Des millions d'Algériens, sans risque de se tromper sur le chiffre, ont marché, hier, dans tout le pays pour s'opposer à cette tentative d'imposer le fait accompli, en déposant, par procuration, la candidature du président Bouteflika auprès du Conseil constitutionnel. La manœuvre des tenants du pouvoir est déjouée. Leur offre politique présentée, dimanche dernier, pour tenter d'absorber la colère des Algériens ne passe pas. Le référendum de la rue a tranché. Le verdict est cinglant : «Pas de 5e mandat !» et «Le peuple veut la chute du système.» Des millions d'Algériens, sans risque de se tromper sur le chiffre, ont marché, hier, dans tout le pays pour s'opposer à cette tentative d'imposer le fait accompli en déposant, par procuration, la candidature du président Bouteflika auprès du Conseil Constitutionnel. Ainsi la proposition du président Bouteflika, lue par son directeur de campagne Abdelghani Zaâlane, dans laquelle il demande un mandat d'une année pour organiser la transition vers «une nouvelle République» est balayée de fait. Et le chiffre de près de 6 millions de signatures d'électeurs qui auraient donné leur accord pour le 5e mandat, ne pèse plus rien devant cette déferlante humaine qui a occupé la rue et qui continuera à le faire, sans doute, durant les prochains jours. De ce fait, si les tenants du régime comptaient sur un essoufflement du mouvement, enclenché au lendemain de l'annonce officielle de la candidature du chef de l'Etat, ils ont déjà une réponse. Claire et sans bavure. La mobilisation populaire a connu son point culminant en ce vendredi 8 mars. Personne ne peut pronostiquer encore sur l'avenir de cette contestation. De nouvelles formes de protestation sont déjà en préparation, dont la désobéissance civile annoncée pour les tout prochains jours et qui sera marquée par une grève générale dans tout le pays. Une véritable crise politique Par cette mobilisation, en tout cas, le peuple réclame la récupération de son dû. Il fait valoir le contenu de l'article 7 de la Constitution qui stipule que «le peuple est la source de tout pouvoir. La souveraineté nationale appartient exclusivement au peuple». Voilà une autre réponse à ces responsables des partis au pouvoir qui, de longues années durant, opposaient ce principe constitutionnel à toutes les voix opposantes réclamant l'alternance au pouvoir. Et maintenant, oseront-il encore confisquer ce pouvoir ? L'élection du 18 avril qu'ils s'acharnent à maintenir contre vents et marées a-t-elle un sens ? En tout cas, la crise politique, de l'avis de tous les observateurs de la scène nationale, est sans précédent. Elle est, peut-être, la plus grave de toute l'histoire du pays. Les partisans de la «continuité» ne l'ont pas vu venir du haut de leur tour d'ivoire. Ils croyaient, jusqu'à un passé très récent, qu'en Algérie il n'y avait que cette clientèle facilement domptable et qui succombe à tous les appâts… y compris à un sandwich au cachir. Désormais, le feu a gagné leur propre maison. La crise s'est déjà installée au sein du FLN, principal partisan du 5e mandat, où on assiste à une cascade de démissions des cadres. Le secrétaire général de l'UGTA, Abdelmadjid Sidi Saïd, assiste, lui aussi, à une véritable révolution au sein de la centrale syndicale, où plusieurs unions lui contestent le droit de se prononcer en leur nom en faveur du 5e mandat.