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Métamorphose en extrême-orient
70e anniversaire de la proclamation de la république populaire de chine
Publié dans El Watan le 06 - 10 - 2019

«Peu importe que le chat soit noir ou blanc, tant qu'il attrape la souris.»
Ce n'est pas à Mao (Zedong), le fondateur de la communiste République populaire de Chine que le Céleste Empire doit sa splendide métamorphose. Le «Grand bond» dans l'«au-delà» infiniment développé, «high-tech», les puissance, gloire et prospérité retrouvées sont l'œuvre du Petit Timonier, Deng Xiaoping, 1m 48, mais grand pragmatique devant l'Eternel. Réformiste, «révisionniste» de la pensée révolutionnaire de Mao, Deng, en bon «communiste qui croyait à l'enrichissement», est le père des réformes libérales, de la décentralisation osée (principe de : un Etat, deux systèmes), le prophète de la «open door», la politique d'ouverture sur le monde, et prometteur de cet improbable syncrétisme : «Une économie socialiste de marché aux caractéristiques chinoises.» La doxa officielle de la Chine populaire marie sans gêne et/ou complexe : système de protection sociale, libéralisme économique avec Etat développeur et autoritarisme d'un régime communiste.
Shanghai, la venise de l'extrême-Orient. Aussi dénommée «Tête du dragon» ou «Porte de la Chine sur le monde». Nymphe de 400 ans, affalée, repue d'opulence, sur les bords prospères du Yangzi, la mégapole shanghaienne savoure sa revanche sur son histoire chaotique.
Sous ses airs bohêmes, où il fait bon vivre, de cité futuriste – tracée par son réseau dense d'autoroutes surélevées –, de ville hyper riche irriguée par son port (n°1 mondial des ports en eau profonde avec 30 millions de conteneurs en 2018), Shanghai a su s'élever au-dessus des traumas des guerres d'opium, des agressions coloniales, des massacres infligés par les «triades» d'occupation, de la guerre civile entre communistes et nationalistes.
Avec ses 24 millions d'habitants, 80 millions en comptant les populations agglomérées, elle est la plus peuplée de Chine. Shanghai a, aujourd'hui, les yeux rivés sur la Lune, symbole de l'unification.
C'est jour de fête à Shanghai. Des files se forment à l'entrée des magasins de gâteaux et confiserie et le Yuebing, le «mooncake», le gâteau lunaire, s'y produit comme une star. Houyi, héros de l'antiquité chinoise, raconte la légende, confia l'élixir de l'immortalité à son épouse Chang'e avec qui il formait un «couple proto prolétaire», selon la version officielle – Chang'e le but d'une traite et se retrouva exilée dans le «palais lunaire».
Les parcs de la ville sont ouverts de nuit aux contemplateurs de l'astre lunaire. Les Bateaux-Mouches, qui mouillent dans les affluents du long fleuve Yangzi, sont pris d'assaut par des norias de touristes émerveillés par une cité qui brille de mille feux et scintille d'autant de lucre et pouvoir.
Lujiazui, la vitrine étincelante du «socialisme» à la chinoise
Lujiazui, le quartier d'affaires. Face au Bund, le Shanghai «historique» fait d'imposantes battisses de style gothique, «Art déco», Renaissance…, siège des anciennes concessions internationales (britannique, américaine, française, russe, portugaise et japonaise) qui ont fait la richesse et le malheur de cette cité exotique, de naguère ouverte sur le monde et accueillant des naufragés de l'histoire. Waitan, la berge des étrangers, garde intact son lustre du siècle dernier et, à la nuit tombée, les édifices majestueux des banques et compagnies coloniales sont éclairés aux projecteurs dorés.
De l'autre côté de la rive, PNA, Pudong New Area 30 ans d'âge, la Zone nouvelle de Pudong qui nargue globalement l'histoire coloniale. De l'autre côté de ce qui fut la rive sordide du Huangpu, affluent du fleuve Yangzi, Lujiazui est district des skycraper, des gratte-ciel, l'antre de la zone commerciale et financière de Shanghai (à statut spécial).
Sur 28 km2 se déploie, aujourd'hui, une forêt de tours vertigineuses abritant les sièges de puissantes multinationales, d'une dizaine de Bourses d'échanges, banques et compagnies d'assurance, hôtels de luxe, de gigantesques «malls», une cité d'affaires incarnant «dynamisme shanghaien» et «triomphe» du capitalisme chinois.
