La fin de la prière du vendredi 8 décembre a sonné, en ce jour, le déclenchement de la colère du peuple palestinien à travers l'ensemble des villes et villages de la Palestine occupée, ainsi que dans les villes à majorité arabe en Israël même. Des milliers de citoyens ont investi les rues pour protester contre la décision du président américain, Donald Trump, de reconnaître officiellement la ville sainte d'Al Qods comme capitale de l'Etat d'Israël. Le président américain a ainsi adopté la version sioniste et pris une décision jugée, par les Palestiniens et l'ensemble du monde arabo-islamique, unilatérale et partiale qui viole les résolutions de la légitimité internationale, pour lesquelles la ville sainte (Jérusalem-Est) fait partie des Territoires palestiniens occupés en 1967. Les jeunes Palestiniens ont exprimé leur colère et leur refus de la décision américaine en se dirigeant vers les points de contact direct avec les forces de l'occupation dans les différentes villes de la Cisjordanie occupée, y compris dans la ville d'Al Qods et dans la bande de Ghaza. Ils ont brûlé des pneus, jeté des pierres et parfois des cocktails Molotov contre les forces israéliennes qui ont été renforcées en prévision d'une escalade des activités populaires palestiniennes. Les forces israéliennes ont tenté de réprimer les citoyens palestiniens en usant de jets d'eaux usées, de bombes lacrymogènes toxiques, de balles en caoutchouc et de balles réelles. Dans la ville sainte d'Al Qods, les forces israéliennes ont imposé un véritable état de siège pour limiter au maximum l'arrivée des citoyens palestiniens, particulièrement les jeunes, sur l'Esplanade des Mosquées d'où se déclenchent généralement les mouvements de protestation les plus forts contre l'occupation. C'est de ce lieu saint pour le monde musulman qu'est née la deuxième Intifadha palestinienne en septembre 2000, qui s'est prolongée durant plusieurs années. Les forces israéliennes actives dans la ville d'Al Qods semblent avoir reçu des ordres de ne pas utiliser de balles réelles dans le but de ne pas envenimer la situation encore plus dans cette cité sur laquelle les yeux du monde entier sont braqués. Mais elles ne se sont pas privées de se ruer sur les manifestants, femmes et hommes, à coup sde crosses et de gourdins, au niveau de Bab El Amoud, une des portes principales de la vieille ville. Dans les autres villes palestiniennes, que ce soit en Cisjordanie occupée ou en Israël, les heurts étaient beaucoup plus violents. Des blessés par balles réelles ont été signalés dans la ville d'Al Khalil, où la présence israélienne est dense. Les colons israéliens de cette ville sont connus pour leur extrémisme et leur fanatisme et n'arrêtent pas de provoquer les citoyens à longueur d'année. Les heurts à Al Khalil, Bethléem, Jenine, Naplouse, Toulkarem se poursuivaient au moment où nous écrivions cet article. Un bilan définitif des victimes de la répression israélienne de ce vendredi ne pouvait être fait, car les affrontements risquaient de se poursuivre durant une bonne partie de la nuit. Dans la bande de Ghaza, d'où le chef du bureau politique du Hamas, Ismail Haniyeh, avait lancé, la veille, un appel pour que ce vendredi soit une journée de colère à travers les Territoires palestiniens occupés et même celle du déclenchement de la troisième intifadha palestinienne, qu'il a nommée «l'Intifadha de la liberté d'Al Qods et de la Cisjordanie», des dizaines de milliers de Palestiniens sont sortis dans les rues pour protester contre la décision du président américain. Des responsables du Hamas ont pris la parole au cours de deux rassemblements géants, l'un au camp de réfugiés de Djabalia, et l'autre au centre-ville de Ghaza. Ils ont dénoncé la décision américaine et considéré les Etats-Unis comme partenaire direct dans l'occupation d'Al Qods et du reste de la Palestine. «Ils ont annoncé Al Qods capitale d'Israël et nous annonçons une intifadha à travers la patrie», a dit Ismail Radouane, un des responsables du Hamas à Ghaza, au côté duquel était debout Ismail Haniyeh, le chef du bureau politique du Hamas. Toujours dans la bande de Ghaza, d'autres citoyens ont préféré aller vers des régions frontalières et faire face aux forces de l'armée israélienne présente dans ces lieux. Là, les soldats israéliens, bien protégés dans leurs blindés ou leurs tours de contrôle et bien loin des pierres que jettent des jeunes Palestiniens cherchant apparemment à tomber en martyrs, s'amusent à tirer sur eux des balles réelles. En fin d'après-midi, 16 jeunes avaient été blessés, dont un grièvement. Il a été atteint d'une balle au cou, selon un responsable du ministère de la Santé à Ghaza. L'Autorité palestinienne, dont le président se trouve en Jordanie où il a eu des entretiens avec le roi Abdallah II, a pris la décision définitive de ne pas recevoir le vice-président américain Mickel Pence, dont une visite dans la région est prévue pour le 15 décembre. «Al Qods est plus importante que l'administration américaine et nous ne ferons pas de concession pour une rencontre avec le vice-président américain», a déclaré, hier, Nabil Abou Roudeina, porte-parole officiel de la présidence palestinienne. «La colère palestinienne se poursuivra et ne reculera pas», a ajouté Abou Roudeina avant d'indiquer que la direction palestinienne étudiait un appel à un sommet arabe en soutien à Al Qods. La Maison-Blanche avait mis en garde jeudi les Palestiniens de ne pas recevoir Mickel Pence à son arrivée en Israël et dans les Territoires palestiniens, avertissant qu'un tel comportement aura des répercussions négatives. La direction palestinienne a décidé également de porter plainte contre les Etats-Unis au Conseil de sécurité de l'ONU et à la Cour pénale internationale. N'ayant plus grand-chose à perdre après deux décennies d'un processus de paix qui n'a rien apporté au peuple palestinien, la direction, à sa tête le président Mahmoud Abbas, semble aujourd'hui prête à aller à l'affrontement diplomatique direct avec les Etats-Unis et leur protégé Israël.