Les professionnels des médias ne peuvent travailler durant la période du couvre-feu ou se déplacer vers d'autres wilayas pour rendre compte de la situation. Les laissez-passer que leur délivrent les chefs de daïra leur permettent de rejoindre leur lieu de travail ou leur domicile. Depuis l'instauration du confinement sanitaire par les autorités, en raison de la pandémie du coronavirus (Covid-19), les médias sont soumis à un laissez-passer pour exercer leur mission de service public, qui consiste à informer l'opinion publique de tout ce qui concerne la crise sanitaire induite par la pandémie du coronavirus (Covid-19). Or, la procédure de délivrance de ce document et les restrictions imposées aux journalistes soumettent ces derniers à un véritable confinement. Cette décision ne peut être justifiée par le souci de «préserver» la santé des journalistes, sachant que durant les années 1990, lorsque le couvre-feu a été instauré pour des raisons sécuritaires liées au terrorisme, les professionnels des médias circulaient librement, avec un laissez-passer sans aucune restriction. Aujourd'hui, les organes de presse sont sommés de présenter une liste réduite de leurs journalistes (avec l'exigence de mentionner leur adresse personnelle) au chef de daïra de la circonscription, dans laquelle se trouve leur siège social et où toutes les demandes des vendeurs ambulants, des commerçants, des transporteurs de fruits et légumes etc, sont déposées. Les représentants des médias doivent donc prendre leur mal en patience pour attendre parfois jusqu'à 48 heures pour obtenir le document qui, finalement, ne sert aucunement le travail de journaliste, puisqu'il indique clairement qu'il a été délivré pour «permettre à son détenteur de rejoindre son lieu de travail et ou de le quitter». Une précision appuyée par la mention de l'adresse personnelle du journaliste. En clair, si le journaliste est arrêté en dehors de l'itinéraire qui relie son lieu de travail à son domicile, il tombe sous le coup de la loi. Mieux encore. S'il réside en dehors de la wilaya de Blida, il n'a pas le droit d'aller travailler dans cette ville. S'il est détenteur de ce laissez-passer, il ne lui servira à rien. Il sera renvoyé par le premier policier ou gendarme qui contrôle les accès de Blida. Peut-on parler du principe sacré du droit d'informer, lorsque le journaliste est confiné dans son bureau ou chez lui et sommé de servir de caisse de résonnance du gouvernement ? Le ministre de la Communication, Amar Belhimer, auquel nous avons posé des questions, (voir entretien) ne trouve pas d'intérêt, pour le journaliste de travailler durant le couvre-feu, d'aller par exemple à Blida. Il explique : «Du fait même que les lieux sous couvre-feu n'offrent pas une large palette de sujets à traiter, le laissez-passer, établi par les services des walis délégués, permet de se déplacer, de nuit, de son lieu de travail à son domicile ou vice-versa. En cas de situation exceptionnelle, qui susciterait l'intérêt médiatique et justifierait la nécessité d'informer comprise comme notion de service public minimum, on avisera. La flexibilité sera alors de mise.» Mieux encore, il estime que «le confinement intéresse davantage les spécialistes, psychologues, psychiatres, sociologues et autres, qui animent les plateaux pour disserter sur les conséquences de l'isolement, surtout si c'est pour filmer des quartiers ou des populations confinées, qui ne constituent point un scoop ou une quelconque révélation». Le ministre promet aux journalistes «une flexibilité» mais uniquement en cas «de situation exceptionnelle, qui susciterait l'intérêt médiatique et justifierait la nécessité d'informer comprise comme notion de service public minimum». Des réponses qui nous laissent perplexes et montrent que nous sommes dans un confinement sanitaire et médiatique !