Tour Shanghai, 128 étages, 632 m, deuxième plus haute du monde ; Oriental Pearl Tower (la Perle de l'Orient, 468 m), Jin Mao Tower… l'ivresse des hauteurs (et des profondeurs avec la mode des hôtels souterrains) – plus de 2000 tours en érection en 30 ans – est à peine atténuée par le plan de limitation des constructions de gratte-ciel adopté récemment par la ville de Shanghai. C'est que la ville s'est enfoncée de près de 3 cm dans le sol à cause, notamment, d'une nappe qui fuit bas par trop de siècles de surexploitation industrielle des eaux souterraines.
Neuf zones, neuf chances
Pudong district, Shanghai. Le «miracle» de la Zone nouvelle de Pudong (PNA) vaut bien une affiche au Palais des exhibitions. Le guide chinois conte l'épopée homérique de cette nouvelle ville (1,5 million d'habitants) qui n'existait pas il y a à peine 30 ans.
Aujourd'hui, ce sont 523 km2, l'équivalent de Singapour, d'aménagements harmonieux, le long de 46 km de rive fluviale dédiés au dieu Capital et à ses quatre industries : «services», «manufacturing», «culture» et «shopping». «Pudong, ce sont 240 000 entreprises, dont 59 000 créées ces 5 dernières années», dit le guide.
La Chine y a vu tout en grand. Les aménagements opérés, les infrastructures XXL allient gigantisme et recherche studieuse d'ergonomie. Dix-sept milliards de dollars d'investissement dans la PNA, l'une des dernières zones autonomes (franche) créée par le comité central du Parti communiste chinois, faisant d'elle l'enclave libérale par excellence de cette Chine littorale prospère, mais toute aussi inégale en développement.
Neuf zones, neuf chances. Attirer les IDE, localiser des industries de haute technologie est l'obsession du staff dirigeant du Management Center of Pudong New Area (administration sous supervision de l'Etat central et de la municipalité de Shanghai). «Nous avons établi une liste des obstacles qui freinent le développement de la PNA et nous les levons au fur et à mesure.»
Le guide parle : «Recherche opérationnelle», autre obsession des dirigeants chinois, la discipline appliquée aux politiques de développement pour en maximiser les performances et comprimer le temps. De la métallurgie à la biotechnologie, de l'automobile et textile à l'industrie informatique, de la sidérurgie à l'industrie électronique et à l'intelligence artificielle.
100 des 500 plus grandes multinationales sont implémentées à Pudong, aguichés par un régime fiscal avantageux, une main-d'œuvre qualifiée et «bon marché» et la proximité charnelle du gargantuesque marché chinois. Pudong compte pour 145 milliards de PIB en 2018, soit le tiers de la production (de richesse) annuelle de Shanghai.
Lucent, IBM, Roche, General Motors, General Electrics, Philips, Rockwell, Intel, Ricoh (suit une longue liste) ont pris pied dans les Zones de production et exportation de Jinqiao, dans les zones franches et d'industrie de Waigaquiao et son gigantesque port fluvial, et/ou se sont implantés dans la pépinière d'entreprises de Xinghuo. Zone à part, le pôle d'innovation accueille le parc technologique de Zhangjiang, avec ses incubateurs, son projet de «supercalculateur», ses sept universités, sa pléiade de centres et laboratoires de recherche.
Un investissement dans la recherche et développement qui ne se dément pas en Chine : 225 milliards d'euros dans la R&D en 2018, équivalent 2,12% du PIB, loin devant les USA. Pudong a réussi à attirer «cinq prix Nobel», tient à préciser le guide.
«En 5 ans, nous avons créé un deuxième Japon»
Songjiang district. 1,5 million d'habitants. Banlieue chic de Shanghai, dédiée aux campus universitaires. Rendez-vous au China-Arab Research Center on Reform and Development, influent think thank et prestigieuse institution académique, placée sous la coupe de Shanghai International Studies University (SISU). Des sections d'étudiants font leur jogging matinal en tenue militaire.
Le service militaire, obligatoire, c'est un mois d'initiation que les jeunes Chinois(e)s accomplissent au lycée ou à l'université. 13 septembre, c'est la fête de la Lune, fête de l'union familiale, sacrée par excellence à Shanghai.
Pourtant, le professeur Wang (Guangda), son staff, une compagnie d'étudiants es littérature arabe sont au bon accueil. Sur data shows, le professeur, directeur exécutif du centre de recherche, projette les étapes de réalisation des «miracles chinois». L'homme parle de «trillions de dollars», conjugue les agrégats économiques en milliards de milliards de dollars américains.
