Le ministre de la Communication, Nacer Mehal, semble vraiment tenir à son projet de réorganisation du secteur des médias. Difficile, en tout cas, de douter de sa bonne volonté, puisque c'est pour ainsi dire la deuxième fois en trois jours qu'il rappelle l'existence d'« une réflexion pour trouver des solutions à beaucoup de problèmes que connaît le secteur de la communication ». Dans une déclaration faite, hier, à l'agence de presse APS, M. Mehal a même assuré qu'il soumettra, dès la prochaine rentrée, les textes « déjà préparés concernant tous les segments de la profession et des médias » à un large débat auquel seront conviés les éditeurs et ainsi que les journalistes. Les chantiers que compte ouvrir le nouveau ministre de la Communication porteront notamment sur la convention collective, la carte de presse et la publicité. Au cours de son intervention, Nacer Mehal a insisté, une nouvelle fois, sur l'urgence de réformer le secteur de la communication, « y compris dans la régulation et dans la définition des règles d'éthique et de déontologie ». Concernant l'aspect inhérant particulièrement à la problématique de l'éthique et de la déontologie, il a soutenu que « celles-ci (les règles, ndlr) doivent d'abord être discutées avec les éditeurs et les représentants des journalistes pour trouver un dénominateur commun pouvant empêcher la dérive qui se constate à plusieurs niveaux de l'exercice de la profession de journaliste ». Contrairement à ses prédécesseurs, le ministre de la Communication apparaît favorable à l'idée de la mise en place d'une structure indépendante pour traiter ces deux questions. « (…) Il s'agira pour les journalistes eux-mêmes de mettre en place le cadre organisationnel qui défende l'éthique et la déontologie », a-t-il défendu avant d'appeler, dans ce contexte, à une « large concertation » de nature à « consolider les acquis d'une presse plurielle et en mesure d'aider à organiser au mieux la profession ». Ce qui, par contre, intrigue un peu, c'est que M. Mehal n'est pas revenu dans ses déclarations sur la nécessité d'amender l'actuelle loi sur l'information. Bien qu'ayant le grand mérite d'avoir permis la naissance de la presse privée, cette loi, promulguée il y a 20 ans (3 avril 1990) présente néanmoins de nombreuses insuffisances. Les professionnels de la presse sont unanimes à soutenir l'idée que la révision de la loi sur l'information est un passage obligé pour réussir tout projet sérieux de réforme du secteur des médias allant dans le sens d'une ouverture et d'une plus grande professionnalisation. Le ministre de la Communication n'a par ailleurs plus reparlé de la gestion des imprimeries d'Etat, des sociétés régulièrement accusées de fonctionner selon des logiques autres que commerciales et de fausser gravement le jeu de la concurrence en permettant à des journaux sans ancrage et sans lectorat de continuer à exister. Pourtant, il a pour ainsi dire inauguré son travail à la tête du ministère de la Communication en commençant par menacer les journaux, qui ont l'habitude de laisser des ardoises mirobolantes au niveau des imprimeurs publics, d'être simplement suspendus de tirage s'ils ne règlent pas leurs dettes qui, pour beaucoup, s'élèvent à des dizaines de milliards. Ce qui est sûr, c'est que Nacer Mehal, qui hérite de la gestion d'un secteur connu pour subir de très fortes pesanteurs politiques, n'aura certainement pas la tâche facile pour mettre en œuvre son projet de réforme pour la simple et bonne raison que sa démarche n'ira pas sans remettre en cause de nombreux intérêts de pouvoir et d'argent. Il ne faut pas oublier que ses nombreux prédécesseurs ont été éjectés de leur poste après avoir affiché leur volonté de changer les choses et de donner un coup de pied dans la fourmilière. Aussi, il serait intéressant de savoir de quelle marge de manœuvre dispose réellement le nouveau ministre de la Communication dans la mesure où il est appelé à travailler dans un gouvernement qui ne s'est pas illustré jusque-là pour ses penchants en faveur de la liberté de la presse.