C'est un marchand de poisson très connu dans la wilaya de Tipaza et même à Alger, il s'appelle Hadj Salah Ghemati, qui vient une nouvelle fois rééditer son coup. Alors que la sardine se vendait jusqu'à 70 DA le kilo au marché de Cherchell, Hadj Salah fait descendre 40 casiers de sardine et commence sa vente à la criée. Bien entendu, nombreux sont les commerçants qui n'arrivent pas à comprendre la volonté de leur collègue de vouloir casser les prix coûte que coûte, alors que le marché est bondé de clients, notamment en cette période de saison estivale. Des vendeurs de sardine, devant cette situation inattendue, n'ont pas trouvé mieux que de faire baisser les prix entre 30 et 25 DA le kilo. C'est un arrivage de la matinée, le poisson est pourtant frais. « Koul ya guelil, erkha idahach » (c'est pour le pauvre, ce prix bas étonne), lance El Hadj Salah à l'adresse des hommes et des femmes qui se trouvaient au marché de Cherchell en ce dernier jour du mois de juillet. Les patrons de restaurants se sont précipités chez Hadj Salah pour acheter quelques kilos. On se bouscule devant les casiers de sardine, tant pis pour les spéculateurs qui ne cherchent que le gain facile, quitte à « déshabiller » le pauvre consommateur. Cette façon de vendre la sardine a disparu ces dernières décennies, mais voilà qu'elle réapparaît de nouveau grâce à l'initiative de El Hadj Salah. Les clients achetaient 4 kilos pour une valeur de 50 DA. « Avec cette quantité, ma femme aidée par mes filles, nous murmure un père de famille, pourra me concocter deux ou trois plats de sardine. J'espère que tous les jours, nous aurons droit à cette fête au marché qui nous permettra de faire quelques économies, et de manger à notre faim », conclut-il. El Hadj Salah commence à perdre la voix, son visage mouillé par la sueur, « même à ce prix, je m'en sors très bien, la sardine est fraîche, les pères et les mères de famille qui achètent la sardine sont heureux. Chaque commerçant est libre de vendre au prix qui lui convient. Je vous assure qu'avec ce prix de 12,50 DA le kilo, je viens de gagner aisément ma journée », dit-il. Il n'en demeure pas moins que certains commerçants guettaient El Hadj Salah. Ils attendaient qu'il écoule toute sa marchandise pour faire remonter, « le baromètre » à son niveau habituel qui oscille entre 70 et 90 DA le kilo. Mais un aspect négatif qui attire l'attention de chaque passager dans ce marché de Cherchell, c'est incontestablement l'absence totale d'hygiène et l'anarchie qui caractérisent ce lieu public. L'absence de l'Etat ne passe pas inaperçue. Ni l'administration, ni les élus locaux, ni la police ne sont arrivés à instaurer l'ordre dans ce marché communal, laissant le soin de surcroît à l'adjudicataire d'encaisser de l'argent et de développer la pagaille sans se soucier de l'état infecte des lieux, qui ne laisse même pas les chiens errants, les rongeurs et les chats indifférents.