Depuis 2010, la Chine a détrôné le Japon et est devenue la deuxième puissance mondiale après les USA. En 70 ans, la Chine enfile les records et affole les compteurs (et contemplateurs de dogmes) : taux de croissance à deux chiffres. Une moyenne de 9,4% entre 1979 et 2018.
PIB : de 210 milliards de dollars en 1978, il est passé à 9 trillions de dollars en 2018, soit 16% de la richesse mondiale. A la même période, le revenu par habitant est passé de 222 dollars/an à 9732 dollars. Soit le double de la moyenne mondiale.
La Chine exportait pour un peu plus de 20 milliards de dollars/an, elle culmine aujourd'hui à 4,62 trillions de dollars. Réserves de change : des 167 millions de dollars laissés par Mao à sa mort, la Chine s'est constituée un bas de laine à 3 trillions de dollars. «En 2010, avec un PIB de 5,8 trillions de dollars, nous avons évincé le Japon et, en 5 ans, la Chine a produit l'équivalent d'un deuxième Japon.»
Le monde à l'ère du «Consensus de Pékin»
Le professeur Wang expose, de sa voix monocorde, les paliers de la réussite qui n'est ni le fruit d'un «hasard» et/ou le produit d'une fatalité, précise-t-il, ni d'une «expertise secrète». «Longtemps, on a laissé croire qu'il n'existe qu'une seule voie pour moderniser un pays : la voie occidentale.
On nous disait qu'on ne pourrait accéder à la modernité qu'en mimant l'autre, copier ou dupliquer son expérience. La Chine avait cru à la pluralité des voies et elle vient d'offrir à l'humanité un modèle de croissance inédit qui diffère des modèles en cours en Occident et qui diffère du capitalisme.»
Le triomphe du «modèle» chinois crève les yeux d'un monde sidéré par la vitesse endiablée de sa croissance, son développement massif et intensif. L'Ere du Consensus de Pékin a sonné. Il fait craquer déjà les plaques d'une mondialisation occidentale et annonce un 3e millénaire sous le signe mandarin.
L'Algérie sur les «nouvelles routes de la soie»
Beijing, siège de l'Association du peuple chinois pour l'amitié avec l'étranger (APCAE). Bienvenue dans l'antre de la diplomatie des peuples et du «soft power» chinois, doctrine jumelant activité intense de promotion culturelle et diplomatique et affirmation décomplexée de puissance.
Le musée de l'Organisation – fondée en 1954 – arbore fièrement les réseaux d'amitié construits par cette Chine nouvelle – qui s'apprête à célébrer son 70e anniversaire. Les murs sont tapissés de films retraçant les œuvres caritatives de la Chine à travers le monde, de portraits de révolutionnaires tiers-mondistes, de photos souvenirs des délégations étrangères subjuguées par la civilisation cinq fois millénaires.
Le travelling offert aux visiteurs fait rencontrer «puissants» personnages, opprimés et oppresseurs dans la promiscuité charnelle du concept «d'asymétrie» dans les relations internationales qui fonde (avec la non-ingérence) la doxa de la diplomatie chinoise.
Sagesse, érigée en principe, puisée dans les enseignements du sage maître Kong, Confucius le philosophe et premier éducateur de la Chine. Dans la salle de conférences, un aréopage de «personnalités ressources» exposent sur l'histoire, le présent et l'avenir de «l'amitié entre les peuples sino-algériens».
Li Xinyu, Xie Yuan et Smail Debeche (respectivement directrice générale du Centre de recherche pour la diplomatie non gouvernementale de l'APCAE ; premier vice-président de l'Association du peuple chinois pour l'amitié avec l'étranger ; et président de l'Association d'amitié algéro-chinoise) font le bilan (concis) des relations entre les deux pays.
Des rétrospectives : de Bandung (conférence des non-alignés) en 1955 à la reconnaissance du GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) par la Chine en 1958, des premières équipes médicales envoyées en Algérie, en 1963, par la Chine de Mao, à 1971, année du retour (de la Chine) au Conseil de sécurité de l'ONU (grâce notamment au rôle entreprenant de l'Algérie).
«Des relations qui se sont développées d'une manière régulière», résume Xie Yuan. Avec la signature en 2014 du «partenariat stratégique global» et du mémorandum pour la construction conjointe de la «Ceinture et route de la soie», en 2018, le vice-président de l'APCAE y voit l'amorce d'un «partenariat pragmatique» entre les deux pays. Une «communauté de destin pour l'humanité».
