Quels sont les principaux indicateurs à retenir de la situation financière du pays ? Comparativement à l'année 2016, les indicateurs sur les ressources extérieures de l'année 2017 affichent un état partiellement équilibré, avec un cours moyen supérieur au prix d'hypothèse, mais insuffisant en même temps, car avec un rythme qui n'arrive pas à inverser la tendance baissière de l'épargne nationale. Il s'agit d'un début de redressement du prix du baril qui a commencé depuis fin 2016, avec un cours moyen de 47 à 52 dollars à partir de janvier 2017 (55 dollars pour mars 2017). Ce niveau, qui est resté pratiquement constant dans une fourchette de 53 – 57 dollars sauf pour la période de mai, juin et juillet 2017 (43,44 et 48 dollars) avant de se stabiliser entre août et septembre (51 à 55 dollars) et de remonter tout en enregistrant quelques brefs pics pour atteindre une fourchette constante à plus de 60 dollars. Sur le plan des indicateurs intérieurs, les principaux agrégats pour 2017 se résument d'abord dans l'incapacité de l'épargne institutionnelle publique à couvrir ou à compenser le déficit budgétaire avec un FRR épuisé. Le volume des dépenses nous livre une indication significative sur l'importance du modèle qu'entretient l'Etat, basé sur la demande et non pas sur l'offre. L'Etat reste le principal entrepreneur et le premier demandeur chargé d'alimenter une croissance économique. Ce modèle de croissance se concrétise par des réalisations d'investissement faites sur le terrain, avec une perspective de monétisation et de rendement moins probable. Le recours cumulatif à l'épargne publique entraîne de facto une cadence des décaissements supérieure à celle des encaissements. Il s'agit aussi du ralentissement de l'activité économique, causée principalement par une réduction de la dépense publique d'équipement pour la LF 2017 (-38% en CP) qui a entraîné une réduction du volume des échanges entre agents (entreprises, ménages, organismes, commerces, etc.), avec plusieurs effets dérivés et notamment baisse de la fiscalité ordinaire, de la liquidité et la demande à la consommation. Quelle lecture faites-vous des mesures annoncées face à la crise ? Les dispositions de la LF 2018 s'imposent en tant qu'instrument de régulation pour trois types de gisements. Avec l'argumentation du prix du carburant, le premier gisement est doublement concerné, à la fois pour générer des ressources supplémentaires au prorata des quantités consommées, mais aussi pour une modération de la consommation en fonction d'une flexibilité et des plafonnements possibles des achats par les petits consommateurs. Les deux tendances ne donnent pas automatiquement les mêmes résultats, car la première profitera aux ressources intérieures et la deuxième servira à l'épargne extérieure. Le deuxième instrument concerne une relance progressive de la commande publique, typiquement à un modèle de relance et le retour du rôle de l'Etat comme principal acteur pour dynamiser la croissance. Ce modèle type (keynésien) ne peut pas tenir plus que sa capacité maximale, à la fois mobilisatrice de ressources et génératrice des moyens et services. Les moyens créés doivent faire l'objet d'une monétisation et d'un retour sur rendement. Le basculement d'un modèle basé sur la demande vers celui basé sur l'offre nécessite encore plus de temps avec une mobilisation de tous les opérateurs économiques publics et privés. Le troisième instrument concerne l'obligation de généraliser les systèmes de paiements électroniques avec ou sans contact. Cette obligation répond à un besoin structurel vers la captation et la bancarisation des valeurs fiduciaires transigées en M1 sur les différents marchés. Concernant le financement non conventionnel… Il s'agit d'un instrument monétaire mis au service d'un autre instrument budgétaire. Il est venu pour répondre à un seul besoin impératif urgent, celui d'éviter un freinage brutal de la locomotive économique. Après le rétrécissement des ressources et de l'épargne publique, il y a eu deux tentatives de redressement. La première étant structurelle et concerne la bancarisation des valeurs monétaires fiduciaires en 2015, elle avait pour objectif d'élargir une base scripturale auprès des banques primaires pour pouvoir en dégager un volume supplémentaire en création monétaire, car les banques primaires créent de la monnaie pour financer les projets d'investissement et d'infrastructures, et cette