C'est une première dans les annales du Parlement algérien. L'Assemblée populaire nationale (APN) est allée, pour la première fois, au bout de la procédure de la levée de l'immunité parlementaire des députés Baha Eddine Tliba du FLN et Smaïl Benhamadi du RND. Ayant refusé de renoncer volontairement à leur immunité, ces deux élus s'en sont remis au jugement de leurs collègues, dont leur majorité appartient à leur famille politique respective, le FLN et le RND. Mais la surprise était tout autre : les députés n'ont pas épargné Tliba, mais ont préservé Benhamadi qui était présent à cette séance pour défendre son cas, contrairement à Tliba qui a délégué un député qui n'a pas osé prendre la parole. En effet, ils étaient nombreux à voter contre la levée de l'immunité pour Smaïl Benhamadi et pour la déchéance du député Baha Eddine Tliba de sa protection parlementaire. Lors d'une plénière tenue hier à huis clos, les députés ont procédé au vote à bulletin secret pour la levée de l'immunité pour les concernés. Smaïl Benhamadi, qui est poursuivi dans l'affaire du groupe Condor et qui a vu plusieurs de ses frères, dont l'ancien ministre Moussa Benhamadi, placés en mandat dépôt, a été repêché par ses pairs : 131 députés ont voté pour la levée de l'immunité, alors que 156 contre, 45 se sont abstenus et sept bulletins ont été annulés lors du dépouillement. Pour Tliba, 277 députés ont voté pour la levée de l'immunité, 30 contre, 30 se sont abstenus et sept bulletins ont été annulés. Apparemment, la campagne menée par Tliba, dont le nom reste lié étroitement à l'argent sale dans la politique, ne lui a pas été d'un grand secours. Dans le courant de cette semaine, il a envoyé des messages et adressé une lettre aux députés pour leur demander de voter contre la levée de son immunité, se présentant lui-même comme une victime du fils de Djamel Ould Abbès, actuellement détenu à la prison d'El Harrach, qui lui aurait exigé la somme de sept milliards de centimes pour être sur la liste des candidats à la députation de la wilaya de Annaba. Tliba a également mené une campagne intense sur les réseaux sociaux pour se faire passer pour un homme intègre et un homme d'alerte qui lutte contre le phénomène de la corruption. Pour lui, la mesure de la levée de son immunité parlementaire «est une provocation». Faut-il rappeler que c'est le ministre de la Justice qui a demandé la levée de l'immunité des deux élus. Officiellement, les rasions ayant poussé la justice a demandé la levée de l'immunité parlementaire ne sont pas dévoilées, mais officieusement, les deux hommes d'affaires sont poursuivis dans différentes affaires liées à des faits de corruption. Le bureau de l'Assemblée a alors saisi la commission des affaires juridiques qui a rédigé un rapport, lequel a été présenté hier aux députés. Il comprend la demande du ministère de la Justice et les réponses des deux députés concernés par la levée de l'immunité parlementaire. Contrairement à de nombreux députés et sénateurs qui ont accepté de leur propre gré de renoncer à leur immunité pour se mettre à la disposition de la justice, Tliba a refusé non seulement de le faire, mais a contesté cette démarche, estimant que la «diffamation» et le «harcèlement» dont il fait l'objet émanent des manœuvres des relais de la issaba (la bande) à l'encontre de ceux qui sont réfractaires à l'ordre établi.