Si la Ligue des Etats arabes n'entreprend pas de réformes dans l'immédiat, elle sera tôt ou tard condamnée à disparaître et à subir l'histoire. Tel est le constat fait hier par un trio d'enseignants chercheurs des facultés d'Alger et de Sétif lors d'une conférence-débat consacrée à l'organisation panarabe, qui s'est tenue au siège du quotidien Ech-Chaâb. Dans son état des lieux de cette organisation créée en 1945, Mouissi Belaïd, de l'université de Sétif, s'est même dit craindre qu'il ne soit trop tard pour entreprendre une quelconque réforme. « Le monde a changé à une vitesse vertigineuse. Nous sommes à l'ère des grandes mutations et des métamorphoses. Les structures de la Ligue arabe sont dépassées et je ne pense pas qu'une réforme puisse servir à grand-chose. Une réforme aurait pu réussir si elle avait été menée durant les années 1970 ou 1980 », a-t-il soutenu. Pour Belaïd Mouissi, la Ligue Arabe a besoin pour continuer à exister, d'abandonner son statut actuel d'« institution à caractère bureaucratique et administratif » pour se transformer en une véritable organisation capable d'intégrer de nouveaux référents et de faire face aux défis posés par la mondialisation. « La Ligue arabe est une institution-providence qui regroupe un ensemble d'Etats-providence ; or, tout le monde sait aujourd'hui que c'est la fin de l'Etat-providence », ajoute Belaïd Mouissi, qui fera en outre remarquer l'urgence pour la Ligue arabe de se démocratiser et de mettre en place une alternance à tous les niveaux. De son côté, l'universitaire Ferdi Oulhadj a défendu l'idée selon laquelle la Ligue arabe ne cessera d'être perçue par les opinions arabes comme une simple annexe du ministère égyptien des Affaires étrangères que le jour où elle adoptera le principe d'un secrétariat général tournant, limitera la durée des mandats du secrétaire général et révisera son processus de prise de décision. A ce propos, M. Oulhadj rappellera que la Ligue arabe, dont le siège se trouve au Caire, est la seule institution au monde à n'avoir connu que 6 secrétaires généraux en 65 années d'existence. Parmi ces 6 secrétaires généraux, souligne-t-il, 5 étaient de nationalité égyptienne. M. Oulhadj a prévenu que si la Ligue arabe rate l'opportunité de se réformer lors de son sommet qui doit avoir lieu à la fin du mois à Tripoli, elle sombrera davantage dans la sclérose. Rappelant que la Ligue arabe n'a pu résoudre aucun problème régional depuis sa création, M. Guechi de l'université de Sétif a, pour sa part, insisté sur le fait qu'il est impossible de démocratiser cette institution sans penser à impliquer la société civile dans la prise de décision. Mais pour que cela arrive, il faudrait d'abord que les Etats-membres de la ligue soient eux-mêmes des pays démocratiques. Ce qui est loin d'être le cas. Pour l'opinion arabe, la Ligue arabe n'est rien d'autre qu'un syndicat de dictateurs.