Du latin vacare (être sans), le terme vacances au pluriel désigne, selon un dictionnaire de la langue française, une «période de temps pendant laquelle une personne cesse son activité habituelle pour se reposer et parfois partir en voyage d'agrément». Dès les débuts du XXe siècle, la révolution industrielle battant son plein, les travailleurs du monde occidental sont descendus dans les rues pour mettre un terme à leur asservissement par les industriels. L'un des acquis de cette révolte fut l'instauration du congé payé. Devenu, depuis, une véritable institution, les employés du monde entier, dans tous les secteurs, ont droit à un mois de repos par an. Couper avec la routine quotidienne, reprendre son souffle et recharger ses «batteries» pour une nouvelle année de travail est salutaire pour le rendement des employés et, par ricochet, des organismes employeurs. Fait marquant quant au choix de la période de congé, les travailleurs optent, dans leur grande majorité, pour la période estivale. Celle-ci s'étalant, par définition, du mois d'avril au mois de septembre, devient par conséquent une saison de relâchement et de ralentissement du monde économique. Après de longs mois de travail assidu (normalement !), les employés changent de mode de vie pendant un laps de temps en consacrant leurs journées à profiter de la vie. Comme proposé dans la définition des vacances ci-dessus, la plupart des travailleurs choisissent cette période de l'année pour partir en voyage à la découverte du monde au grand bonheur des opérateurs touristiques. Cette règle, qui n'en est pas une en réalité, puisqu'il faut avoir les moyens, s'applique à une certaine frange de la société algérienne. Chaque année, des centaines de milliers, sinon des millions d'Algériens rivalisent d'idées et de combines pour passer entre une semaine et une vingtaine de jours dans les stations balnéaires des pays voisins. Qu'ils soient du nord, de l'est ou de l'ouest, des pays réputés pour leurs avantages touristiques attirent nos concitoyens. Pour connaître leurs destinations favorites quoi de mieux que de consulter les agences de voyages censées organiser les séjours des estivants. A notre grande surprise, celles-ci font plus, actuellement, dans la vente de billets d'avion et de bateau que dans l'organisation des séjours. «Cette année, les Algériens trouvent les offres proposées par les agences trop chères. Même pour la Tunisie, les gens ont constaté une augmentation des tarifs par rapport à l'année dernière», explique un employé de l'agence Mondo-Tour sise à Didouche Mourad. «Pour cette saison estivale, nous avons proposé principalement trois destinations. La Tunisie à 31 000 DA par personne la semaine, le Maroc à 48 000 DA et l'Egypte à 41 800 DA. L'offre la plus prisée a été celle de la Tunisie. On a eu une dizaine de réservations», poursuit notre interlocuteur. Cette défection est justifiée, selon la même personne, par le prix exorbitant des billets d'avion. «24 000 DA pour la Tunisie, 29 200 pour le Maroc et 41 300 pour l'Egypte. C'est très cher.» La raison invoquée par notre interlocuteur pour justifier ce manque d'affluence vers les opérateurs de voyages n'est pas le seul facteur décisif. Elle ne reflète certainement pas toute la réalité. Car, en passant chez d'autres agences, les billets d'avion à destination de la France, de la Tunisie, du Maroc ou d'ailleurs se vendent comme des «petits fours». Le vacancier algérien a trouvé d'autres combines pour son séjour à l'étranger. Au lieu de passer par une agence de voyages, il préfère réserver lui-même directement chez un particulier ou dans l'hôtel de son choix pour s'épargner toute surprise à l'arrivée. Autre constat fait par un voyagiste, le nombre important des réservations de billets pour le Maroc cache un autre phénomène. «Les Algériens achètent des billets pour le Maroc principalement pour prendre un avion vers Montréal [Canada]. Les vols au départ de l'Algérie sont complets jusqu'à fin septembre.» D'autres faits marquants sont constatés par un agent de «Soleil voyage», une autre agence spécialisée dans la vente de billets : «Cette année, le nombre d'émigrés venus passer des vacances n Algérie est très important. Ce qui fait que les avions et les bateaux sont complets jusqu'à pratiquement fin septembre.» Revenons sur les séjours proposés par Mondo-Tour. L'employé fait savoir que l'agence se charge des formalités pour l'octroi des visas nécessaires à certaines destinations. «Mais les Algériens ne sont pas faciles à encadrer. Pour chaque destination, une certaine clientèle. La destination Cuba est utilisée par des jeunes pour profiter du transit à Madrid et prendre la poudre d'escampette. Idem pour la Turquie, la Grèce ou Malte. Les destinations vers Dubai et la Chine sont prisées par les trabendistes et les importateurs», déplore notre jeune interlocuteur. Donc, les agences de voyages, en dehors d'organiser des séjours de omra, deviennent des agences de commercialisation de billets de transport et de facilitation pour l'obtention de visas. Par ailleurs, interrogées sur la présentation de formules pour favoriser et orienter les estivants vers des destinations locales, toutes les agences reconnaissent ne pas offrir ce genre de prestations. «Nous n'avons pas pour vocation de développer le tourisme local. Nous sommes des prestataires de services. Ce genre de destination coûte vraiment très cher. Les infrastructures d'accueil sont insuffisantes, inadaptées et onéreuses. Nos moyens de transport sont inappropriés, leurs propriétaires ne respectent pas leurs engagements et les prestations de services laissent à désirer. Pourquoi croyez-vous que les Algériens vont passer les vacances en Tunisie ? C'est surtout les familles qui ont des jeunes filles qui préfèrent y aller. Car, là-bas, elles ne sont pas importunées [les jeunes filles]. C'est aussi simple et aussi compliqué que cela. C'est toute une culture», argue un voyagiste ayant requis l'anonymat. Pendant ce temps, le citoyen algérien, qui a envie de passer quelques jours de vacances sur les côtes de son pays, plutôt que de se diriger vers une agence de voyage opte pour une autre agence, celle de l'immobilier pour trouver une location en bord de mer. S. A.
