Principale cause de décès précoce, le tabagisme constitue un facteur à risque pour la majorité des affections respiratoires. Près de 40 fumeurs meurent prématurément chaque jour en Algérie de maladies liées au tabagisme. Accepterait-on ces pertes quotidiennes s'il s'agissait d'un autre fléau ?, s'interroge le Pr Nafti, pneumologue et chef de service de la clinique des maladies respiratoires à l'hôpital Mustapha Bacha à Alger. « En Algérie, environ 15 000 décès prématurés annuels sont liés à la consommation du tabac ; 95% chez les hommes, les femmes restent beaucoup moins touchées, mais l'évolution du taux du tabagisme féminin laisse présager un avenir plus tragique. Déjà, aux Etats-Unis, le taux de mortalité féminine par cancer bronchique est supérieur à celui du cancer du sein. » L'Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu'en 2030, 10 millions de personnes par an mourront dans le monde du fait de leur consommation de tabac. Le Pr Nafti précise que chez l'homme, 91% des cancers du poumon sont attribués au tabagisme et l'excès de risque est proportionnel à la dose, mais ce risque est multiplié par dix à vingt en fonction de la durée du tabagisme. Comme il signale qu'entre 3000 et 4000 cancers du poumon sont diagnostiqués par an en Algérie, avec une incidence de l'ordre de 25 cas pour 100 000 habitants. « La fréquence de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est estimée à 600 000 cas en Algérie. La diminution de la capacité respiratoire du fumeur est de l'ordre de 60 ml/an, soit trois fois plus que celle du déclin physiologique », a-t-il précisé. Les épisodes infectieux sont deux fois plus fréquents chez les fumeurs et la consommation de tabac aggrave la symptomatologie des patients asthmatiques. La mortalité cardio-vasculaire liée au tabac est de plus de 7000 décès. « Le risque coronarien de celui de mort subite est deux à quatre fois plus élevé chez le fumeur, en particulier entre 30 et 50 ans. Il existe une relation dose/effet entre l'importance de la consommation et la survenue d'un infarctus du myocarde ou crise cardiaque, le risque est plus important au-delà de 20 cigarettes par jour. Si les fumeurs ont deux fois plus de risquesd'avoir un accident vasculaire cérébral ischémique (AVC), leur risque d'avoir une atteinte des membres inférieurs (artérite) est 4 fois plus fréquente que chez les non-fumeurs », rappelle-t-il. Le tabagisme passif cause, pour sa part, des dégâts importants. Il signale que, récemment, un lien a été établi entre le risque de cancer du sein et l'exposition à un tabagisme actif ou passif. « Chez la femme fumeuse, l'utilisation d'une contraception orale (pilule) entraîne un risque élevé de thrombose veineuse. De plus, le tabagisme chez la femme diminue la fertilité (comme chez l'homme) et favorise la survenue précoce de la ménopause. » Le fumeur est défini par l'Oms en tant que malade potentiel, et le tabagisme est une maladie chronique. En effet, une fois l'habitude acquise et la dépendance établie, le fumeur ne peut plus se défaire de cette toxicomanie et il passe à un état de dépendance chronique.