Rien de nouveau pour le tourisme en Algérie. Le Conseil des ministres, tenu dimanche, a décidé des «mesures d'urgence pour la relance du secteur». Autrement dit, il n'y aura ni révolution ni décollage. En revanche, il faut craindre quelques dégâts, l'urgence étant la voie royale vers le bâclage des textes de loi et des chantiers, l'escamotage des étapes, le bradage des potentialités et le détournement des richesses. L'urgence, élevée en modèle de gestion, produit des catastrophes, comme celle de la manifestation «Constantine, capitale de la culture arabe 2015», qui a amené le gouvernement Sellal à lancer, dans la précipitation, des centaines de chantiers de réhabilitation du patrimoine historique, sans jamais pouvoir les achever, laissant ouverts aux quatre vents ces bâtiments précieux, qui sont toujours soustraits aux circuits touristiques, huit ans après. Tout ce qui est marqué du sceau de l'urgence porte en lui des signes de fragilité, des défauts parfois mortels. Les exemples sont légion. C'est le cas dans le logement, où l'Etat a investi une fortune pour offrir finalement aux Algériens des appartements médiocres, dans des villes nouvelles sans qualité, construites dans l'urgence. Rappelons-nous le séisme de Boumerdès et son bilan macabre ; rappelons-nous les inondations mortelles de Ali Mendjeli, cette ville nouvelle construite sans un réseau d'évacuation des eaux pluviales ! Les mots sibyllins employés dans le communiqué ayant sanctionné la réunion du Conseil des ministres ne laissent aucun doute : «Accorder un intérêt particulier au tourisme interne», «Promouvoir le tourisme thermal», «Revoir la politique des prix», «Organiser l'artisanat selon les standards internationaux»... Des lieux communs et des annonces sans ambition qui renseignent sur la place accessoire qu'aura le tourisme dans la politique économique du gouvernement d'Aïmene Benabderrahmane. Comme une seconde nature, les gouvernements se suivent et reproduisent la même politique touristique, fille d'une doctrine économique mono-industrielle et d'une peur obsessionnelle de l'étranger. Et telle une fatalité, l'économie nationale, pourtant dans le besoin pressant d'innovation et de diversification, ne pourra pas profiter des possibilités et des richesses que recèle le secteur du tourisme. Pas dans l'urgence en tout cas. L'introduction du tourisme comme source importante de notre revenu national exige une révolution des mentalités, une révision structurelle des bases législatives et un changement culturel piloté par le haut pour que l'ensemble de la société puisse intérioriser la donne et accepter de jouer le jeu. Il s'agit d'un changement de logiciel, sans quoi tout ce qui est promis n'engage que ceux qui y croient, et tout ce qui est fait ne peut que nuire à notre potentiel fragile et non renouvelable. Advertisements