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Contrefaçon
Une pratique dopée par le marché informel
Publié dans El Watan le 25 - 04 - 2005

Dans un monde où les produits industriels circulent de plus en plus librement d'un pays à l'autre, il n'y a désormais de place que pour les firmes qui disposent de moyens financiers requis pour mettre sur le marché des produits originels auxquels les actions marketing multiformes et les réseaux de distribution tentaculaires donnent toutes les chances de se vendre.
L'industrie et le commerce mondial étant entre les mains des puissants, les nouveaux venus ont vraiment peu de chances de garantir une réussite internationale à leurs produits quand bien même ils seraient de qualité supérieure. La tentation est alors grande de profiter de la notoriété de certains produits et des réseaux de distribution qui les portent à travers le monde pour imiter à échelle industrielle les articles avantagés par le prestige des firmes qui en détiennent les brevets et, bien entendu, la puissante publicité qui favorise leur promotion. Tout le génie des entreprises qui s'inscrivent dans cette logique consiste alors à imiter le plus fidèlement possible le design des produits concernés allant jusqu'à y apposer le logo de la firme détentrice du brevet. Les marchandises sont alors écoulées à travers le monde et aucun pays, y compris les plus développés, n'est épargné par des réseaux de distribution occultes qui agissent avec une facilité déconcertante, favorisés en cela par l'insuffisance des moyens de lutte, la corruption et l'existence de nombreux marchés informels, où les marchandises contrefaites trouvent des débouchés. Le marché des produits contrefaits a pris une telle ampleur dans les pays sous-développés, mais les pays riches ne sont pas non plus épargnés, qu'il est aujourd'hui difficile de faire la distinction entre un produit de marque et son imitation. Quand un consommateur se targue d'avoir mis la main sur un article portant la griffe d'une prestigieuse firme, le doute subsiste tout de même tant les contrefacteurs réalisent des prodiges, aidés en cela par les progrès de la technologie d'imitation (PAO, scanners, etc.). Toute la différence entre un produit d'origine et un produit contrefait réside dans la qualité des matières premières utilisées, mais il faudrait pour ce faire disposer de contrôle et d'analyse requis. Cela n'est pas à la portée de tous les pays affectés par le fléau de la contrefaçon, encore moins des consommateurs ordinaires qui en sont les premières victimes. En effet, si les firmes créatrices de produits victimes de contrefaçon ont de bonnes raisons de se plaindre de ce fléau qui perturbe totalement leurs pronostics de vente du fait de la concurrence déloyale que leur livrent les contrefacteurs qui mettent sur le marché des produits semblables aux leurs mais à moindre coût, les consommateurs sont certainement ceux qui pâtissent le plus des conséquences souvent dramatiques de la contrefaçon. Il faut en effet savoir que la seule chose à laquelle s'attachent les contrefacteurs est le design, autrement dit l'apparence des produits à imiter. Leurs compositions chimiques et organiques ne sont pas leur souci d'autant plus que les clients potentiels n'y sont pas regardant au premier abord. La liberté d'utiliser n'importe quelle matière que s'accordent les contrefacteurs peut alors être d'un extrême danger pour la santé publique (cas des médicaments contrefaits n'ayant pas les propriétés des produits originels) ou pour la sécurité des personnes et des biens (cas des pièces de rechange d'imitation n'ayant pas les caractéristiques techniques requises). Les premiers font actuellement des ravages dans les pays les plus pauvres d'Afrique et les second un peu partout dans le monde avec leurs lots d'accidents dus à la mauvaise qualité des pièces de rechange d'imitation. Que peut faire un Etat comme le nôtre face à ce fléau contre lequel les pays les plus riches semblent désarmés en dépit des moyens de lutte autrement plus importants que les nôtres qui sont mis à la disposition des organes de contrôle et de répression. En Algérie, la permissivité du contrôle, souvent justifiée par l'absence de moyens, favorise la corruption qui amplifie d'année en année ce phénomène. L'anarchie qui affecte les circuits commerciaux dans les marchés de non-droit, qui prolifèrent à travers le pays, offre un cadre idyllique au développement de ce genre de pratique. C'est pourquoi le traitement du phénomène de la contrefaçon doit nécessairement aller de pair avec celui du marché informel qui constitue, comme chacun le sait, le plus gros réceptacle des produits contrefaits. Tant que les zones commerciales de non-droit existeront, il n'y a aucune chance que le marché de la contrefaçon disparaisse. Bien au contraire, il a de beaux jours devant lui, favorisé en cela par l'entrée en lice de contrefacteurs nationaux (ils existent déjà dans la chaussure et l'habillement) qui découvrent, moyens technologiques aidant, l'efficacité de la contrefaçon et les gains colossaux qu'elle permet d'engranger lorsque le contrôle est, comme c'est aujourd'hui le cas, permissif.

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