La foule, encadrée par des éléments de la police, a sillonné, sans relâche, les principales artères de la ville, scandant «Non au 5e mandat. Pouvoir dégage, FLN dégage !». Impressionnantes étaient les marches populaires, contre le 5e mandat et pour le départ du pouvoir en place, organisées hier, après la prière du vendredi, à Chlef et dans la ville côtière de Ténès. Selon certaines estimations, ils étaient plus de 100 000 à avoir participé à la protestation grandiose qui a eu lieu dans la capitale du Cheliff, avec calme et détermination. Contrairement à la marche du 22 février dernier, celle d'hier a vu le déferlement de nombreux citoyens, hommes et femmes, parmi eux des étudiants, des avocats, des artistes, des fonctionnaires et des médecins. La foule, encadrée par des éléments de la police, a sillonné, à plusieurs reprises, les principales artères de la ville, scandant «Non au 5e mandat. Pouvoir dégage, FLN dégage». A Sidi Bel Abbès, des dizaines de milliers de citoyens sont descendus hier dans les rues pour protester contre le 5e mandat de Bouteflika. Les manifestants ont pris possession de la rue après la prière du vendredi, optant pour un itinéraire bien défini. Une marche pacifique a parcouru les principales artères de la ville, à partir du boulevard Didouche Mourad, celui de la Macta, le boulevrad de la République avant de se déverser sur la place du 1er Novembre (ex-Carnot). «Le peuple ne veut ni de Bouteflika ni de Said», «Ouyahia dégage» et «Voleurs, vous avez ruiné le pays !» ont été scandés à tue-tête par une marée humaine qui a marqué une halte symbolique devant l'Ecole des officiers de la Gendarmerie nationale, l'une des plus importantes d'Algérie. En chœur, les manifestants ont longuement crié : «Djich, chaab khawa khawa (armée et peuple sont frères, ndlr)», sous les regards souriants des sentinelles et des gendarmes de l'ex-quartier Viennot. Une scène inédite qui s'est déroulée à hauteur de l'immeuble le Garden et où des applaudissements ont pris le dessus sur les slogans. «Le peuple et l'armée sont unis contre les clans maffieux», nous dit un jeune manifestant, banderole en main. Arrivés devant la permanence du FLN, rue de la République, les protestataires ont vilipendé l'ensemble du personnel affilié à l'ex-parti unique aux cris de «FLN dégage» et «Djzair chouhouda (l'Algérie des martyrs)». Une ambiance bon enfant règne au milieu de la foule composée de jeunes, de femmes et même de personnes du troisième âge. «Il y a bien plus de monde comparativement à la marche du 22 février. Et c'est mieux organisé que la dernière fois», note notre interlocuteur. Comme ce fut lors des dernières manifestations des 22 et 26 février, aucun incident, minime soit-il, n'a eu lieu. Le dispositif policier, renforcé pour la circonstance, a permis d'encadrer efficacement cette marche imposante des citoyens de Sidi Bel Abbès contre le régime de Bouteflika. A Témouchent, si vendredi dernier, ils étaient des dizaines, hier, ils étaient des centaines qui au fur et à mesure de la manifestation sont devenus des milliers, ce qui est énorme pour une petite ville de cette taille. La peur n'est plus, puisque l'élément était en nombre, dépassant de loin la dizaine qu'elles étaient la semaine écoulée. Même une quinquagénaire, le dos voûté, est venue. Elle dit s'appeler Messaoudi Saléha : «Je ne peux qu'être qu'avec ces jeunes ! Mon père, un chahid, aurait été révolté de ce qui a été fait au pays.» Sur les lieux de sit-in et de marche pacifique, les directives données sur Facebbok étaient contradictoires. Ainsi, un groupe s'est retrouvé face au siège de la wilaya à scander son hostilité au 5e mandat : «Tarahlou, ya'ni tarahlou» (dégagez, cela veut dire dégagez !) ou encore «Makache Raïs, kayane tessouira» (Président invisible, sa photo est là) ou encore «20 ans, barakat» sur des banderoles. Pendant ce temps, du côté opposé sur le boulevard Mohamed Boudiaf, un groupe avait entamé une marche vers le sud de la ville. En passant près de l'hôpital Medeghri, les manifestants ont observé le silence pour ne pas déranger les malades. En arrivant au rond-point face à la daïra, les policiers qui assurent habituellement la circulation ont eu droit à des embrassades. Les manifestants ont bifurqué par la rue de l'ancienne gare et remonté sur deux kilomètres vers le siège de la wilaya pour faire jonction avec ceux qui observaient un sit-in. A Mostaganem, juste après la prière du vendredi, des citoyens, en majorité des jeunes, ont déferlé dans plusieurs quartiers populaires pour sillonner les grandes artères du centre-ville. Ils ont scandé des slogans «anti-5e mandat», brandissaient des drapeaux algériens et des pancartes hostiles au 5e mandat. Cette manifestation s'est déroulée dans le calme et sans aucune violence. Les forces de l'ordre, bien présentes, n'ont pas eu à intervenir. Tiaret a renoué, hier en début de matinée, avec les marches. Plus d'une centaine de personnes qui se sont donné rendez-vous sur les réseaux sociaux ont tenu leur sit-in avant d'entamer une marche. «Vingt ans barakat», «Non au 5e mandat» sont été les slogans de cette marche qui est passée par les principales artères. Ebranlée depuis la place Rouge, la marche s'est caractérisée par d'autres slogans tels «Barakat, barakat, ni Ouyahia ni Said», «Des voleurs qui se disent nationalistes», «Chiyatine, chiyatines et se prennent pour des nationalistes». Les marcheurs ont emprunté le centre-ville en passant par les principales rues (La victoire, Bekhatou, Le Regina jusqu'au devant de la résidence du wali (Le Château Rousseau). La marche grossissait au fur et à mesure de sa progression, mais ses membres, des militants politiques, d'ex-élus, dont un ex-maire, des victimes du terrorisme, des hommes de théâtre, des retraités et de simples citoyens restaient pacifiques et ne voulaient pas d'intrus. «Djazair horra dimocratia», scandait notamment la foule. Par moment, on entendait la foule suggérer aux curieux d'intégrer la marche en criant «Eh! vous debout, vous êtes aussi concernés.» Il est à signaler une forte présence des femmes parmi les manifestants. A Relizane, juste après la prière, le large boulevard de l'Armée de libération nationale (ALN), longeant le «fennec land» au chef-lieu de la wilaya, a été investi par des centaines de manifestants spontanément venus massivement exprimer leur hostilité au pouvoir. Scandant haut et fort des slogans versant tous dans leur refus pour la candidature du Président en poste. Hommes et femmes, ils ont marché sans toucher à un arbre ou à un bien public ou privé. Brandissant haut l'emblème national, la foule avançait et vociférait des propos signifiant son son rejet au candidat de la coalition. «Non au 5e mandat», « Barakat» sont les cris qui fusaient de la masse qui manifestait avec des tableaux, où on voyait le 5 barré. L'on apprend que Oued R'hiou et Mazouna, deux autres importantes localités ont, elles aussi, vécu un après- midi pareil. Enfin, A Mascara et à Maghnia, des milliers de personnes ont manifesté contre le 5e mandat de Bouteflika.