Chine, 1 er fournisseur de l'Algérie, avec plus de 9 milliards
Liu Yuhe a été ambassadeur à Alger durant plus d'une décennie. Il se dit encore «impressionné par l'amitié sincère, la fraternité ancrée dans le cœur des Algériens» et par le souvenir des «jeunes qui l'interpellaient chaleureusement dans les rues d'Alger».
«En 2014, quand j'ai été faire mes adieux au président de la République, Abdelaziz Bouteflika, il m'a demandé de me considérer désormais comme l'ambassadeur de l'Algérie en Chine !» «Entre les deux pays, les deux peuples, ajoute-t-il, ce fut toujours sympathie et soutien réciproques.
Nous avons lutté ensemble. D'abord pour arracher nos indépendance et souveraineté.» Sur le plan économique, l'ambassadeur souligne la «forte complémentarité» et des «échanges commerciaux en croissance continue».
4 milliards en 2008 à 9 milliards de dollars en 2018. «Mais nous pouvons faire davantage.» Sur le plan culturel, le «potentiel de développement est immense. Sur le plan international, la Chine et l'Algérie, partageant les même convictions» quant à la préservation de la paix régionale, entretiennent les mêmes sympathies et soutiennent les mêmes causes.
Zhai Dongsheng, doyen associé de la faculté d'études internationales de l'université Renmin de Chine, a axé son intervention sur la BRI (Belt and Road Initiative), les «nouvelles routes de la soie», qui cacherait un instrument d'hégémonie et/ou une course à l'accaparement des ressources naturelles et recherche de débouchés aux produits chinois.
«C'est totalement faux», dit-il. La Chine posséderait, selon lui, assez de ressources (dont 60% du stock mondial en terres rares, notamment) et a déjà presque gagner sa «reconversion» énergétique vers le solaire. «Nous savons que la structure démographique mondiale est en train de changer et la Belt and Road Initiative ambitionne d'attirer vers elle quelque 5 milliards de jeunes de ce monde (…).»
Confucius et le «soft power» chinois
Hôtel de Beijing, Pékin. Zen. Jiang Feng est directeur adjoint du département Asie Ouest, Afrique du Nord au ministère chinois des Affaires étrangères. Montre en main, flegme emprunté aux hauts fonctionnaires mandarins, le diplomate profite du déjeuner offert en l'honneur de la délégation algérienne* pour un rapide point de presse.
Dans le brouhaha du restaurant musulman – installé à Pekin par Chou en-Lai -– et alors que l'Empire américain bat les tambours de la guerre (économique et commerciale), Feng parle de «paix» entre les hommes et les nations, de «diplomatie de la paix», produit d'une culture et civilisation millénaire… et avant Trump, cite Confucius dont la pensée et corpus de valeurs positives – exaltation de la probité, sagesse, savoir, mérite, piété filiale et autre obéissance au prince et respect de la hiérarchie –, revient dans les bonnes grâces du régime communiste pour une articulation optimum des soft power et désirs de puissance (sage et bienveillante) de la Chine nouvelle.
«L'entêtement des Etats-Unis, dit-il, ne saurait durer (…) et une guerre commerciale entre les deux plus grandes puissances économiques aura un impact désastreux sur la croissance mondiale…», prévient le diplomate. «La poursuite de la guerre, c'est en cela qu'est la défaite», enchaîne Feng évoquant, pour exemple, le puissant empire romain dont le règne fut usé et précipité par les «guerres interminables». La position américaine, ajoute-t-il, est non pertinente car elle reprend les schémas de la guerre froide.
«Le monde a évolué depuis. Dans les sens de la coopération, de la recherche des intérêts communs, du multilatéralisme avec l'émergence de nouveaux acteurs, comme le Brésil et la Chine…» Orient/occident, c'est d'abord, selon lui, l'histoire d'un «antagonisme culturel». «La culture occidentale est basée sur la compétition. Gagner veut dire : gagner seul, au préjudice de l'autre.
Dans notre culture, c'est radicalement différent car nous recherchons d'abord le gain en commun.» Les sanctions américaines, la «guerre» déclarée contre des groupes chinois, dont le géant des TIC, Huawei, sont évoquées entre deux bouchées de canard laqué, la spécialité de la gastronomie chinoise. Dans l'œil du cyclone US, Huawei est de nouveau accusé d'espionnage. Cette fois-ci en Afrique.
