Juger les résultats de la rencontre entre le président palestinien Mahmoud Abbas et son homologue américain George Bush n'est sûrement pas un exercice facile. Les plus pragmatiques diront que le président palestinien a pu soutirer de son homologue le maximum que ce dernier pouvait lui accorder. Jeudi 26 mai, à la Maison-Blanche, après une réunion dont la durée n'a pas dépassé les 30 minutes, les deux présidents se sont adressés à la presse. « Je pense que les Palestiniens sont capables de se gouverner eux-mêmes en paix avec leurs voisins. Je pense que les Israéliens bénéficieraient de la présence d'un Etat palestinien indépendant », a assuré le président Bush. Il a aussi indiqué que la Feuille de route, dernier plan international de paix pour la région, élaboré par le Quartette (Etats-Unis, Russie, Union européenne et ONU), était le seul moyen de parvenir à cet Etat indépendant et a appelé les Israéliens à cesser le développement des colonies en Cisjordanie et à démanteler les colonies illégales - comme si le reste des colonies était légal. Il a également souligné que « seule la défaite de la violence conduira à la souveraineté » et a rappelé que les Etats-Unis considéraient le mouvement palestinien Hamas comme une organisation terroriste. « Les Etats-Unis et la communauté internationale applaudissent le fait que vous ayez condamné le terrorisme », a-t-il dit au président Abbas. « Tous ceux qui ont recours au terrorisme sont les ennemis du peuple palestinien et doivent rendre des comptes », a souligné M. Bush. Le président palestinien a affirmé, pour sa part, que l'Autorité palestinienne est prête à assurer le succès du retrait israélien de la bande de Ghaza, même s'il fait partie du plan de désengagement unilatéral d'avec les Palestiniens, décidé par Ariel Sharon. « Nous considérons que cela fait partie du processus pour mettre fin à l'occupation. Mais, en tant que tel, ce retrait ne doit pas se faire au détriment de la Cisjordanie », a-t-il souligné. « Nous devons dès lors entamer des négociations immédiatement (après le retrait) sur le statut permanent », a-t-il dit, indiquant que ces négociations devront notamment porter sur Jérusalem-Est (El Qods), les réfugiés, les colonies, les frontières, la sécurité et les questions de l'eau. Il a assuré que la construction du mur de séparation en Cisjordanie, occupée par les Israéliens, et le développement de colonies juives dans cette région « avaient contribué au sentiment de frustration, de désespoir et de perte d'espoir ». Le président Bush qui reçoit pour la première fois un président palestinien à la Maison-Blanche, après avoir refusé une telle rencontre avec le défunt Yasser Arafat, qu'il estimait responsable de la détérioration des relations palestino-israéliennes et de la flambée de violence dans la région, a annoncé une aide immédiate de 50 millions de dollars aux Palestiniens pour la construction d'habitations et le renforcement de l'infrastructure de base dans la bande de Ghaza, après le retrait israélien. Il a précisé que la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice se rendrait à Jérusalem et à Ramallah avant le début des opérations de retrait israéliennes. Le président Bush a tenu à apparaître optimiste quant à la réalisation de sa vision de l'avenir de la région du Proche-Orient, où la paix dépendra de la création d'un Etat palestinien, démocratique, indépendant et viable. Cette attitude du président américain n'a pas convaincu beaucoup de monde dans les territoires palestiniens. Abou Ali, un gérant de café, dont les clients suivaient en direct à la télévision, mais sans grande attention, la conférence de presse conjointe, nous a déclaré : « Ce sont des paroles et rien de plus. Bush est incapable d'exercer la moindre pression sur Sharon et son gouvernement. Cette attitude est due aux difficultés rencontrées par ses hommes en Irak. Il essaye de masquer son échec en Irak en apparaissant comme un homme de paix. Notre expérience avec les puissances mondiales nous interdit de faire confiance à cet homme. »