En plus du problème de renouvellement de la licence d'importation, l'entreprise publique, un des fleurons de l'industrie algérienne des années 1970, souffre de l'absence de crédits. L'Entreprise nationale des industries de l'électroménager (Eniem), implantée dans la zone industrielle de Oued Aïssi, à 7 kilomètres à l'est de Tizi Ouzou, et qui active dans le domaine de la fabrication et de la commercialisation des appareils, risque de mettre la clef sous le paillasson en raison de la situation difficile qu'elle traverse, notamment ces dernières semaines. La situation laisse, d'ailleurs, croire à une éventuelle disparition de ce complexe industriel qui emploie 1735 personnes. Les déclarations du président-directeur général de cette entreprise, Djilali Mouazer, que nous avons rencontré, hier, dans son bureau, résument les blocages auxquels font face les responsables de l'Eniem de Tizi Ouzou. Il s'agit, entre autres, d'un problème lié à l'indisponibilité des crédits, car l'utilisation de ces derniers, même pour l'exploitation et le payement des fournisseurs, est bloquée par la BEA (Banque extérieure d'Algérie). Une situation qui complique davantage l'activité au sein de l'usine, puisque celle-ci a suspendu carrément, depuis plus de deux semaines, la production en raison du non-renouvellement de sa licence d'importation des collections CKD. D'ailleurs, les travailleurs ont été contraints de prendre un congé forcé, étant donné que la matière première destinée à la fabrication des climatiseurs, des réfrigérateurs, des cuisinières, entre autres, n'est plus disponible au niveau des ateliers de l'Eniem, qui risque la paralysie totale. Cette entreprise importante pour l'économie de la région, qui possède des capacités de production et une longue expérience dans le domaine de la fabrication et le développement dans les différentes branches de l'électroménager, peut disparaître et laisser ainsi des centaines de chefs de famille sans boulot. Il est utile de préciser, en outre, que l'Eniem de Tizi Ouzou renferme en son sein cinq unités (cuisson, froid, climatisation, commercial et gestion des prestations techniques). Un fleuron de l'industrie nationale qui peut inexorablement disparaître. «Nous avons connu une baisse de la production, puis l'arrêt total de celle-ci en raison de la rupture des stocks de la matière première au niveau des ateliers. C'est pour cela qu'on a avancé les congés des travailleurs avec le maintien juste d'un service minimum pour le commercial et l'administration», nous a confié Dalila Belguesmia, responsable de la communication à l'Eniem. Par ailleurs, concernant la situation que vit cette entreprise et son impact sur l'économie nationale, Mohamed Achir, docteur en économie et enseignant à l'université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, nous a expliqué que le blocage dont fait l'objet l'Eniem est lié à une mesure économique et administrative qui n'a pas, a-t-il précisé, pris en considération la réalité des entreprises et le niveau de développement de chaque territoire dans lequel elles sont implantées. «Le gouvernement n'a pas su mesurer le rôle et l'impact socioéconomiques de chaque région d'implantation. L'Eniem, par exemple, constitue le poumon de l'emploi (plus de 1700 travailleurs) de la wilaya de Tizi Ouzou. Il faut dire aussi que le gouvernement, après avoir engagé des plans d'investissement financés par le Trésor public dans le cadre de la modernisation et de développement des entreprises publiques économiques (EPE), procède paradoxalement au blocage de la production et la croissance des entreprises censées concrétiser ce plan de développement», a souligné le Dr Achir, qui estime aussi qu'il s'agit d'une mesure globale qui ne correspond pas à la réalité de chaque entreprise. Pour le même universitaire, cela dénote de l'absence d'une vision claire et planifiée de l'industrie et la gestion même des entreprises dans notre pays. Il est temps, a-t-il insisté, de libérer l'économie de la gestion administrative et bureaucratique