Nouveau désenchantement au sein de la couche travailleuse. Le niet opposé jeudi par le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale au retour à la retraite proportionnelle sans condition d'âge, revendiqué notamment par les travailleurs de l'éducation nationale, a eu l'effet d'un coup de lame dans le corps social. Les coups pleuvent, impossibles à esquiver et le glissement à droite de l'Exécutif n'est pas fait pour soulager les plus vulnérables. Reprenant le motif du déficit financier de la Caisse nationale de retraite (CNR), Youcef Cherfa choisit de maintenir fermé le capot de ce foutoir que sont devenues les principales caisses qui soutiennent le système social algérien, et prolonge l'injustice en mécontentant ceux qui se lèvent tôt et contribuent au maintien de ce système. Car si la CNR connaît un solde négatif chronique, ce n'est sûrement pas la faute à l'enseignant qui a trimé 32 ans durant et désire quitter ce métier pénible avant d'atteindre les 65 ans. Le manque de transparence et le pilotage à vue de cette caisse, comme celle de la CNAS, sont le fait des gouvernements précédents. A quoi s'ajoute le travail informel, non contributif, moteur d'une économie parallèle, dont les acteurs profitent du système de redistribution des revenus de la solidarité sans y verser le moindre dinar. Deux impératifs s'imposent pour éviter la guillotine de l'équation : «Pas d'emploi, pas de cotisation, pas de retraite !» Primo, il faudrait regagner la confiance du contribuable en cessant d'ouvrir aux quatre vents les accès à cette caisse, y compris au gouvernement qui gère les crises par l'extension du domaine de l'Etat et en se comportant en banquier ambulant distribuant l'argent qui n'est pas toujours le sien. Secundo, le gouvernement Benabderrahmane est condamné à réussir le pari de la relance de la production nationale et, par extension, celui du plein emploi, faute de quoi le déficit de la CNR, qu'on estime aujourd'hui à 700 milliards de dinars par an, va se creuser davantage, au risque de faire sauter cet acquis historique. Si l'avenir tient à une gageure, comment dissiper les nuages qui s'accumulent à l'horizon et assombrissent chaque jour un peu plus un présent à peine supportable ? Question dont semble peu se soucier le gouvernement actuel qui fonce tête baissée en augmentant la pression sur la société, tout en sacrifiant les soupapes dont il dispose. La nouvelle annoncée jeudi par Cherfa assassine les espoirs nourris par les candidats à la retraite proportionnelle, et annihile les illusions de leurs représentants que sont l'UGTA et les syndicats autonomes, déjà ulcérés par l'absence de dialogue et par le manque de clarté dans la direction du pays ; une direction qui augmente son train de vie tout en remettant en question des acquis sociaux. Advertisements