L'ouvrage sur Hippone présenté samedi dernier au Centre culturel français de Annaba par Xavier Delestre, conservateur général du patrimoine et conservateur régional de l'archéologie, suffira-t-il à dessiller les yeux des responsables algériens sur cette richesse culturelle inestimable ? En décrivant avec minutie le moindre détail sur Hippone relevé après une longue enquête sur le site, Delestre a peigné un cadre historique avec une puissance supérieure à celle que l'on a connue jusqu'ici. Dans sa préface de l'ouvrage, Khalida Toumi, la ministre de la Culture, l'a bien souligné. Elle qui a affirmé : « Nul doute que ce savant livre qui réunit les contributions scientifiques de tant de spécialistes fera avancer la connaissance sur l'une des plus belles cités et l'un des plus anciens établissements de mon pays. Dans ce livre, se trouvent rassemblées les analyses d'éminents archéologues qui ont travaillé sur et dans la cité, sur les vestiges exhumés ou sur les écrits des anciens. » Tout est dit dans cette affirmation d'un membre du gouvernement algérien maintes fois et vainement interpellé sur la situation d'abandon à laquelle sont confrontés les sites archéologiques en Algérie. Celui d'Hippone, sans gestionnaire depuis des mois, est véritablement dramatique. Dans cette préface, Mme la ministre a mis en exergue le travail soigné réalisé par les spécialistes ayant contribué à l'élaboration de l'ouvrage. Elle dit vrai, car l'inventaire des vestiges qui y sont exhumés est une œuvre d'art, un objet d'exposition et d'étude. C'est certainement la finalité à laquelle avait voulu aboutir Marcel Tavet, directeur du Centre culturel français à Annaba en organisant samedi dernier une rencontre avec l'auteur. A quelques jours du départ définitif de Annaba de Marcel Tavet, l'idée était tout simplement géniale. « Le résultat des recherches que résume ce livre sur Hippone illustre le renouveau d'une coopération qui n'est jamais aussi riche de sens que dans l'approche des sciences humaines et sociales, dont fait partie l'archéologie. C'est dans le domaine des idées, des hypothèses, des réflexions conjointes ou affrontées que se bâtit l'égalité d'une relation intellectuelle, d'autant plus exigeante ici qu'elle s'attache au passé, à ses enjeux et à ses leçons. » Il s'agit d'un passage de l'avant-propos rédigé par Son Excellence Hubert Colin de Verdière, ambassadeur de France en Algérie. Il situe avec exactitude le contenu. Aidé d'éminents archéologues comme lui, Delestre a tiré des entrailles de l'histoire tout ce qui a trait à Hippone. Son livre répond à des questionnements sur d'innombrables pans de l'histoire d'Hippone la vandale, byzantine et romaine, sur des abandons culturels et sur des rêves alimentés par cette cité, aujourd'hui livrée à l'abandon et aux mauvaises herbes. En faisant boire le temps d'une lecture de son ouvrage, dans l'aqueduc, les châteaux d'eau, les fontaines d'Hippone, en parlant des matériaux et des techniques de construction d'Hippone et des villes de l'Afrique romaine, Delestre a touché à un profond sentiment des Hipponois. Ceux qui ont vécu en textes et en images l'épopée de saint Augustin, qui pourront le faire en admirant la mosaïque du temps et de son au-delà que leur offre Sabah Ferdi. Grâce à Marcel Tavet et Delestre, d'autres Hipponois revivront entre les lignes de l'ouvrage, Hippone la Vandale et Byzantine de Jean-Pierre Laporte ou celle, avec les sources arabes, racontée par Saïd Dahmani. Il y a enfin ces Hipponois qui auront tout loisir de confronter l'histoire politique de Annaba à l'époque musulmane retracée par Abderahman Khelifa jusqu'aux repères chronologiques de Xavier Delestre, l'auteur du livre. L'on a l'impression qu'à travers son Hippone, cet auteur veut nous rendre familier avec l'archéologie de cette grande cité pour mieux l'immortaliser, la faire connaître, la réévaluer et l'explorer. Quelle belle manière que celle employée par Marcel Tavet pour dire adieu à Hippone, Bouna, Bône, Annaba. C'est comme si avant de partir, Tavet a voulu, à travers ce livre, rappeler à ceux qui restent toute la richesse culturelle d'une ville où il a vécue ces 4 dernières années. Homme de culture et de spontanéité, Marcel Tavet a su donner au Centre culturel français l'impulsion nécessaire pour une animation culturelle régulière et de grande qualité. Au titre de baroud d'honneur, avec Francis Heud, le consul général de France à Annaba, une autre compétence également sur le départ en cette fin de mois, Marcel Tavel nous convie demain, 27 juillet, à une soirée dans le somptueux décor de l'hôtel Rym El Djamil Annaba.