Vainqueurs sans coup férir, les talibans, contrairement à leur comportement entre 1996 et 2001 quand ils étaient maîtres de l'Afghanistan, veulent montrer au monde un visage rassurant. Ils héritent d'un pays exsangue et d'une population extrêmement pauvre. Pour cela, ils ont besoin des bailleurs de fonds du monde entier. Mais les puissants de ce monde ne font même pas semblant de les croire et expriment leur méfiance ouvertement. Chat échaudé craint l'eau froide. Les propos lénifiants des nouveaux maîtres de Kaboul n'ont pas produit l'effet escompté. Ils ont beau dire qu'ils n'empêcheront pas les filles d'aller à l'école et les femmes de travailler, comme ils le faisaient à la fin du siècle dernier, ils n'ont pas trouvé quelqu'un d'assez naïf pour succomber à leur propagande. Personne ne sait ce qui se passe à l'intérieur du pays, en dehors de Kaboul. Durant l'opération de reconquête, les talibans n'ont pas hésité à commettre des exactions contre la population civile, comme par exemple décapiter des jeunes qui refusaient d'être enrôlés chez eux. La présidente de l'université américaine de Kaboul, interviewée par France 24, a révélé qu'elle reçoit des communications de toutes les villes d'Afghanistan, d'où on lui signale que «les étudiants en sciences religieuses» n'ont rien changé de leurs habitudes barbares et que les femmes sont toujours leur objet de prédilection pour les flagellations. Une dame a affirmé que sa fille a reçu des coups de fouet parce qu'elle portait des sandales qui ne répondaient pas «aux normes islamiques». De leur côté, la Russie et la Chine n'ont montré aucune hostilité pour les nouveaux maîtres du pays. Non pas que ces deux pays éprouvent une quelconque sympathie pour eux. Ces deux puissances ont une proximité géographique avec l'Afghanistan qu'aucun pays occidental n'a. Moscou entend éviter au maximum de provoquer des gens qui ne cherchent que la bagarre pour étendre leur influence. La Chine, comme son voisin russe, cherche à éviter toute influence toxique sur sa minorité musulmane et, surtout, à protéger sa route de la soie et des investissements colossaux dans le pays, notamment dans une grande mine de cuivre. Mais c'est un éventuel rebond du terrorisme islamiste qui inquiète le plus. Rien ne dit que les talibans ne seraient pas tentés de retourner vers leurs vieux démons et de relancer la terreur islamiste. Les liens avec Al Qaîda et Daech n'ont jamais été rompus. L'Egyptien Ayman El Zawahiri a chaleureusement félicité Haibatullah Akhundzada lorsque celui-ci a été porté à la tête des talibans en 2016. Colin Clarke, du Sunday Center de New York, considère que la chute de Kaboul est «une victoire claire et retentissante pour Al Qaîda». Edmund Fitton-Brown, coordinateur des Nations unies pour le terrorisme, parle quant à lui de victoire de Daech. Cela veut clairement dire que le risque de développement du terrorisme islamiste est grand. L'Algérie en avait eu un avant-goût durant la décennie noire. Beaucoup d'Algériens liés au FIS avaient fait le coup de feu contre l'armée soviétique puis sont retournés au pays pour répandre la barbarie au nom de l'islam. Les rebelles islamistes qui sévissent au Sahel doivent eux aussi festoyer parce qu'ils s'attendent à des aides extérieures qui leur permettront de rebondir. Comme quoi, la violence islamiste et la Covid, on ne s'en débarrassera pas facilement. Advertisements