création ex nihilo se base sur toutes les valeurs disponibles sans vraiment les engager physiquement. Mais le bon fonctionnement d'un système universel de financement dans une économie nécessite que tous les acteurs s'engagent dans des plans d'investissement de diverses natures, pour qu'enfin la boucle soit bouclée et que l'équilibre entre les activités dans un schéma interne soit assuré en misant sur les volumes et les valeurs des échanges avec diverses locomotives typiquement à un modèle basé sur l'offre. La deuxième tentative, qui s'attache à une logique de mobilisation, est l'opération de l'emprunt obligataire de 2016 qui, dans sa nature, cherchait à collecter une grande masse des ressources disponibles, mais qui a provoqué au passage un effet d'assèchement monétaire sur la place bancaire, par une simple voie de transfert de compte à compte. L' émission monétaire est alors devenue une décision forcée et un passage obligé pour pouvoir compenser l'assèchement de liquidités sur les banques et aussi pour pouvoir libérer une partie de la dette publique qui était difficile à résorber par le Trésor public. Un tel soulagement de la dette entraînera un effet de relance de l'activité au sein des entreprises contractantes concernées. Cette émission monétaire se résume dans un premier temps par le transfert d'une dette publique budgétaire vers une dette monétaire contre des actifs émis par le Trésor public au même titre que les dettes concernées. Le risque inflationniste réside dans la façon de son évolution entre banques primaires face aux autres acteurs économiques et ensuite dans son injection au sein de l'espace macroéconomique à travers un retour sur un processus bien maîtrisé et traduit par des activités de production, de monétisation et de commerce intérieur bancable. Qu'en est-il des tergiversations autour de la régulation des importations ? Le système économique mondial est basé sur le principe des échanges, pour nous étant une économie qui doit entretenir des relations commerciales avec le reste du monde, notre souci majeur c'est de savoir comment maîtriser les véritables leviers capables de faire basculer les balances des échanges en notre faveur dans certains cas et aussi de plafonner notre dépendance dans d'autres. par ailleurs, la hausse ou la baisse des importations sont issues d'une suite logique de la demande sur le marché, entre produits importés avec les produits locaux disponibles et de qualité ou ceux qui ne sont pas disponibles du tout. Une limitation des importations dans la perspective de sauvegarder des réserves en devises doit s'accompagner d'un tissu d'investissements capable de compenser la demande ordinaire en volume et de générer une fiscalité ordinaire supplémentaire. Quel bilan faire en matière de diversification de l'économie en 2017 ? Notre modèle générateur de ressources financières externes dépendra encore et pendant des années du secteur des hydrocarbures et nécessitera aussi un élargissement de ce gisement en comptant à moyen et long termes sur les énergies non conventionnelles. Un modèle diversifié nécessite l'engagement de la micro-économie en misant sur une chaîne des valeurs élargie et diversifiée, car en analysant l'activité économique, on remarque que les acteurs économiques s'inscrivent en priorité dans des secteurs qui sont en périphérie ou en relation directe avec la dépense publique. Ce schéma utile pour une relance mais pas une durabilité devra s'orienter graduellement vers un modèle basé sur l'offre, au lieu qu'il soit basé uniquement sur la demande. Une telle transition nécessite une synergie de mesures en mobilisant tous les acteurs, des filières techniques de l'enseignement supérieur, dans l'entrepreneuriat, la recherche, les finances, l'investissement et la logistique. Quid des perspectives ? Avec la hausse de la dépense publique, l'activité économique connaîtra probablement une reprise progressive qui favorisera une amélioration du niveau des transactions et des liquidités. Ce début de dynamisme nécessitera aussi un accompagnement impératif de la place financière en tant que compensateur de trésorerie pour les acteurs. Le niveau de l'inflation augmentera probablement durant quelques mois avant de se stabiliser, le décalage des prix sera causé en majorité par les actions spéculatives. L'usage des moyens de paiement électroniques permettra de réduire le volume de la masse monétaire M1 sur le marché de détail.