Impacts de la pandémie sur l'économie mondiale Le PIB et le commerce mondiaux ont déjà connu de graves contractions, tout comme la consommation et les investissements privés. Le chômage monte en flèche et les travailleurs du secteur informel subissent d'énormes pertes de revenus dans le monde entier. Selon le FMI, la croissance mondiale va connaître une contraction de 4,2 %, une différence de 7 points de pourcentage par rapport aux projections publiées avant le déclenchement de la crise. -Le volume du commerce mondial devrait enregistrer une diminution comprise entre 32% (OMC, scénario pessimiste) et 9% (FMI) en 2020. -En Amérique latine, la pandémie pourrait entraîner une chute du PIB de -5,3% en 2020, soit la plus forte contraction de l'histoire de la région. En Asie, la croissance devrait s'arrêter à 0% en 2020, soit la pire performance en près de 60 ans ; une récession dans plusieurs pays africains -la première en 25 ans – est désormais probable, avec des conséquences dévastatrices sur les chiffres déjà élevés de la pauvreté. -La plupart des pays en développement sont confrontés à une combinaison de baisse rapide des recettes d'exportation et de tourisme. En outre, les flux de capitaux sont désormais détournés vers les économies avancées. Au cours des seuls deux premiers mois de la crise, les sorties de portefeuille des marchés émergents ont été estimées à 100 milliards de dollars. -Les envois de fonds mondiaux devraient diminuer fortement d'environ 20 % en 2020 en raison de la crise économique provoquée par la pandémie et la fermeture de Covid-19 (Banque mondiale). La pauvreté et l'inégalité vont augmenter -Oxfam estime que les travailleurs devraient perdre jusqu'à 3,4 billions de dollars de revenus. -Plus d'un milliard de travailleurs sont exposés à un risque élevé de chômage, principalement dans des emplois mal rémunérés, où une perte soudaine de revenus est dévastatrice. L'Organisation internationale du travail (OIT) estime que la moitié des travailleurs pourraient perdre leur emploi au cours des prochains mois. -Le développement humain mondial – qui peut être mesuré comme une combinaison des niveaux d'éducation, de santé et de vie dans le monde – pourrait décliner cette année pour la première fois depuis l'introduction du concept en 1990, avertit le PNUD. Impacts sur les finances publiques -Quelque 9000 milliards de dollars de dépenses publiques d'urgence ont été débloqués jusqu'à présent. Le document de suivi des politiques du FMI résume les principales mesures économiques prises par les gouvernements pour limiter l'impact humain et économique de la pandémie de Covid-19. – Selon le FMI, les importants déficits budgétaires qui en résulteront feront augmenter le ratio dette/PIB de 20 ou 30% dans les économies avancées et de 10% dans les pays en développement en un an seulement. Les gouvernements ont émis plus de dettes que jamais, les emprunts par obligations et prêts ont atteint un niveau record de 2600 milliards de dollars en avril. L'évasion et l'optimisation fiscales ont privé les gouvernements de ressources pour répondre aux priorités au cœur de la pandémie -Au niveau mondial, l'évasion fiscale détourne 40% des bénéfices étrangers des multinationales vers les paradis fiscaux. -Le département des affaires fiscales du FMI estime que le total annuel des pertes fiscales des entreprises liées au fait que les entreprises déclarent leurs bénéfices où bon leur semble pour payer le moins d'impôts possibles s'élève à plus de 500 milliards de dollars, dont 400 milliards pour les Etats membres de l'OCDE et environ 200 milliards pour les pays en développement. -On estime que les multinationales américaines à elles seules font perdre à l'UE près de 25 milliards d'euros en impôts sur les sociétés chaque année. -L'activité financière illicite a déjà augmenté, et devrait augmenter, pendant la crise Covid-19, les pays en développement étant les premières victimes de l'instabilité et du déplacement de l'attention. Les réductions de l'impôt sur les sociétés ne sont ni économiquement efficaces ni socialement souhaitables Alors que l'économie mondiale se redresse lentement, les réductions d'impôts ne stimuleront pas les investissements des