Le taux exceptionnel de 42,5% de candidats reçus au baccalauréat en a surpris plus d'un. Un taux jamais atteint. D'aucuns s'interrogent s'il s'agit d'un bac politique ou de persévérance ? Du côté du ministère de l'Education, le fait n'est pas surprenant, « ce n'est que le résultat des efforts déployés depuis quelques années pour justement atteindre ses résultats, et ce, par l'introduction de la réforme de l'école ». Par ailleurs, l'on suggère que ce taux s'explique par un fait de compensation constaté dans certaines disciplines dont des taux importants sont enregistrés. Il s'agit précisément des lettres et sciences humaines qui sont classées avec un meilleur taux jamais atteint et qui est de 51,09%, suivi de celui des sciences islamiques 67,33% et des langues de 47,96%. Contrairement aux années précédentes, ces filières ont raflé la mise par rapport aux sciences et technologies. Des matières considérées par les pouvoirs publics comme les locomotives pour lancer la réforme du système éducatif. Une contradiction est de ce fait relevée à ce niveau. Comment expliquer sinon ce choix pour les filières littéraires ? Pour certains enseignants, le déficit en matière d'encadreurs dans ce domaine s'est réellement fait ressentir ces dernières années. « Le ministère de l'Education a donc favorisé les candidats de ces disciplines », estime un enseignant qui trouve que cette option fausse complètement les objectifs de la réforme. Le taux de 42% a, selon lui, un lien direct avec ce choix. Il rappelle que cette année scolaire, il ne faut pas l'oublier, a connu de sérieuses perturbations dont la grève de deux mois initiée par le Conseil des lycées d'Alger (CLA) et le CNAPEST et le retard enregistré pour entamer l'année scolaire en raison des travaux de réhabilitation des structures touchées par le séisme du 21 mai 2003. Enseignant, syndicaliste et porte-parole du CNAPEST, M. Meriane estime que la seule explication est que les élèves, avec l'aide des enseignants et des parents, ont fourni des efforts plus que d'habitude. « On ne peut pas dire que ce taux est politique, puisque les sujets étaient à la portée des élèves de niveau moyen et ce sont les PES qui ont corrigé. Ce n'est que le résultat d'une année de travail laborieux. » Pour M. Taouinet, psycho pédagogue et enseignant à l'institut de sociologie à Bouzaréah, ce taux n'est pas effectif. « Avec deux sessions l'année dernière, nous n'avons pas atteint ce taux. Les institutions ont toujours tendance à gonfler les chiffres et les bacheliers arrivent aux universités avec un niveau très faible. La plupart d'entre eux finissent par redoubler à la première année. Ce constat est fait au niveau de toutes les universités », soutient-il. Pour lui, le baccalauréat, qui est un diplôme de l'enseignement général, ne doit plus constituer un visa d'entrée à l'université. « Les résultats d'un séminaire sur l'orientation, que nous avons organisé, ont montré que seulement 3,45% des élèves ont la possibilité d'accéder à l'université sans concours », a-t-il signalé. Abondant dans le même sens, Aït Mohand Ferhat, enseignant et membre du Syndicat national des travailleurs de l'enseignement (SNTE), estime que ce taux a une signification politique. « La fraude n'est pas seulement organisée lors des échéances électorales, elle est présente également durant les examens comme le baccalauréat. Et cela s'est fait dans la conception des sujets », souligne notre interlocuteur. A la question de savoir pourquoi il parle de fraude, M. Ferhat explique que « les pouvoirs publics usent de tous les moyens pour disqualifier les enseignants. Ils n'ont pas confiance en nous. Pourtant, nous avons fait le maximum ainsi que les parents d'élèves, après les deux mois de grève, pour que les élèves en classes d'examen puissent rattraper les cours et être prêts », dira-t-il, et d'ajouter : « A l'avenir, ce taux est susceptible d'être critiqué sur les plans objectif et scientifique. » Il espère, en effet, un meilleur taux effectif et qualitatif pour les prochaines années.