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Visite de Kaïs Saïed en France : Inquiétudes franco-tunisiennes sur le dossier libyen
Publié dans El Watan le 24 - 06 - 2020

La Libye a été le principal centre d'intérêt de la visite de travail du président tunisien, Kaïs Saïed, en France, effectuée hier et avant-hier.
Les deux délégations ont, par ailleurs, soulevé la problématique de lutte contre la Covid-19, et la réussite tunisienne en la matière, ainsi que les projets de coopération mutuelle. Le sommet franco-tunisien a été une occasion pour réitérer les positions respectives des deux parties par rapport à la situation en Libye.
C'était l'occasion pour le président Emmanuel Macron d'exprimer ses inquiétudes par rapport à la présence militaire turque en Libye. «Je considère aujourd'hui que la Turquie joue en Libye un jeu dangereux et contrevient à tous ses engagements pris lors de la conférence de Berlin», a dit le président français, lors de sa déclaration suite à son entretien avec son homologue tunisien, tout en rappelant avoir émis les mêmes propos aux présidents turc et américain.
Pour sa part, le président tunisien, Kaïs Saïed, a soulevé la nécessité d'un cessez-le-feu en Libye, afin de reprendre les négociations engagées dans le cadre des Nations unies et le processus déclenché dans le cadre de la Conférence de Berlin, en vue d'engager la reconstruction au bénéfice de tous les Libyens.
Tension régionale
Par ailleurs, la visite du président Saïed en France a été l'occasion pour évoquer les projets de développement en Tunisie. Ainsi, il a été notamment question de la Cité de la santé à Kairouan, des hôpitaux de Sidi Bouzid et de Gafsa et de la ligne TGV qui reliera Bizerte à l'extrême sud du pays. La France a réitéré son engagement à prêter main-forte à la Tunisie dans ces projets.
Concernant le prêt de 350 millions d'euros, évoqué avant-hier par le président Macron, il fait partie d'un plan d'aide de 1,7 milliard d'euros de la France à la Tunisie, étalé sur cinq ans, et dont la tranche de 2020 s'élève à 350 millions de dollars. Il entre dans le cadre de l'engagement de la France à soutenir la Tunisie dans les secteurs de la santé, de la formation et de l'emploi des jeunes.
Les propos du président français sur la présence turque en Libye dénotent de la cassure au sein de l'OTAN, auquel les deux pays appartiennent. Paris et Ankara s'accusent mutuellement de contribuer à la dégradation de la situation sécuritaire dans ce pays, plongé dans le chaos depuis 2011, date du renversement par les Occidentaux de Mouammar El Gueddafi. Suite à son entretien avec le président Saïed, le président Macron a tenu à attirer l'attention des médias sur le fait que les récents incidents navals qui ont opposé la France et la Turquie en Méditerranée, et qui font l'objet d'une enquête à l'OTAN, constituent «l'une des plus belles démonstrations qui soient» de «la mort cérébrale» de l'alliance atlantique, ne manquant pas de juger la situation d'«intolérable».
Pour sa part, le président tunisien a évoqué l'importance stratégique de la Libye et la nécessité de préserver l'unité de ce pays, garante de la stabilité dans la région. Le président Saïed a insisté sur le fait que la Tunisie exploitera sa présence en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité pour renforcer les projets de paix en Libye. «Il s'agit, surtout, d'œuvrer en vue d'une solution libyo-libyenne, unique garante de la paix dans ce pays et de son unité», a notamment assuré le président Saïed. Mais, entre les paroles et la réalité du terrain, il y a tout un océan.


Tensions à Tataouine
Des manifestations ont éclaté à Tataouine, entre les forces de l'ordre et des manifestants, depuis dimanche dernier. Les manifestants réclament l'application de l'accord de Kamour, signé en juin 2017, avec le gouvernement.
Suite à la montée des tensions, c'est désormais l'armée qui veille au rétablissement de l'ordre dans la ville. Quant aux problèmes sociaux, une première réunion ministérielle s'est tenue avant-hier, pour examiner les moyens de désamorcer la tension. Une deuxième réunion se tiendra le 26 juin pour examiner les revendications sociales et de développement dans la région de Tataouine. Il est à rappeler que l'accord de Kamour, de juin 2017, a permis de lever le sit-in qui s'est prolongé pendant plusieurs semaines.
Il a été arraché suite à une médiation du secrétaire général de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT), Noureddine Taboubi. Cet accord stipulait la remise en fonction de la station de pompage de pétrole, l'ouverture de la route porte d'entrée au désert, et la fin des sit-in dans les diverses régions de Tataouine, en contrepartie de la satisfaction des demandes des sit-inneurs relatives au fonds d'investissements doté de 80 millions de dinars ainsi qu'à l'emploi annuellement de 2000 personnes dans les sociétés pétrolières, dans les sociétés de services pétroliers, dans les sociétés actives dans le Sahara et dans la société environnementale.

Tunis
De notre correspondant Mourad Sellami


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