique du Nord. Après avoir pris connaissance des différentes offres de formation LMD existant de par le monde, la première chose à laquelle nous avons justement réfléchi, c'est la question des objectifs de cette formation. Comme nous ne formons pas de psychologues praticiens, il était essentiel pour nous que notre offre de formation réponde au moins à deux exigences : former des psychologues cliniciens capables de faire du soutien psychologique, mais avant d'arriver au soutien, il faut que ces psychologues soient capables de faire un diagnostic. Le psychologue clinicien doit donc pouvoir au terme de sa formation au moins être capable de connaître le fonctionnement psychique normal et pathologique, les différentes pathologies et toutes les théories explicatives, les thérapies les plus couramment utilisées, les différents outils de dépistage (tests de personnalité et d'intelligence), ce qui relève du domaine des savoirs. En outre, il doit savoir conduire un entretien clinique et pouvoir faire une évaluation psychologique et proposer un diagnostic (savoir-faire) ; enfin, il doit savoir écouter (savoir-être). Pour réhabiliter la place de la professionnalisation dans les missions de l'université, il faut aller vers une formation de type Dpsy, tel qu'il est en vigueur dans les universités d'Amérique du Nord et plus précisément le Québec où il faut pas moins de quatre années pour former des psychologues cliniciens, et ce, dans le cadre d'un doctorat professionnel avec trois années de théorie au cours desquelles l'étudiant est formé, entre autres, à une psychothérapie, et une année d'internat dans une clinique au sein-même de l'université ouverte au public. Qui nous empêche d'opter pour cette formule ? Quand on a à cœur la formation de nos futurs psychologues, on ne lésine pas sur les moyens, parce que ces derniers vont être appelés à travailler dans le domaine de la santé publique. Il se peut même que demain ce seront nos enfants ou nos petits-enfants qui vont se retrouver face à eux. Doit-on, pour je ne sais quelle raison, confier la santé et le bien-être de nos enfants et petits-enfants à des «apprentis sorciers» qui n'ont rien à donner ? Cela me pousse à revenir à la formation des psychologues praticiens telle qu'elle est en vigueur dans les universités canadiennes. Le Dpsy est un diplôme très convoité, il permet à son détenteur de se hisser au même niveau que le médecin, et c'est la raison pour laquelle les places pour une formation en Dpsy sont très convoitées. Cette année par exemple, pour la rentrée de septembre et si je ne me trompe pas, il y avait à l'université Laval pas moins de 150 postulants pour à peine 15 postes, de même pour l'université de Trois Rivières : 200 postulants pour 15 places. On peut s'inscrire plus facilement en doctorat recherche qu'en doctorat intervention ou Dpsy. Pourquoi est-ce qu'on ne pourrait pas faire la même chose en Algérie au lieu de ce bricolage qui ne mène nulle part ? L'Algérie a les infrastructures nécessaires, la ville universitaire de Constantine est sous-exploitée. Pourquoi ne pas faire en sorte que l'université algérienne se transforme en modèle de formation pour toute l'Afrique et drainer ainsi des étudiants de tout le contient africain ? Sur le plan économique, c'est une formidable bouffée d'oxygène et sur le plan de la qualité de la formation, on n'aura plus rien à envier au reste du monde développé. Il suffit de le vouloir et d'y mettre les moyens humains. L'Algérie est un véritable vivier de cadres de haut niveau qui ne demandent rien d'autre que de démontrer ce dont ils sont capables. Cependant, ce n'est pas par la cooptation et le népotisme qu'on va y arriver. Il faut, à ce niveau, montrer patte blanche. Pour pouvoir participer à cette belle aventure, il faut avoir un véritable CV. Ce n'est pas en marginalisant les vraies compétences qu'on arrivera à construire une université où le savoir, les capacités, le professionnalisme et la Science priment. Malheureusement, nos décideurs n'ont pas d'ambition pour l'université algérienne et le programme qui vient d'être proposé pour l'enseignement de la psychologie est là pour l'attester. Jugez-en vous-mêmes, et même si je me répète, je ne peux que souligner cette aberration qui consiste à passer d'une licence en quatre années, à une licence en trois années dans le cadre du système LMD, ensuite une licence en deux années suite à l'introduction du socle commun (j'aimerais bien rencontrer le génie qui a eu cette idée de socle commun pour qu'il m'explique le pourquoi de cette réforme) pour finir avec une licence en une année compte tenu du tronc commun aux sciences humaines et aux sciences sociales. Yarham babakoum, est-ce réaliste de préparer une licence en une année ? Comment peut-on condenser des savoirs qui étaient enseignés en quatre années de licence en une seule année ? C'est plus qu'une régression. C'est tout simplement la mise à mort de l'enseignement de la psychologie dans les universités algériennes. Quand je compare notre offre de formation à ce qui vient d'être proposé, que ce soit en licence ou en master, je constate qu'il n'y a pas photo. Je ne prétends pas que cette offre de formation soit parfaite, loin s'en faut, mais elle avait au moins le mérite d'être cohérente dans la mesure où notre souci était de préserver les équilibres entre savoir, savoir-faire et savoir-être. Nous avons veillé, dans cette offre de formation LMD, à donner à l'étudiant une base cohérente en psychologie et psychopathologie, en psychothérapie, en testologie, en méthodologie de la recherche, en statistiques et en biologie, et ce, dès la licence. En master, nous avons fait en sorte que l'étudiant puisse acquérir un savoir-faire en recherche pour les étudiants qui se destinent à la pratique, un savoir-faire et un savoir-être pour ceux qui se destinent à la pratique. Comment voulez-vous que nous abandonnions une formation de ce niveau pour ce nouveau programme d'enseignement de la psychologie ? Il faut vraiment ne pas aimer son pays pour l'enfoncer dans ce non-sens, cette non-science. Tout ce qu'on a fait, c'est «vider le vide», comme me l'a si bien fait remarquer un collègue aussi scandalisé que moi par cette légèreté avec laquelle on s'est attelé à démanteler l'université algérienne, à la vider de toute substance. Par cette métaphore, le collègue en question a voulu souligner le niveau alarmant de la formation depuis l'introduction du socle commun qui l'a amputé d'une année, donnant ainsi le coup de grâce à une cette formation déjà sérieusement malmenée. Avec cette nouvelle réforme concoctée par des génies de la pédagogie, nous sommes passés d'un enseignement qui avait au moins le mérite de la cohérence et de l'exhaustivité, à un enseignement pour le moins hétéroclite, sans finalité. Bientôt, les génies de la pédagogie du ministère de l'Enseignement supérieur, ces dieux qui n'ont pas besoin des conseils de simples mortels comme nous, vont peut-être descendre de leur olympe et venir se tenir face aux nouveaux bacheliers pour leur dire qu'en définitive ils n'ont plus besoin de faire d'études universitaires. En effet, de par leur science infuse, ils n'auront plus qu'à toucher le front de chaque nouvel étudiant de leur baguette magique, trempée préalablement dans les potions qu'ils concoctent dans leurs laboratoires abscons pour que chaque nouveau bachelier puisse acquérir la science infuse que ces dieux détiennent. Ainsi, on n'aura plus besoin d'universités. Les nouveaux bacheliers n'ont qu'à décider de ce qu'ils veulent faire et les dieux de l'olympe universitaire, en apposant leur baguette magique sur leurs front, leur infuseront le savoir et le savoir-faire dont ils ont besoin.