L'Algérie constitue un exemple type dans le monde arabe d'un pays qui peut faire face aux défis linguistiques. En cela les Algériens ont la chance d'être bilingues et ils gagneraient encore plus à intégrer l'anglais, à côté de l'arabe et du français. Ce constat a été établi hier, au Palais de la culture (Alger), par le Dr Nabil Ali, un savant égyptien expert dans le développement des technologies informatiques en matière linguistique. Dans sa conférence intitulée « Société arabe de savoir : vision linguistique », cet expert a insisté sur le rôle que devrait jouer l'Institut supérieur arabe de traduction (ISAT) afin de « renouveler le parler algérien » et, partant, « servir d'exemple pour les autres sociétés arabes ». Cet institut, créé officiellement en mars 2005, est installé à Zéralda (Alger) et dirigé par l'Algérienne Inaâm Bioud. Le Dr Nabil Ali fera désormais bénéficier cet organisme de sa longue expérience, notamment en apportant quelques logiciels importants dans le domaine de la traduction. Pour cet expert, il est impossible de construire « une société de savoir » sans la maîtrise de tout ce qui a un lien avec les langues, plus particulièrement la langue arabe. Il ne manquera pas, à ce sujet, d'évoquer le procès que lui-même a intenté à Microsoft de Bill Gates devant la cour fédérale de Seattle (Etats-Unis). Pourquoi ? Parce que les Américains avaient réussi à subtiliser au Koweït, lors de la guerre du Golfe de 1991, le Windows arabe développé par la société égypto-koweïtienne Sakhr, dont le Dr Nabil Ali fait partie jusqu'à présent. A ce titre, il tiendra à préciser : « Notre langue arabe est aussi complète et performante, pour ne pas dire plus, que l'anglais ou toute autre langue étrangère dominante. » Cela pour contredire, ajoutera-t-il, ceux qui veulent soumettre l'utilisation de l'arabe selon le modèle de la langue anglaise. Il fera savoir qu'un savant pakistanais du nom de Haïdar avait réussi à trouver les solutions au « problème mathématique de la langue arabe ». Aujourd'hui, cette langue est intégralement informatisée à travers des techniques qui recourent à des programmes développant des outils accessoires pour doter la traduction de sa norme automatique nécessaire à son implacabilité. Cependant, il ne ratera pas l'occasion de considérer que les gouvernements se trompent quand ils pensent que généraliser internet permettra de construire une société de savoir. A cette occasion, il rappellera, non sans amertume, que ce sont un Allemand qui a élaboré une encyclopédie répertoriée du Coran, un Hollandais qui en a fait de même pour les hadiths, un Français qui a produit un livre sur le lexique du Coran et un centre de traduction à Saint Petersburg qui travaille sur le projet de la comparaison entre le texte coranique et la poésie de la Jahilia (période antéislamique). Tout cela amènera le Dr Nabil Ali à lâcher : « Ce n'est pas par des textes de loi qu'on protégera ou développera la langue arabe. »