Le capitaine de la sélection nationale, Yazid Mansouri, a été copieusement sifflé par des supporters algériens lors du match amical de préparation contre l'équipe des Emirats, à telle enseigne qu'il a quitté le terrain en larmes complètement effondré par tant d'inimitié qu'il n'arrivait d'ailleurs pas à comprendre. Ce genre de réaction de la part d'un certain public qui se dit pourtant solidaire et inconditionnel des Verts en toutes circonstances est très symptomatique de la fausse culture sportive qui caractérise l'environnement de la balle ronde et qui fonctionne au gré des humeurs et des… résultats. Mansouri est le prototype du joueur algérien immigré qui n'a jamais fait de calcul, qui a tout donné à la sélection, et voilà qu'on le remercie par des insultes et des quolibets qui font mal. Le plus grave, c'est que le capitaine n'a pas été plus mauvais qu'un autre sur le terrain. Il a été comme à son habitude, volontaire, généreux dans l'effort, très respectueux de la responsabilité que lui a confiée son entraîneur, mais cela n'a pas été suffisant pour calmer ses détracteurs qui l'ont pris pour cible juste pour le plaisir de le déstabiliser, le démoraliser… Quelle ingratitude ! Qui ose penser que ce genre d'attitude sert l'intérêt de la formation nationale ? Certes les brebis galeuses sont loin d'être une exclusivité algérienne, mais d'aucuns diront que si des groupes de supporters sont arrivés à libérer de la sorte leur hostilité au moment où leurs protégés ont besoin de soutien, c'est parce que, un peu trop démesurément gonflés (par les médias sûrement), ils ont fini par sombrer dans l'outrance de la démesure. Lorsque l'EN avait battu la Côte d'Ivoire en Coupe d'Afrique des nations, nombreux étaient les Algériens qui croyaient dur comme fer que notre représentant allait non seulement remporter le trophée continental, mais qu'il allait faire des miracles dans le pays de Mandela. Depuis, les choses semblent avoir changé avec la reconstitution laborieuse de la sélection qui a eu du mal à retrouver son rythme. Mais la réalité de la relation qui existe entre les supporters et les pensionnaires de l'EN est bien plus complexe pour être considérée comme une simple expression épidermique de chauvinisme qui pousse à l'excès. Elle nous montre qu'une bonne partie des fans algériens, qui ne ratent jamais une occasion pour s'éclater en faveur de leurs favoris, sont souvent pris dans le vertige de l'illusion au point de croire que les Verts sont capables uniquement du meilleur, alors qu'en football il faut aussi compter avec le pire quand les capacités de performance dont on dispose ne correspondent pas avec le niveau de la compétition. Pour être au top avec les grandes nations du football, il faut un potentiel technique de grande valeur, une préparation sans faille et évidemment (on l'oublie souvent) un « coaching » à la hauteur des objectifs tracés. Peut-on dire que l'équipe algérienne, à la veille du coup d'envoi de la Coupe du monde sud-africaine, réunit tous les atouts nécessaires pour réaliser le rêve derrière lequel elle court depuis sa première participation au Mondial espagnol, à savoir la qualification au deuxième tour qui passe pour être un véritable exploit ? Si les individualités retenues par Rabah Saâdane, ramenées à grand renfort des différents clubs européens, ont pour la plupart le profil et le talent pour rivaliser avec le gotha mondial, peut-on dire autant pour la perspicacité de l'entraîneur et ses choix stratégiques qui ont été souvent décriés à juste titre dans le contexte d'un perfectionnement de l'équipe qui n'apparaît pas vraiment à deux encablures du start officiel et qui donc semble donner de sérieuses inquiétudes quant à l'avenir des Verts dans cette confrontation planétaire. De toutes les déclarations, plus ou moins fantaisistes du patron de l'équipe nationale, on retiendra celle qui laissa pantois le journaliste qui a eu le malheur de l'interpeller sur l'inefficacité chronique de la ligne offensive : « Si vous avez des solutions, donnez-les moi. Je ne suis pas un sorcier… » Ainsi donc, Saâdane n'a pas de solutions pour son attaque et compte peut-être à chaque fois sur un miracle pour marquer les buts qui nous feront franchir le cap du second tour. Etrange comme réponse, n'est-ce pas, de la part d'un technicien dont le métier est justement de trouver des solutions aux manques ressentis par l'équipe. En vérité, c'est bien un problème de « coaching » qui de nouveau se pose à l'EN à un moment crucial de son parcours. Ce problème s'est déjà manifesté avec une certaine acuité lors des participations de l'Algérie en Espagne et au Mexique. Dans une interview accordée à A3, Rabah Madjer a rappelé cette grande faiblesse qui a empêché l'Algérie d'aller loin. « L'équipe de 86 était plus forte que celle de 82 soutient le nouvel ambassadeur culturel de l'Unesco, mais on n'a pas su gérer comme il faut le formidable potentiel qu'elle recelait qui avait tout pour jouer un rôle plus important, l'expérience, le talent, la motivation… » La star algérienne de football, indirectement, soulevait la part de responsabilité de l'entraîneur qui est capitale dans l'utilisation de son effectif. En Afrique du Sud, le potentiel existe, mais plus sûrement en valeur individuelle intrinsèque. A-t-il eu le temps nécessaire pour passer d'une sélection à une équipe soudée et cohérente ? Au coach de nous le démontrer…