Ce bilan a été présenté hier, à l'occasion de la première journée de greffe de cellules souches hématopoïétiques, coïncidant avec les vingt années du lancement de cette activité au Centre Pierre et Marie Curie par Pr Rose-Marie Hamladji, alors chef de service d'hématologie. Mais le nombre de patients inscrits en liste d'attente pour bénéficier d'une greffe (autogreffe ou allogreffe) s'allonge d'année en année, vu le nombre de nouveaux cas enregistrés, ont relevé les spécialistes, qui déplorent le manque de moyens matériels et humains pour assurer de manière optimale cette lourde activité qui nécessite une multidisciplinarité. L'insuffisance des structures de prise en charge pénalise ainsi un nombre important de patients présentant des cancers hématologiques et des hémopathies non malignes de telles techniques, seul traitement curateur de ces pathologies. Pour Pr Malek Benakli, chef d'unité greffe au CPMC et coordinateur du groupe algérien de travail sur la greffe de cellules souches hématopoiétiques (GATGCSH), durant ces vingt dernières années depuis le lancement de la greffe au CPMC, beaucoup de choses ont été faites, mais beaucoup reste à faire. «Nous arrivons quand même à réaliser de manière optimale chaque année près de 300 greffes au niveau national, dont 190 au CPMC. Ce qui est important, mais cela est en deçà des besoins. C'est pourquoi nous demandons la multiplication des centres de greffe dans les différentes wilayas du pays», a-t-il indiqué. Et de signaler qu'«en théorie, on devrait réaliser 800 autogreffes et 400 allogreffes, vu le nombre de cas de pathologies enregistrées chaque année, telles que les lymphomes non hodgkiniens, les lymphomes hodgkiniens et les myélomes, qui sont respectivement en nombre de 800, 500 et 600 nouveaux cas par an. Sur les 2000 nouveaux cas de toutes ces pathologies confondues, la moitié des patients nécessitent uue autogreffe, mais étant donné toutes les contraintes rencontrées sur le terrain, de nombreux patients sont inscrits sur des listes d'attente», a-t-il regretté tout en déplorant le manque de moyens humains et matériels. «Si certains centres disposent de moyens matériels, le personnel paramédical fait défaut, tel que l'unité du service hématologie du CHU de Beni Messous, si les moyens humains sont disponibles dans d'autres centres, il manque les équipements nécessaires pour faire fonctionner l'unité de greffe. Un problème qui reste donc posé malgré tous les appels lancés à la tutelle», a-t-il encore précisé. Il a également relevé l'obstacle lié aux ruptures de stocks de médicaments, tels que le produit Melphalan, indispensable au traitement, notamment l'autogreffe, et le Ciclosporine, un immuno-suppresseur, ou le Busilvex. «Le service d'Oran fait face à ce type de problème qui freine sérieusement l'activité. Nous nous battons pour que d'autres services puissent acquérir les moyens nécessaires afin de pouvoir faire bénéficier tous les patients du territoire national de l'autogreffe, qui est aujourd'hui accessible et toutes équipes d'hématologues sont bien formées», a-t-il ajouté. Cette première journée a justement pour objectif de sensibiliser les autorités et l'Agence nationale de dons d'organes pour aider à développer cette activité afin qu'on puisse intégrer tous les patients dans le réseau de soins et faire bénéficier du même traitement les citoyens à l'échelle nationale. Pr Benakli rappelle que dans le cadre du Plan cancer, un budget a été alloué pour l'achat de stériblocs, des équipements nécessaires pour le traitement de l'air au profit de ces centres en attente d'être lancés. Ce qui pourra, sans doute, aider à débloquer la situation de nombreux services projetant de pratiquer l'autogreffe et qui sont jusque-là bloqués. Le cas du CHU de Beni Messous est édifiant. Tout est prêt, il ne manque que les infirmiers, signale Pr Boudjera, chef de service d'hématologie. Pr Nekkal, chef de service du centre de transfusion sanguine au même CHU, s'interroge sur les raisons du blocage de cette unité «pourtant prête à fonctionner». Il a ainsi appelé à faire de la greffe une spécialité à part entière. «Nous avons lancé notre unité depuis 2005 et elle n'a pas encore vu le jour», déplore Pr Abad Mohamed Tayeb, hématologue et ex-chef de service au CHU de Blida. «L'administration n'est pas consciente des enjeux et c'est désolant», a-t-il lancé. Et de regretter la non-reconnaissance par la tutelle de l'unique expérience initiée par le service de Blida portant sur la cytogénétique et la biologie moléculaire, notamment dans le traitement de la leucémie myéloïde chronique et l'apport de la thérapie ciblée.