Le palais de Djenane Lakhdar, sis à la rue Amar Ghrissi dans la commune d'El Madania, est proposé au classement comme patrimoine et monument historique devant être mis sous la protection de l'Etat. C'est ce qui ressort du contenu du dossier élaboré par l'APC d'El Madania et soumis à l'examen de la commission des biens culturels de wilaya. Par contre, dans l'entourage de l'administration communale, nul n'est en mesure de dire, avec exactitude, le devenir de ce monument. Anciennement, le domaine, constitué d'un ensemble d'habitations de style mauresque, dont l'une est érigée sur une superficie de 340 m2, est un chef-d'œuvre de grâce, de nuances et de délicatesse dans le rayonnement de l'empire Ottoman. L'apprêt du domaine est l'identité d'une contexture coordonnée à un savoir-faire exceptionnel, notamment dans l'art du vitrage, qui s'écaille malheureusement en fragments. Ce monument est conforme à la reproduction des formes des douérate de l'antique Casbah. Ce labyrinthe de petites ghoraf (pièces) est arrangé d'un foqani (premier palier) et d'un sous-sol, où l'on pénètre par une s'qifa (atrium), qui s'ouvre sur ce qu'on appelle ouast eddar. Par ailleurs, le cachet des créateurs d'exception se manifeste par une dentellière de stuc qui orne en harmonie l'intégralité des portes. Enfin, le s'tah (terrasse) est protégé d'une verrière coulissante rongée par la corrosion. D'après le récit circonstancié en annexe au dossier, le palais, réaménagé en 1843 au cœur d'un vaste espace de verdure, garni d'un jet d'eau, d'une fontaine et d'étables, était la propriété d'Ahmed Ben Mohamed Ben Zouaoui, originaire de Médéa. Par la suite, les biens fonds, les terres et les immeubles sont devenus le domaine de Hafiz Dahmane Ben Ahmed. En dernier ressort, le bien foncier avait appartenu aux membres d'une riche famille de vignerons, en l'occurrence celle de Frédéric Lung, originaire de saint Die (France), qui possédait des vignes. Cette famille en fera l'usage de jouissance en 1910. A la mort de ce dernier possesseur, soit le 5 novembre 1942, et selon les clauses testamentaires enregistrées devant le notaire, Jean Costedoat, et d'après la décision du président de la cour d'El Madania, Djenane Lakhdar est une propriété de 11 ha, qui s'étendait des habitations d'El Hamma à celles d'El Madania en passant par Ruisseau. En 1954, la veuve Lung légua le palais de Djenane Lakhdar à la Croix-Rouge, bien avant qu'il ne devienne la demeure du fils de l'écrivain Mouloud Feraoun. En tout état de cause, l'évolution de la situation juridique du palais est passée d'un destin à un autre, avant qu'il ne soit ordonné par décret bien de l'Etat au lendemain de l'indépendance, et élevé de 1963 jusqu'en 1980 au rang de la maison de l'hôte de la présidence de la République. Longtemps laissé en désuétude, Djenane Lakhdar continue d'attirer toutes les convoitises, particulièrement durant ces deux dernières décennies. A qui donc profitera la disparition d'un monument historique ? Son état de dégradation arrange-t-elle des cercles occultes ? Seul réconfort, une équipe de l'EPIC Edeval s'applique à conférer en ce moment un caractère plus harmonieux au jardin.