La fiancée est belle, rêveuse, bercée par une musique raï aux paroles licencieuses. Les semaines, les mois passent et son fiancé n'est plus réapparu. L'affaire de cœur, pleine d'aigreur et de larmes, se complique lorsque le ministère des Affaires religieuses s'en mêle, obligeant les imams à ne prononcer la Fatiha qu'en cas de signature préalable de l'acte de mariage. Les fiancées déchues entament alors de pénibles démarches pour obtenir le papier de « dissolution du mariage avant consommation » ou celui du divorce. Les rêves de mariage et de bonheur conjugal s'évaporent dans les dédales bruyants et vaporeux des palais de justice. Pour obtenir le papier annulant le mariage avant sa consommation, les jeunes femmes doivent présenter devant le juge un certificat de virginité appuyé par des témoins qui peuvent déclarer, sans se tromper, que la jeune femme n'a jamais quitté le domicile de ses parents. Les femmes qui ne parviennent pas à apporter la preuve de leur virginité se voient dans l'obligation de demander le divorce, sans même avoir goûté aux délices de la vie à deux. Une situation qui met l'avocate Fatima Benbraham hors d'elle : « Une circulaire du ministère ne peut annuler une loi de la République. Cette circulaire n'est valable que pour les imams. Dites-moi bien qui est gagnant et qui est perdante ? », s'offusque-t-elle. Et d'ajouter : « Ils ont piégé la femme pour éviter le mariage coutumier. Nous nous retrouvons ainsi dans une situation illégale. Des centaines de femmes sont en train de se battre pour se dépêtrer de cette situation. C'est un mariage imparfait, irrégulier et irreligieux. » Elle raconte le « drame » de l'une de ses clientes mariée trois fois de cette manière. « Ses trois fiancés ne sont jamais venus la chercher. Elle a connu trois divorces alors qu'elle n'est jamais sortie de la maison de ses parents. A 37 ans, sa vie est fichue », raconte Me Benbraham. Dans d'autres cas, soutient-elle, « la femme entre dans un cercle vicieux fait de prostitution et de pertes d'illusions ». Pour elle, cette circulaire a conduit à « l'avilissement » de la femme. Elle renchérit : « Elles font leurs premiers pas dans la vie conjugale avec une masse de problèmes. Pourquoi ne pas mettre en place un registre dans les mosquées ? Pourquoi est-on obligés d'aller directement à l'acte de mariage ? » Statistiques : En 2007 Divorces à l'amiable : 11 203 A la demande de l'époux (répudiation) : 17 733 A la demande de l'épouse (tatliq) : 2721 Kholea : 2466 Total : 34 123 En 2008 Divorces à l'amiable : 14 072 A la demande de l'époux : 18 794 A la demande de l'épouse : 3320 Kholea : 3197 Total : 39 383 En 2009 Divorces à l'amiable : 12 900 A la demande de l'époux : 20 134 A la demande de l'épouse : 4050 Kholea : 4465 Total : 41 549 Source : ministère de la Justice.