entreprises: ces dernières ont déjà des capacités excédentaires et limitent leurs plans d'expansion du fait de l'incertitude. -Les recettes fiscales mondiales vont probablement diminuer à un rythme plus prononcé que la baisse de 11,5 % qu'elles ont connue entre 2007 et 2009. -Depuis 2000, les taux d'imposition légaux moyens ont diminué dans les Etats membres de l'OCDE et dans la plupart des juridictions. -Les réductions de l'impôt sur les sociétés accroissent les inégalités de revenus : une étude réalisée aux Etats-Unis montre qu'une réduction de l'impôt sur les sociétés de 0,5 point de pourcentage explique environ 7,8% de l'augmentation moyenne de la part des revenus revenant aux personnes les mieux rémunérées entre 1990 et 2010. -Les pays en développement dépendent relativement plus des recettes de l'impôt sur les sociétés comme source de revenus pour le gouvernement. L'impôt sur les sociétés représente en effet 15% du total des recettes fiscales en Afrique et en Amérique latine, contre 9% dans les pays de l'OCDE. -Les pays en développement ne sont en mesure de percevoir qu'entre 10 et 20% de leur PIB, contre 40% dans une économie avancée typique. Les gouvernements doivent appliquer un taux d'imposition plus élevé sur les rendements extraordinaires des grandes entreprises des secteurs oligopolistiques -Alors que le reste de l'économie s'effondre, paralysée depuis le début de la pandémie, les affaires des plus grandes entreprises technologiques sont florissantes. -Le fondateur et PDG d'Amazon, Jeff Bezos, par exemple, a vu son patrimoine augmenter de 30,6% au cours des deux derniers mois, le faisant passer à 147,6 milliards de dollars ; les fortunes de Bezos et de Zuckerberg combinées ont augmenté de près de 60 milliards de dollars. – Les ventes d'Amazon ont augmenté de 26%, pour atteindre 75,5 milliards de dollars au premier trimestre. Pas de renflouement pour les champions de l'évasion fiscale : -Aux Etats-Unis, les compagnies de croisière, frappées de plein fouet par l'impact économique de la pandémie, pourraient ne pas être éligibles à l'aide du fonds de sauvetage prévu dans le projet de loi de relance de 2 000 milliards de dollars. -Dans l'UE, les entreprises basées dans des paradis fiscaux peuvent se voir refuser l'aide. La France, la Pologne, le Danemark et l'Ecosse, entre autres, ont déjà annoncé qu'ils voulaient interdire à ces entreprises de recevoir des aides. Les gouvernements devraient envisager ou accélérer l'introduction de taxes progressives sur les services numériques : – L'Autriche, le Brésil, la France, le Royaume-Uni, l'Italie, l'Inde, l'Indonésie, l'Espagne et la Turquie ont adopté ou envisagent d'introduire des taxes sur les services numériques. -Le commissaire européen à l'économie, Paolo Gentiloni, a suggéré lors d'une vidéoconférence début avril que l'impact du coronavirus pourrait persuader certains pays de soutenir la taxation des services numériques. Il faut mettre en place une imposition efficace du patrimoine, et en particulier du patrimoine offshore – Selon un récent rapport publié par Americans for Tax Fairness et le programme pour l'inégalité de l'Institute for Policy Studies, entre le 18 mars et le 19 mai, la valeur nette totale des plus de 600 milliardaires américains a fait un bond de 434 milliards de dollars, soit 15%, selon l'analyse des données de Forbes effectuée par le groupe. -L'Argentine et le Pérou envisagent d'augmenter les taxes sur les hauts revenus (l'Argentine a dépensé environ 3,5% de son PIB pour lutter contre les coronavirus, selon un récent rapport du FMI). -En 2019, les milliardaires du monde, soit seulement 2153 personnes, étaient plus riches que les 4,6 milliards de personnes les plus pauvres réunies, selon Oxfam. -La pandémie menace de faire sombrer un demi-milliard de personnes supplémentaires dans la pauvreté -Selon le rapport d'Oxfam «Celles qui comptent», taxer 0,5% supplémentaire de la richesse du 1% le plus riche au cours des 10 prochaines années équivaut aux investissements nécessaires pour créer 117 millions d'emplois dans l'éducation, la santé et les soins aux personnes âgées et dans d'autres secteurs, et pour combler les déficits en matière de soins. (Source Icrict)