La nouvelle ARP tiendra sa première plénière après-demain après l'annonce des résultats définitifs, vendredi dernier par l'ISIE, des élections législatives du 6 octobre. A l'ordre du jour l'élection du président de l'Assemblée et des deux vice-présidents. Le leader d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, brigue la présidence de l'Assemblée, première autorité législative du pays. Les islamistes auront à faire quelques concessions aux autres groupes parlementaires, afin d'arriver à un bureau de l'ARP, avec Ghannouchi comme président. Il s'agit, donc, de négocier avec les autres groupes parlementaires, qui acceptent de composer, pour s'entendre sur un bureau, pouvant disposer de la majorité des 109, voire plus, si possible. La tradition démocratique, désormais ancrée en Tunisie, fait que cette élection sera plutôt technique. Ce poste de président de l'ARP n'a pas, par ailleurs, l'aura des présidents du gouvernement ou de la République. Ainsi, le Courant démocratique (22 sièges), l'alliance Al Karama (dignité – 21 sièges) et le Mouvement Chaab (Haraket Chaab – 17 sièges), voire peut-être Tahya Tounes (14 sièges) composeraient avec Nahdha (52 sièges) pour former le bureau de la présidence de l'ARP. Tout ce monde respectera les coutumes disant qu'une vice-présidence aille à une femme. Deal en vue Les observateurs s'interrogent sur la place qu'aura Qalb Tounes de Nabil Karoui et s'il sera intégré au deal de la formation du bureau de la présidence de l'ARP. Le même deal serait, en effet, probable pour assurer la majorité au prochain gouvernement. Si Qalb Tounes, en tant que 2e formation à la sortie des urnes, aura une vice-présidence de l'ARP, rien ne l'empêcherait de faire partie du gouvernement. Car, aucune obligation constitutionnelle n'accorde les postes en fonction des résultats aux législatives. Ce sont des élections internes à l'ARP, où même les élus indépendants peuvent briguer des postes et les occuper s'ils parviennent à obtenir la majorité requise. L'élection en 2014 du nahdhaoui Abdelfattah Mourou, comme vice-président de l'ARP, annonçait déjà le compromis entre Nidaa Tounes et Ennahdha, au sein de tous les gouvernements de la dernière législature. On saura donc, mercredi, s'il y aura pareil compromis avec Qalb Tounes. Regroupements Les échos en provenance de la coupole de l'ARP indiquent que des groupes parlementaires larges sont en cours de constitution pour influer sur le processus politique en Tunisie, aussi bien au sein de l'ARP, que pour la formation du gouvernement. Ainsi, le Courant démocratique (22 sièges) s'est uni avec le Mouvement du peuple (17 sièges) pour former un bloc de 39 députés. Même chose du côté de Tahya Tounes (14 sièges) du chef du gouvernement Youssef Chahed, qui serait en tractations avec Qalb Tounes (38 sièges) de Nabil Karoui. Le deal, entre ces deux formations, serait que Chahed, fort de 52 députés, conduise les négociations pour la formation du gouvernement. Chahed pourrait même compter sur les quatre députés de Machrouaa Tounes, les trois de Nidaa Tounes, les trois d'Al Badil et les deux d'Afek pour rassembler derrière lui la famille moderniste, forte de plus de 60 sièges. Ces derniers ont appartenu, comme Ennahdha, au pouvoir, à un moment ou un autre, depuis 2011. Pareils regroupements laissent deux formations en dehors de toutes les équations, apparentes du moins. Il y a, d'un côté, les 21 sièges de l'alliance Al Karama, ou les mécontents d'Ennahdha, activistes au sein des fameuses Ligues de protection de la révolution. Les Salaheddine Makhlouf and Co sont éloignés des alliances pour des suspicions de rapprochement avec les terroristes. Makhlouf est carrément présenté par plusieurs médias comme l'avocat des terroristes. Ennahdha les cite certes parmi les groupes parlementaires avec lesquels les islamistes vont négocier, Mais, il préfère avoir Abbou (Courant démocratique) et Azzabi (Tahya Tounes), plutôt que ces «indésirables» députés d'Al Karama. De l'autre côté, il y a le parti Destourien libre (PDL – 17 sièges) de Abir Moussi, celle qui défend les acquis de l'ancien régime de Ben Ali et qui veut remettre les islamistes en prison, à commencer par Ghannouchi. Toutefois, si le PDL se place déjà dans l'opposition, les gens d'Al Karama sont les seuls à avoir exprimé leur disposition à gouverner avec Ennahdha. C'est ce dernier qui met Al Karama à l'écart, sachant qu'il n'est pas compatible avec les autres formations. L'équation démocratique tunisienne est difficile à résoudre avec ce Parlement très divisé.