Précisément en Ouganda, Zambie et en… Algérie ! En août dernier, une enquête du Wall Street Journal met à l'index des employés du groupe chinois qui auraient «aidé» les régimes de ces pays «à espionner des opposants».
Feng dément catégoriquement. «Un tissu de mensonges, réagit-il. Ce procédé pernicieux ne vise rien d'autre qu'à provoquer les relations d'amitié sino-algérienne.» La Chine, ajoute le diplomate sur le ton de l'ironie, n'a pas «l'expertise» qu'ont les USA dans les systèmes de surveillance de masse que le monde a découvert à travers Snowden.
Shenzhen, la Silicon valley de l'extrême-Orient
Shenzhen, au sud de la Chine. La «ville nouvelle» qui incarne cette Chine qui monte en gamme et dans l'échelle des valeurs.
Ouvrage gigantesque, le HZMB, le Hong Kong-Zhuhai-Macao Bridge, plus de 50 kilomètres de ponts et tunnels traversant le delta de la rivière des Perles, la relie à sa rivale Hong Kong, l'île rebelle incarnant l'offshore capitaliste et… «libertaire» et l'une des dernières concessions internationales à revenir dans le giron de l'Etat central, en 1997.
Entre la RAS (région administrative spéciale) de Hong Kong et la Chine continentale, les formalités douanières et d'immigration sont effectuées sur une de ces îles artificielles du HZMB.
C'est Shenzhen, 40 ans d'existence sous dopamine, qui a propulsé la Chine dans les univers infinis des TIC (technologie de l'information et de la communication) des nano-technologies, de la digitalisation (industrie IOT), de la biotechnologie, de l'industrie spatiale et de l'IA, l'intelligence artificielle, qui aiguisent appétits capitalistiques et ouvrent des perspectives à l'humanité.
Shenzhen fait de l'ombre non seulement à Hong Kong (qu'elle rattrape en «niveau de vie») mais surpasse, et dans bien des domaines, des cités prestigieuses, dont la mythique et pionnière Silicon Valley américaine.
Dans certaines industries, le hardware industrie's, Shenzhen est leader mondial (90% du marché mondial des composants informatiques). Des longueurs d'«avance technologique» sur ses concurrents américains.
Conçue comme un phare d'innovation, accélérant la transition technologique de la Chine, Shenzhen accueille aujourd'hui les mastodontes de l'économie mondiale, dont les géant du web (chinois) Tencent (valorisé à 500 milliards de dollars), Baidu (480 M USD) et (le moteur de recherche) Alibaba. Dans les TIC : ZTE, Konka, Foxconn, Ericsson et l'inévitable Huawei, premier groupe privé chinois (créé en 1987 par un officier de l'Armée populaire de Chine).
Huawei, le dragon technologique
Campus de Huawei. Dongguan, nord de Shenzhen Sur les rives sud du lac Dongguan, sur 32 km2 de superficie, le Ox Horn Research and Development Campus, le centre de recherche et développement de Huawei technologies, un ensemble de 12 cités inspirées de monuments et œuvres architecturales européennes, dont elles portent les noms : Paris, Grenade, Budapest, Heidelberg, Vérone… – 12 cités modèles, reliées par des lignes de tram suisses, dédiées exclusivement à la recherche, à l'innovation et au bien-être intégral des chercheurs affluant du monde entier.
Sous le sol, au-dessus, il n'y a ni trace d'hydrocarbures ni terres rares, encore moins d'usine à gaz torché, que de la «matière grise» vouée à la «recherche fondamentale», à l'intelligence artificielle. Fournisseur principal des solutions TIC au monde, leader des réseaux sans fil, à la pointe de la révolution 5G, Huawei affiche 109 milliards de dollars de chiffre d'affaires en 2018 (+3 fois Sonatrach).
17 milliards de dollars seront investis rien que dans la R&D : créer de la valeur, plus de brevets, plus des royalties et reconfigurer le destin technologique de la communauté humaine. Dans le hall d'exposition, Alexandre Tian, le directeur des relations publiques de Huawei Algérie, fait office de guide. Une visite dans un des lieux saints de la haute technologie chinoise.
Dans sa pellette, une éclectique gamme de produits et services (intelligents) développés et exposés comme dans un musée post-moderne : infrastructures de télécommunication avec leurs stations de base, antennes et équipements de plus en plus miniaturisés, les terminaux avec les derniers smartphones 5G, téléviseurs, ordinateurs ; les logiciels de gestion, les baies de stockage, cloud, les data center géants et autres services aux entreprises.
