Le gouvernement semble décidé à prendre à bras-le-corps le phénomène de l'immigration clandestine et à réglementer les conditions de séjour des étrangers en Algérie. Un projet de loi de 52 articles, divulgué hier par le ministre de l'Intérieur, prévoit notamment la création de centres d'hébergement provisoire pour les étrangers en situation irrégulière… C'est l'ampleur prise par le phénomène de l'immigration clandestine et la présence de plus en plus marquée de travailleurs étrangers, notamment chinois, sur le territoire algérien qui ont dicté l'élaboration du nouveau texte. A préciser également que la divulgation de la teneur de ce projet de 52 articles a coïncidé avec les repêchages en séries de corps de candidats à l'émigration clandestine péris en mer au large des côtes Ouest du pays. L'ombre des harragas a plané sur l'hémicycle puisque plusieurs interventions de députés ont été axées sur la question, critiquant l'action du gouvernement pour endiguer le phénomène. Tout en reconnaissant la gravité du phénomène, Yazid Zerhouni a indiqué qu'il n'existe pas de vide juridique en la matière et que la question était prise en charge par les autorités compétentes. La première mesure annoncée par le ministre de l'Intérieur prévoit la création sur le sol algérien de centres d'accueil pour les immigrants clandestins qui viennent le plus souvent des pays subsahariens et qui font de l'Algérie un tremplin pour rejoindre les côtes européennes. Ces centres seront destinés à assurer «un hébergement provisoire» aux ressortissants étrangers en situation irrégulière en attendant l'accomplissement des formalités pour leur conduite à la frontière ou leur rapatriement vers leurs pays d'origine», a précisé le ministre. Certaines catégories «vulnérables» seront, cependant «protégées», selon les termes de la future loi qui stipulent «la possibilité de protéger certaines catégories vulnérables d'étrangers contre une éventuelle mesure d'expulsion, hormis les cas portant atteinte à la sûreté de l'Etat, à l'ordre public, aux mœurs et à la législation en matière de stupéfiants». Jusque-là, les étrangers en situation irrégulière en Algérie sont reconduits aux frontières immédiatement après leur arrestation où après avoir purgé leur peine pour ceux qui se sont rendus coupables de crimes et de délits sur le territoire national. Outre la création de centres d'accueil, le projet prévoit d'autres mécanismes «plus fermes» contre «les étrangers entrant en Algérie de façon illégale, ainsi que ceux qui portent atteinte à la sécurité nationale», a prévenu le ministre. Même les citoyens qui offrent des facilités aux clandestins risquent d'être poursuivis. Les walis seront, par ailleurs, autorisés à prononcer des ordres d'expulsion. Ce dernier a justifié cette nouvelle orientation par «la démographie galopante, le développement économique et la propagation du commerce informel ainsi que l'évolution des moyens de transport» expliquant que «l'Algérie doit faire face aujourd'hui au crime organisé dans le secteur économique, au trafic de drogue et à la contrebande des armes en relation avec le terrorisme». Même les Européens ont consolidé leur législation dans le domaine pour conférer plus d'efficacité aux mesures de contrôle en matière d'accès ou de séjour sur leurs territoires, a indiqué M. Zerhouni à l'adresse de ceux qui voient dans la promulgation du nouveau texte un renoncement de l'Algérie à ses positions de solidarité avec les peuples, ses principes sur les droits de l'homme, notamment certains députés qui ont qualifié la création de centre d'accueil de «contraire aux libertés». Même si elle n'est pas concernée par les dispositions de la nouvelle loi, l'action des ONG étrangères a été évoquée par le ministre dans son intervention. Affirmant avoir « beaucoup de regrets de voir certains responsables en Algérie proposer de laisser une liberté totale aux ONG», M. Zerhouni a demandé aux ONG de «prouver leurs compétences et leur expertise» pour intervenir dans l'exécution de certains programmes et projets dans le pays si vraiment «elles voulaient travailler dans la transparence». L'intervenant a regretté que certains responsables, même au sein de l'APN, puissent traiter avec ces organisations.