La saison estivale, qui annonce la lune de miel entre les vacanciers et les agences de voyages, reflète, par ricochet, que l'Algérie touristique est toujours à la recherche de son prestige d'antan. L'ensemble des responsables de ces agences est unanime à reconnaître que l'activité du réceptif est presque inexistante. Le rush des Algériens vers les villes touristiques étrangères n'a d'égal que l'hésitation des étrangers à se rendre chez nous. Un paradoxe que tentent d'expliquer les professionnels. De leur avis, l'Algérie reste une destination non désirée par les touristes étrangers à cause du problème sécuritaire en premier lieu. Bien que les actes terroristes soient réduits presque à néant, il n'en demeure pas moins que l'image d'insécurité colle toujours au pays. Et l'épisode de l'enlèvement des touristes étrangers, survenu au début de l'année en cours dans le grand Sud, semble rester vivace dans les mémoires des ressortissants occidentaux. « Beaucoup d'étrangers ont manifesté leur vœu de venir en Algérie mais, en contrepartie, ils demandent des garanties pour la sécurité », estime le responsable de l'agence Magic Tours d'Alger. Le directeur de l'agence Oran Voyage affirme, de son côté, que l'image sécuritaire de l'Algérie a incité les gouvernements occidentaux à orienter leurs ressortissants vers des destinations plus sûres. Dans le même contexte, le président de Touring Club à Annaba avoue que la raison sécuritaire demeure un frein majeur en dépit du rétablissement de la situation ces derniers temps. Cependant, cet écueil conjoncturel ne doit pas occulter ni justifier les contraintes structurelles liées, globalement, à l'environnement du tourisme en Algérie. Une seule phrase, lancée par le directeur de l'agence Oran Voyage, résume ce constat : « On n'est pas concurrentiels par rapport à la Tunisie ou au Maroc. » Entendre par là, la qualité des infrastructures hôtelières, des prestations de service mais aussi et surtout des tarifs qui devraient être étudiés à l'occasion des grands flux touristiques. De l'accueil jusqu'aux adieux en passant par la restauration et le transport, la mentalité du personnel du tourisme et son comportement envers ses hôtes, sont déterminants. Le responsable de Timgad Voyage de Batna s'interroge à ce propos : « Comment voulez-vous que des étrangers viennent lorsque des stagiaires sont mis en place pour faire le travail des PAF ? » La Tunisie casse les prix En attendant que le tourisme algérien achève sa traversée du désert, nos estivants ont toutes les raisons pour choisir la Tunisie durant cet été : des prestations de qualité avec des prix abordables. L'agence Timgad Voyage affiche complet pour ce mois d'août. Son directeur justifie cet engouement par la simple raison des tarifs concurrentiels des Tunisiens. Un séjour d'une semaine en demi-pension est cédé à 19 000 DA alors qu'à l'hôtel Chélia de Batna, par exemple, les charges tournent autour de 9000 DA. A ce sujet, il juge nécessaire d'interpeller l'Association des hôteliers algériens pour revoir leurs tarifs. A Alger, le responsable de Magic Tours indique que la Tunisie, le Maroc et l'Egypte sont des destinations demandées. Selon lui, l'écueil du visa pour l'espace Schengen a joué en faveur de la Tunisie. Confirmant l'explication de son collègue de Batna, il précise qu'un séjour d'une semaine en Tunisie dans un hôtel 3 étoiles, en demi-pension, coûte 48 000 DA et les charges peuvent être encore revues à la baisse pour les voyageurs en véhicule. Et pour que le repos ne soit pas un privilège des classes huppées, l'agence d'Alger envisage d'organiser des voyages par bus climatisés pour passer une semaine dans un hôtel haut standing à raison de 30 000 DA. De son côté, le directeur d'Oran Voyage précise que les charges proposées par la Tunisie varient selon les bourses. De 20 000 à 60 000 DA, le postulant peut choisir le niveau du standing pour passer une semaine à Hammamet ou à Sousse. En guise de comparaison, il dira que le même séjour à l'hôtel des Andalouses d'Oran peut coûter jusqu'à 220 000 DA. Un prix qui paraît non seulement excessif mais inexpliqué après la construction de plusieurs complexes touristiques aux alentours de cet hôtel. « Au lieu de baisser ses tarifs pour concurrencer les nouvelles infrastructures hôtelières, les Andalouses a revu ses prix à la hausse », lance notre interlocuteur. Selon lui, le Maroc, bien que demandé, reste inaccessible en raison du problème de la fermeture des frontières terrestres et de l'indisponibilité des visas collectifs. D'autres pays arabes comme le Liban et l'Egypte sont, aussi, des destinations convoitées par les vacanciers algériens. Le responsable d'Oran Voyage prévoit que Charm Echeikh de l'Egypte sera le lieu de prédilection dans toute la Méditerranée. En plus du réflexe d'insécurité que seul le temps peut effacer, les responsables des agences de voyages soulignent que le défi de réanimer le tourisme en Algérie est l'affaire de tous les intervenants dans le secteur et de l'Etat en premier lieu. A cet effet, le directeur de Timgad Voyage recommande la réunion des partenaires pour revoir « le fond des choses ». Il estime, en outre, que l'Etat ne doit pas se désengager de ce secteur et sollicite les pouvoirs publics pour ouvrir les offices de tourisme dans les capitales européennes. Même les compagnies aériennes, Air Algérie en tête, doivent contribuer à cette bataille en procédant à la révision des tarifs.