Le chef de l'Etat serait-il à bout de souffle après onze ans de règne ? Son état de santé s'est-il amélioré depuis qu'il a été opéré d'un ulcère hémorragique au niveau de l'estomac à l'hôpital militaire parisien du Val-de-Grâce en novembre 2005 ? La question mérite d'être posée tant sa présence sur le terrain devient de plus en plus occasionnelle. Rare. Cette image d'un Président effacé de la scène publique, au bout de la première année de son troisième mandat, contraste avec le profil de l'homme qui a pris le pouvoir en avril 1999. Le président Bouteflika a ainsi passé l'essentiel de son premier mandat à voyager à travers le monde pour « redorer l'image de l'Algérie » ternie par une décennie de terrorisme. Il a fini par « atterrir » en Algérie une année avant la présidentielle de 2004. Et il s'est vite lancé dans des tournées marathoniennes à travers le territoire national, souvent ponctuées par un discours-fleuve sur la situation du pays. Au bout d'un mandat, l'Algérien lambda a compris à quel point le président Bouteflika affectionne les sorties tonitruantes devant les caméras de la télévision. Mais les temps ont vite changé. Ses visites de travail, tant au niveau national qu'international, ont connu une baisse continuelle. D'année en année, son agenda de travail se rétrécit pour se limiter, aujourd'hui, aux rendez-vous les plus importants. Il a ainsi participé au cours du premier trimestre 2010 à deux sommets régionaux, l'Union africaine et la Ligue arabe. Au plan bilatéral, il a reçu, le 31 mars, le ministre iranien des Affaires étrangères, Manouchehr Mottaki, au cours d'une visite en Algérie, comme il s'est entretenu avec le président du Sénat mexicain, Carlos Navarrete Ruiz, en visite officielle le même jour à Alger. En dehors de ce genre d'activités moins contraignantes, le chef de l'Etat ne s'exprime plus sur les questions nationales. Il ne dit rien sur les nouvelles orientations économiques. Il n'intervient plus lors de grandes dates comme le 24 février, qui correspond à la nationalisation des hydrocarbures. Une date qu'il a marquée durant ses deux précédents mandats par de longs discours, le lancement de projet ou l'inauguration de nouvelles infrastructures. Cela fait des mois qu'il n'a pas tenu de Conseil des ministres, lui qui a tenté, durant les dix dernières années, de jouer en solo, en centralisant tout. A 73 ans, le président Bouteflika semble le plus souvent usé et fatigué. Il n'arrive plus, selon toute vraisemblance, à « veiller » sur tout, lui qui effectue régulièrement des déplacements à l'étranger pour contrôle médical. Les échanges animés et publics entre certains membres du gouvernement illustrent tant bien que mal cet état de fait. Le navire semble être sans commandant. Et le personnel continue de naviguer à vue…