Abrité à l'auditorium Mohamed Seddik Benyahia, au cœur du campus Mentouri, le colloque organisé par le laboratoire des langues et traduction sur le thème « La mondialisation et l'interculturalité » est passé complètement inaperçu malgré, nous diront les organisateurs, une large diffusion de l'information sous toutes ses formes. Ces derniers estiment, de ce point de vue, que la programmation de cet événement en fin de semaine (jeudi 13 mai) n'explique pas la désaffection de la communauté universitaire, si ce n'est les quelques initiés éparpillés aux quatre coins de l'auditorium. Néanmoins, la qualité des conférenciers et la teneur des thèmes abordés à cette occasion ont très vite dissipé l'ombre jetée par ce ratage. Hassen Boussaha, directeur du laboratoire des langues et traduction et organisateur du colloque, a donné, en abordant le thème de « L'interculturel et la mondialisation », une intervention magistrale à travers laquelle il a rapidement évoqué les grandes mutations économiques induites par la mondialisation avant de se pencher sur la dimension de la diversité culturelle née de ce grand mouvement d'internationalisation des échanges dans le monde. « Tantôt présentée comme une panacée capable de résoudre les problèmes du monde, tantôt comme un spectre menaçant les emplois, engendrant les crises et touchant gravement à la souveraineté des peuples et des nations, la mondialisation semble se déplacer aujourd'hui vers le domaine de la vie courante, affecter les modes de vie et les œuvres de l'esprit par une mise en relation directe des parties du monde en un même moment et la possibilité d'interactivité. » Evoquant la nature du débat qui se cristallise à l'heure actuelle autour de cette notion de mondialisation, le conférencier dira que dans ce contexte : « La dimension de l'interculturel, les langues et la traduction revêtent une importance telle qu'elle ne saurait être ignorée dans un monde qui se construit non seulement comme un village global où la défense des identités particulières rencontre un cosmopolitisme croissant, mais aussi qui se réduit de jour en jour, du fait de la rapidité et de l'extension des moyens de communication et de la globalisation de l'économie. » Ce dernier ouvrira une parenthèse en précisant que son propos n'est pas de faire l'éloge ou le procès de la mondialisation mais d'en approcher le sens à travers une réflexion qui portera sur un plan interculturel et, de ce point de vue, il dira : « Grâce au web et à la traduction, la diversité culturelle va pouvoir être maintenue, l'individu devenant son propre média, les activités humaines avec Internet se faisant de plus en plus sans intermédiaire. » Pour sa part, le Pr Tayeb Bouderbala, de l'université de Batna, traitera en ès qualités du sujet tortueux mais ô combien passionnant de la dichotomie entre le Nord et le Sud. « Cette dualité vécue jusqu'à maintenant comme une opposition irréductible, souligne d'emblée ce conférencier, laisse aujourd'hui entrevoir une possibilité de dialogue et de convergence. D'où le rêve des écrivains visionnaires modernes qui tentent, de part et d'autre, de jeter des passerelles et d'esquisser des rencontres salutaires entre ces différentes sensibilités et cultures. Dans ce monde réduit à terme à être un village planétaire, cette dualité nous condamne à accomplir un saut messianique vers la réalisation de l'humanité future, d'où la nécessité de faire face à cette mondialité nivellante, standardisante et appauvrissante. » Le Dr Mohamed Salah Chehad, du département de français à l'université Mentouri, exposera de son côté un thème portant sur la traduction et la modernité dans ce contexte de mondialisation. Il dira à ce propos : « La traduction est aujourd'hui partout présente dans cet univers de communication à l'exemple des médias qui s'imposent à ce titre comme des machines à traduire l'information. A l'heure de la démocratisation, des voyages et des nouvelles technologies qui nous mettent en contact avec les langues les plus diverses, la traduction est appelée à jouer un rôle déterminant dans la diffusion des connaissances d'une manière générale et des sciences et des technologies d'une manière particulière, d'où ce lien inséparable entre la traduction et la modernité. Avec les nouvelles technologies, notamment les transmissions par satellite et Internet, les communautés linguistiques plongent dans un monde multilingue car, comme le dit le philosophe Paul Ricœur, traduire c'est à la fois habiter dans la langue de l'étranger et donner en même temps l'hospitalité à cet étranger au cœur de sa propre langue. »