Il est difficile de quantifier la présence d'étrangers clandestins travaillant dans les chantiers d'Etat et chez les privés. Même si les pouvoirs publics se refusent à tout commentaire sur le phénomène du travail clandestin des étrangers, officieusement, ils seraient plus de 8000 personnes de nationalités différentes à « s'impliquer dans les projets économiques de la wilaya », nous confie, sous le seau de l'anonymat, un inspecteur du travail. Ils sont Pakistanais, Subsahariens, mais la diaspora marocaine est la plus forte, si l'on se fie à un artisan chérifien qui parle de « 5000 Marocains exerçant comme peintres en bâtiment, plâtriers, maçons, etc. » La main-d'œuvre marocaine est fortement prisée pour ses compétences. Les Syriens, qui avaient pignon sur rue pour le fonçage des puits, se sont reconvertis dans les friandises et surtout le pain d'Echam, « un palliatif à leur spécialité, depuis que l'Etat a cessé les subventions aux fellahs et l'interdiction du creusage des puits sur cette bande frontalière par le wali de Tlemcen », précise notre interlocuteur. Pourtant, ces ressortissants, moyen-orientaux pour la plupart, continuent leur « métier » initial loin des yeux des contrôleurs. Ou, peut-être, devant le silence complaisant de ces derniers. Pour les ressortissants subsahariens dont le but demeure la traversée du Maroc à dessein d'atteindre le territoire espagnol, leurs occupations rémunérées se résument en travaux sur les chantiers et dans les champs. « Ils ont les bras et le métier, quoi qu'on en dise. En plus, ils ne sont pas exigeants. Mais rassurez-vous, ils sont payés équitablement, comme nos concitoyens », indique un propriétaire terrien. Un Malien, sans papiers bien entendu, a même ouvert une boutique de réparation de tout ce qui est électronique. « C'est un génie et les tarifs pratiqués sont très intéressants », reconnaissent des usagers ayant eu affaire à Abdullay. Un plâtrier de Fès, dont l'art a dépassé les frontières de la wilaya de Tlemcen, estime que « le mieux serait que les autorités algériennes nous établissent des cartes de séjour pour pouvoir travailler dans la légalité. J'ai des commandes du centre du pays et même de l'Est algérien, mais je ne peux m'aventurer ». Cependant, ses compatriotes ont franchi le pas, puisqu'ils sont à l'œuvre à Alger, à Tipasa et les environs pour orner des villas privées de hautes personnalités. Les artisans marocains, facilement reconnaissables à leur accent, se gardent de s'afficher dans les lieux publics. « Nous travaillons trois mois et nous retournons dans notre pays pour quinze jours de repos. » Il faut préciser quand même que ces travailleurs louent des maisons ou des garages dans les quartiers périphériques de la ville. « Il est difficile de travailler dans ces conditions. Pourtant, nous ne sommes ni des contrebandiers ni des fauteurs de troubles, nous voulons simplement travailler, ramener nos familles et vivre dans un pays frère », disent les Marocains.