L'étude Polo, présentée à l'ASCO, le plus grand congrès mondial sur le cancer, 55e congrès américain du cancer ASCO (qui a eu lieu à Chicago du 31 mai au 4 juin 2019), valide pour la première fois dans le cancer du pancréas, un traitement en fonction d'une mutation génétique de la tumeur. Quand la génétique s'invite dans le traitement du cancer du pancréas ! C'est en effet la première fois qu'une étude communiquée à l'ASCO valide, dans le cancer du pancréas, un traitement en fonction de la génétique de la tumeur. En effet, jusqu'à présent, quand on entendait parler de BRCA 1 et de BRCA2, c'était surtout pour évoquer des mutations génétiques associées à un sur-risque de cancer du sein et de l'ovaire. Mais depuis plusieurs années, les scientifiques savaient que ces mutations pouvaient aussi être associées à d'autres types de cancers, comme ceux de la prostate et du pancréas, dans environ 7% des cas. L'étude présentée vient bousculer la donne. Elle démontre clairement qu'un traitement spécifique d'entretien, l'Olaparib (Lynparza, laboratoires Astra Zeneca), donné en association après une chimiothérapie classique à base de platine, retarde significativement la progression des métastases du cancer du pancréas, uniquement chez ces patients porteurs d'une mutation de BRCA1 ou BRCA2. Elle révèle que les patients traités par cette thérapie ciblée de la famille dite des «inhibiteurs de PARP» (voir encadré ci-dessous), ont ainsi un risque très nettement réduit, moins 47%, de progression de la maladie ou de décès. L'Olaparib a été ici testé dans l'étude POLO en comparaison à un placebo comme traitement d'entretien chez 154 patients tous porteurs de la mutation génétique et atteints d'un cancer du pancréas métastatique qui n'avait pas progressé après 16 semaines de chimiothérapie. Leur état est donc resté stable pendant 7,4 mois dans le groupe ayant reçu l'Olaparib, contre 3,8 mois dans le groupe placebo. Cette survie dite «sans progression» de la maladie devra néanmoins être confirmée à plus long terme par les chiffres de survie globale non encore disponibles. La survie à 5 ans n'est que de 5 % «Notre travail ouvre la voie à une nouvelle ère de soins personnalisés pour ce cancer difficile à traiter», a commenté le principal auteur de l'étude POLO, le Dr Hedy L. Kindler, de l'université de Chicago (Illinois). En tout cas, il est clair que cette étude va changer les pratiques. Car la survie médiane est aujourd'hui d'environ un an. Pour rappel, le cancer du pancréas est l'une des tumeurs (environ 10 000 nouveaux cas par an en France) dont le pronostic est le plus sombre. De découverte souvent tardive, il ne peut en effet être opéré que dans un cas sur cinq. Tous stades confondus, sa survie à 5 ans n'est que de 5%. De plus, son incidence est connue pour être en augmentation depuis plusieurs années, sans doute sous l'influence de facteurs alimentaires encore mal identifiés. Un rapport européen publié en novembre 2018 a montré que ce cancer est un peu le mal-aimé de la recherche, puisqu'il ne bénéficie que de 2% des fonds européens de la recherche. Que sont les inhibiteurs de PARP ? Ces médicaments sont connus pour bloquer l'action d'enzymes appelées poly(ADP-ribose) polymérases (PARP). Elles participent à la réparation de l'ADN endommagé dans les cellules. Quand ces protéines sont bloquées, l'ADN endommagé des cellules cancéreuses ne se répare plus et les cellules cancéreuses meurent. L'Olaparib est le premier inhibiteur de PARP mais d'autres molécules (rucaparib, niraparib, talazoparib) existent.