Malgré un contexte sanitaire des plus difficiles en ce début d'hiver à travers le monde, une équipe de chercheurs scientifiques adhérant au projet d'une ferme pédagogique implantée au cœur du Gourara espèrent une amélioration de la situation et le maintien de l'organisation du Premier Sommet des Oasis, courant 2021 à Timimoun. Retour sur l'expérience des deux premières rencontres scientifiques organisées en 2018 et 2019 et perspectives d'une troisième qui se focalisera sur l'agriculture saharienne de demain. A contre-courant des expériences passées et actuelles d'intensification des cultures en agriculture saharienne, le Dr Mohamed Bouchentouf est l'initiateur du projet de développement de la Micro-Ferme Ecologique et Innovante «la Clé des Oasis» à Timimoun, une région qui promeut un nouveau modèle d'agriculture adapté aux changements climatiques et basé sur les principes de l'agro-écologie, en partenariat avec des laboratoires de recherche locaux qui escomptent de faire une évaluation de l'expérience Algérienne dans le domaine de la mise en valeur et la gestion rationnelle des ressources en eaux, l'irrigation, le drainage, la mise en valeur des terres, la maîtrise des aspects organisationnels et techniques par les opérateurs, la réhabilitation des oasis, la maintenance et l'entretien, l'implication des populations locales, l'engagement des jeunes et des femmes dans l'avenir des oasis et de l'agriculture saharienne. Autant de sujets d'échanges dans une approche multidisciplinaire et de capitalisation des connaissances et de partage pour la reproductibilité d'expériences positives, en vue de cerner les contraintes ou menaces qui pèsent sur la durabilité des oasis sur le plan socio-économique, technique et environnemental. Tout cela dans le but d'arriver à des solutions concrètes et réalisables avec une vision stratégique dans la durée pour une meilleure intégration et un avenir prometteur grâce, entre autres, à la digitalisation de l'exploitation agricole. Le Dr Bouchentouf, ancien directeur de l'agriculture à Oued Souf, puis cadre au Commissariat au développement de l'agriculture dans les régions sahariennes actuellement établi en France, œuvre pour une «oasis numérique» de demain et la construction d'un modèle biodynamique qui est au cœur de ce projet pédagogique. Ce modèle cible directement le territoire saharien désertique caractérisé par de fortes contraintes, des températures élevées, une forte évaporation, une grande intensité des vents, accompagnés le plus souvent de sable, et par la présence de riches potentialités de développement. Une dimension environnementale et économique Ayant participé au lancement de la ferme «les clefs de l'oasis» à Timimoun en qualité de Policy and communication manager au CIHEAM Montpellier, une Organisation intergouvernementale dédiée au développement agricole et rural en Méditerranée, Yasmine Seghirate salue l'initiative du docteur Bouchentouf en ce sens qu'elle intègre la dimension environnementale économique et sociétale du développement durable. Il s'agit «d'un projet qui contribue à assurer la sécurité alimentaire des populations les plus vulnérables dans les zones oasiennes, à limiter les impacts négatifs dans les domaines environnementaux et écologiques grâce à la permaculture et la culture en étage et à valoriser des savoir-faire ancestraux, notamment dans la gestion durable des ressources en eau et des sols qui sont en danger à cause de la salinisation», estime-t-elle. Roland Benoît, PDG et formateur à la société Formagiene (France) spécialisée en biosécurité des productions et des stocks par des méthodes antiparasitaires alternatives espère, quant à lui, un partenariat de formation avec les différents acteurs de l'enseignement agricole, en présence d'agriculteurs oasiens, avec pour objectif d'aider à la sédentarisation des familles autochtones sur leur territoire étant acteurs du devenir de leurs descendances pour une agriculture durable, respectueuse de leur environnement, notamment de l'eau et la production de produits sains pour la santé humaine. Valorisation des savoir-faire Khadidja Chennouf, ingénieur d'Etat en aménagement du territoire au Commissariat au Développement de l'Agriculture des Régions Sahariennes à Ouargla apprécie à juste titre la mise en valeur des techniques ancestrales en phœniciculture par des chercheurs scientifiques, notamment en matière d'économie d'eau soit par l'utilisation du lif, un sous-produit du palmier dattier pour retenir l'humidité du sol en jouant le rôle d'une éponge ou l'utilisation du biochar et du voile qui peut conserver l'humidité jusqu'à 70% tout en assurant une bonne aération aux plantes et une protection contre les insectes et les oiseaux. La diversification des intervenants et la pertinence des sujets à traiter par rapport aux attentes des agriculteurs, aux questions d'actualité, aux stratégies de l'Etat et à la spécificité de la région sont les principaux enjeux du projet de la ferme pédagogique estime-t-elle. C'est ce qu'avance Claude Arsène Savadogo, expert agro-économiste du Burkina Faso, qui estime que les interventions sont assez pratiques et concrètes, un point positif qui permet la transmission de connaissances sur le terrain. «Les pratiques oasiennes sont parfaitement transposables au Burkina, mais il est utile d'introduire d'avantage de pratiques sur la fabrication des intrants organiques», conclut t-il. Advertisements