Le 15 juin 1993, Mahfoud Boucebci a été assasiné à Alger. Il laisse derière lui 190 œuvres. Une sommité de renommée internationale dans le domaine de la psychiatrie et de la santé mentale. 26 ans après…hommage. Assassiné Parmi tant d'autres figures assassinées pour leurs pensées, leur militantisme et leur parole, Mahfoud Boucebci a été mortellement poignardé le 15 juin 1993, à l'âge de 56 ans, devant l'hôpital Drid Hocine de Kouba qu'il dirigeait, laissant une épouse et des enfants. Bibliographie Pas moins de 190 œuvres. C'est le nombre de titres qu'a laissé le professeur Mahfoud Boucebci en héritage, témoignage de la diversité de ses centres d'intérêt. Parmi sa bibliographie qui s'étend de 1966 à 1993 : Psychiatrie, société & développement (1979) Maladie mentale & handicap mental (1984), La Psychiatrie tourmentee – L'effet Dagma (1990), et le film réalisé par l'Unicef, Pour un enfant normal (1981) témoignent de ses préoccupations. Droits de l'homme En 1985, le professeur Mahfoud Boucebci a été un des membres fondateurs de la première Ligue des droits de l'homme en Algérie, pour laquelle il a milité jusqu'à son dernier souffle. D'ailleurs, la veille de son assassinat, il avait participé à la constitution du Comité de vérité sur l'assassinat de l'écrivain et journaliste Tahar Djaout, assassiné, lui aussi, quelques semaines auparavant. Enfants Enfants souffrant de troubles mentaux, enfants abandonnés élevés en pouponnières, enfants de mères célibataires, difficultés de l'adoption… A la fin des années soixante-dix, lorsqu'il n'y avait pas grand monde pour s'occuper des problèmes de l'enfance en Algérie, le professeur Boucebsi l'a fait. Il avait fait de ce sujet un projet auquel il s'est complètement consacré. Fondation Créée quelques semaines après son assassinat et agréée l'année suivante à l'initiative de sa famille, ses proches, amis et élèves, la Fondation Mahfoud Boucebci agit dans la promotion de la recherche scientifique et de la culture. Elle a pour ambition de perpétuer la volonté d'engagement au service du pays et, plus particulièrement, des êtres en souffrance, promouvoir la rigueur dans le travail et la formation aussi bien dans le champ scientifique que culturel et de promouvoir des actions dans le champ de la santé mentale, notamment dans leur dimension humaniste. Génération Nombre de psychologues, psychiatres, éducateurs, personnel paramédical ont été formés par le professeur Mahfoud Boucebci qui a, à lui seul, contribué à la formation de toute une génération de professionnels de la santé mentale dont avait besoin le pays à cette époque. Hôpital En hommage à la mémoire du professeur, l'établissement hospitalier spécialisé en psychiatrie et santé mentale de Chéraga porte de nom de Mahfoud Boucebci. Le Blanc de l'Algérie Dans cet ouvrage, Assia Djebar revient longuement sur l'amitié qui l'unissait au professeur Boucebci et se rappelle des circonstances de sa mort. Lui, comme d'autres noms qui ont marqué la vie et le parcours de l'auteur – Albert Camus, Jean Amrouche, Frantz Fanon, Jean Sénac, Mouloud Mammeri, Kateb Yacine, Tahar Djaout – Le Blanc de l'Algérie recrée, à travers leur mort, certains épisodes de la guerre d'indépendance passés sous silence, éclairant ainsi l'amont de la crise actuelle comme guerre fratricide. Militant Actif en clinique mais aussi sur le front social. En plus de ce qu'il a apporté à la recherche scientifique et la santé mentale, le professeur Boucebsi a aussi marqué l'histoire de l'engagement social en Algérie, pour les droits l'homme et, en particulier, ceux des exclus de la société. Discrètement, il a contribué à la création et à l'essor de mouvements associatifs dynamiques tels que Parents d'enfants handicapés, Familles adoptives, Planning familial. Le professeur Boucebci a, durant toute son existence, défendu le respect de la vie, des droits de l'homme, de l'enfant et de la femme, les enfants abandonnés, les mères célibataires, les toxicomanes ou encore les jeunes à la dérive. Origines Né le 22 novembre 1937 à Miliana, le professeur Boucebci est issu d'une famille originaire de Kabylie. Psychiatre Le professeur Mahfoud Boucebci est l'un des fondateurs de la psychiatrie algérienne. Il a été brillamment reçu, en 1972, à l'agrégation de psychiatrie, puis nommé médecin-chef de la clinique universitaire de psychiatrie Les Oliviers, à Bir Mourad Rais. En 1985, il prend ses fonctions de médecin-chef à l'hôpital Drid Hocine à Kouba, Alger, où il est assassiné le 15 juin 1993. Pour le professeur, la psychiatrie fut beaucoup plus qu'une spécialité ou un métier. Il en disait : «Etre psychiatre, c'est emprunter une longue route, pas toujours facile, mais mon souhait c'est qu'au terme d'une longue et riche carrière réussie, vous puissiez vous dire : j'ai chaque jour essayé de soigner la souffrance sans jamais en tirer un profit, j'ai chaque jour respecté l'homme dans son essence libertaire.» (Pr Mahfoud Boucebci, le 2 décembre 1990) Sommité En l'espace de quelques années de recherche et d'exercice professionnel, le professeur Mahfoud Boucebci est devenu une sommité de renommé internationale dans la domaine de la psychiatrie et de la santé mentale. Il était vice-président de l'Association internationale de la psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent et contribuait régulièrement aux travaux de l'Unicef. Transmettre le savoir Transmettre le savoir, sans modération, est une vertu que le professeur possédait et à laquelle il tenait. Connu pour avoir été un enseignant dévoué, Mahfoud Boucebci ne se lassait pas de perpétuer, avec générosité, son savoir et ses connaissances aux jeunes générations. Sans merci, enseigner était pour lui un devoir et une obligation. Universitaire Mahfoud Boucebci a obtenu son diplôme de médecine à la faculté de Marseille en France, et s'est ensuite s'inscrit au CES de neuropsychiatrie. En 1966, il a complété sa formation en neurologie et encéphalographie à la Pitié Salpêtrière, à Paris. Il n'est rentré en Algérie qu'en 1967.