Des Smart et Safe cities à l'Intelligent Bank, des data center à la gestion intelligente des systèmes de surveillance, des transports, à la chirurgie assistée par ordinateur, au e-gouvernement…aucun domaine n'est à l'abri de la digitalisation et smartisation forcenées. Une ville carburant à plus de 100 GO de débit (2 Go en Algérie).
A la question de savoir quelle a été l'incidence (financière) de l'embargo US sur la technologie et équipement Huawei ? Tian sourit. Au premier semestre 2019, dit-il, Huawei a réalisé un chiffre d'affaires de 58,3 milliards de dollars. «En progression de 23,2% par rapport au 1er semestre de l'année dernière.» Quid des allégations «d'espionnage» ?
Le haut dirigeant chinois est catégorique : «C'est du n'importe quoi… Meilleur contributeur de l'Algérie intelligente, dont 75% de la population utilise quotidiennement la technologie du groupe, Huawei est respectueux aussi bien des lois et règlements algériens que des standards internationaux et de sa propre charte éthique et déontologique.» Huawei ne collecte ni ne stocke les données des Algériens.
Le data center, les serveurs, précise-t-il, sont gérés par l'Etat algérien et par les opérateurs (internet et téléphonie)eux-mêmes. Huawei Algérie a été, rappelle-t-il, le partenaire technologique fiable d'Algérie Télécom, fournisseur de sa première ligne ADSL, des technologies 3, 4 et 5G (en expérimentation). C'est plus de 10 000 ingénieurs et techniciens formés… «Pour vous dire que quand on s'installe, c'est pour toujours.»
(*) Le reportage a été réalisé dans le cadre d'une visite organisée par l'Association d'amitié algéro-chinoise sur invitation du gouvernement chinois. Une délégation de journalistes des médias publics et privés s'était rendue en République populaire de Chine du 8 au 16 septembre dernier.
Pékin, Shanghai et Shenzhen, trois des plus grandes et richissimes villes du pays, symboles de l'essor chinois, ont été retenues pour dérouler un programme intense de rencontres, notamment avec des officiels, responsables et managers chinois. Le séjour a été l'occasion de visites, conférences et rencontres avec des animateurs associatifs, professionnels des médias, entrepreneurs, universitaires.
Réalisé dans le cadre d'un séjour semi-officiel, ce reportage reflète le côté cour d'une Chine puissante et prospère. Le président de la délégation algérienne a plaidé auprès des autorités chinoises l'intensification des échanges académiques, scientifiques, le transfert de technologie et la constitution d'un «front médiatique commun». Smaïl Debeche a également appelé à l'ouverture d'un centre culturel chinois en Algérie.
– «Le peuple algérien saura trouver lui-même la solution à ses problèmes»
Aux relations sino-algériennes, Jiang Feng, directeur adjoint du département Asie Ouest, Afrique du Nord au MAE, entrevoit un «avenir radieux» si les «obstacles à l'investissement, dont la règle des 51/49, sont levés et que le climat des affaires soit amélioré».
L'Algérie sera à terme, dit-il, «connectée à la Route de la soie» à travers, notamment, le port en eau profonde de Cherchell, construit par la Chine. L'Initiative de la ceinture et de la soie, un réseau gigogne de transports aérien, routier et maritime et dont les infrastructures sont financées par la Chine, vient conforter la position de la Chine, premier fournisseur de l'Algérie, avec plus de 9 milliards de dollars en 2018, détrônant l'«historique» partenaire français.
Dernier arrivé sur le marché algérien, le partenaire chinois imprime sa marque (même son hégémonie) dans un large spectre de secteurs : BTPH et infrastructures routières (autoroute Est-Ouest), dans les services, les TIC notamment, dans l'exploitation minière (grand projet de phosphate à Tébessa), les hydrocarbures, dans le commerce…, la Chine évince des «historiques», menace des positions longtemps acquises.
«Aujourd'hui, l'Algérie traverse, dit-il, une période spéciale. Et en amie de valeur, la Chine estime que la préservation de la paix, la stabilité et le développement en Algérie y va aussi bien de l'intérêt du peuple algérien que celui de toute la région.»
Et ce vu «le poids lourd de l'Algérie au sein des mondes arabe, musulman et dans le continent africain». Partant de notre principe de «non-ingérence», précise-t-il, la Chine est persuadée que le «peuple algérien saura trouver lui-même la solution et remettre ainsi le processus de développement sur la bonne voie».


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