Les membres du conseil scientifique de suivi de la pandémie en Algérie pensent que le chiffre actuel ne reflète pas la réalité du terrain, qu'ils situent entre 5000 et 6000 cas de contamination. Le nombre de cas cumulés à 1825 depuis l'apparition du premier cas positif au Covid-19 en février dernier montre une progression de l'épidémie avec une faible intensité des nouveaux cas. Il se trouve qu'entre 15 à 20% des cas sont diagnostiqués au total. A la lecture des chiffres portant le nombre de cas de Covid-19, la courbe épidémique montre une baisse du nombre de nouveaux cas au cours de cette dernière semaine. Le bilan de ces dernières 24 heures fait état de 64 nouveaux cas, portant ainsi le nombre de cas confirmés à 1825, alors que 19 nouveaux décès ont été enregistrés entre le 27 mars et le 11 avril courant, dont 7 cas lors des dernières 48 heures, portant le nombre de décès à 275, a indiqué samedi le porte-parole du comité scientifique de suivi de l'évolution de la maladie. Si certains estiment que ces chiffres ne reflètent pas la réalité du fait que les tests de dépistage se font de moins en moins en raison de la rupture des kits de dépistage (milieu de transport), d'autres imputent cela, entre autres, à la faiblesse du taux de consultations et à l'absence d'un dépistage. L'infectiologue et membre du conseil scientifique du suivi et de l'évolution du Covid-19, le Dr Ilias Bey Akhamoukh, est convaincu que les chiffres annoncés quotidiennement par le ministère de la Santé ne reflètent pas la réalité du terrain. Il estime «entre 5000 à 6000 le nombre de personnes atteintes du Covid-19. Le nombre des décès est par contre réel et significatif. On ne peut pas le cacher. Le problème réside justement dans le manque de kit de diagnostic. Il n'y pas de baisse du nombre de cas, c'est plutôt le nombre de cas dépistés qui a diminué. C'est tout a fait naturel que la courbe épidémique oscille, mais elle continuera à progresser». Et de rappeler que les personnes qui souffrent de formes bénignes de la maladie ne consultent pas et on ne pourra jamais les connaître. «Il se trouve que plusieurs personnes préfèrent supporter une fièvre de 40 degré, des courbatures et prendre du Doliprane que de se rendre à l'hôpital au risque d'être gardées et mises en quarantaine ou en isolement», a-t-il noté. Pour l'infectiologue, le manque de test PCR n'empêche pas les praticiens de procéder au diagnostic du Covid-19 d'abord par un interrogatoire du patient, l'examen clinique et puis un scanner thoracique, qui vient d'ailleurs d'être admis comme une alternative au diagnostic pour mettre les patients sous traitement, surtout ceux qui le nécessitent. A propos des tests rapides, le Dr Akhamoukh déclare que «nous devons apprendre des erreurs des autres. C'est vrai que nous sommes en situation d'urgence et que tous les moyens sont bons, mais pour le moment le recours à l'imagerie médicale reste le plus pratique pour plusieurs établissements». Quant à l'éventualité du pic dans les prochains jours, le spécialiste affirme que «l'évolution de l'épidémie est étroitement liée au comportement des citoyens. Si toutes les mesures de confinement sont respectées rigoureusement, la courbe va s'aplatir au bout d'un mois. Au lieu d'avoir le maximum de cas en une semaine, on l'aura en un mois. Ce qui nous permettra de mieux gérer la situation». Pour Smaïl Nourredine, chef de service d'épidémiologie au Chu Mustapha, «la courbe épidémique montre, quand même, une augmentation du nombre de cas selon les cas identifiés et elle suit son évolution naturelle». Et de souligner qu'il y a tout de même une stabilité dans le nombre des cas. «Il y a une surveillance épidémiologique quotidienne. La situation est suivie de très près afin d'anticiper et surtout arriver à maîtriser la situation en vue d'organiser et prévoir des lits d'hospitalisation des cas confirmés», a-t-il indiqué. A la question de savoir à quel moment l'épidémie atteindra son pic, le Pr Smaïl signale que «personne ne connaît réellement cette donnée. On ne connaîtra le pic que lorsque le courbe commencera sa descente. Par contre, pour le moment, il faut rester vigilant. Car la situation d'aujourd'hui peut être meilleure que celle d'hier, mais on ne sait pas ce qu'on peut avoir dans les prochains jours». Le Pr Smaïl affirme qu'actuellement «on enregistre beaucoup de cas positifs mais peu de patients arrivent en réanimation. Nous espérerons maintenir cette tendance». Comment ces cas sont-ils détectés puisque les kits de dépistage se font rares ces derniers jours ? Le Pr Smaïl, salue la décision du ministre de la Santé, le Pr Abderrahmane Benbouzid, qui a permis d'introduire le scanner thoracique dans l'algorithme pour la prise de décision face à un cas suspect de coronavirus. «Nous sommes dans une situation d'alerte sanitaire, tous les moyens validés sont bons pour diagnostiquer plus de personnes et les traiter», a-t-il souligné. Et de précise que «le scanner n'est pas utilisé dans le cadre du dépistage, qui concerne des personnes saines, mais dans le cadre du diagnostic. Il reste un moyen de diagnostic devant un tableau clinique de suspicion de Covid-19 à défaut de confirmation par test PCR. Ce qui permettra de gagner du temps et mettre le patient sous traitement avec de l'hydroxychloroquine si cela est indiqué». Quant à l'impact du confinement sur l'évolution de l'épidémie, le Pr Smaïl estime que le résultat ne pourra être évalué que dans une semaine, et d'insister sur son maintien, «seul moyen de casser la chaîne de contamination». En attendant les kits pour le test PCR du diagnostic, plusieurs services utilisent les tests rapides et le scanner thoracique pour mettre les patients sous traitement. Ces derniers sont-ils comptabilisés dans le décompte quotidien ?