Annoncée officiellement et à plusieurs reprises à Londres comme imminente, la signature d'un accord d'extradition entre la Grande-Bretagne et l'Algérie, en vertu duquel neuf Algériens soupçonnés d'avoir été impliqués dans des activités terroristes seraient expulsés vers Alger, semble marquer le pas. En effet, des responsables du Home Office (ministère britannique de l'Intérieur) ont indiqué à la presse londonienne jeudi que les négociations avec l'Algérie ne sont pas aussi avancées qu'ils ne l'avaient espéré au départ. Le Premier ministre Tony Blair avait annoncé, le 5 août, avant qu'il ne parte en vacances, qu'il avait eu des « pourparlers très constructifs » avec les dirigeants algériens à ce sujet. Les responsables du Home Office ont ainsi fait savoir que le gouvernement était encore « en train de travailler sur les négociations » avec l'Algérie sur l'accord qui stipule que « ni la peine de mort ni la torture » ne peuvent être infligées à ceux qui seraient expulsés vers Alger. Les raisons de la lenteur que semblent prendre ces négociations n'ont pas été fournies par Londres. Le gouvernement algérien est resté, quant à lui, muet sur les tractations en cours depuis leur annonce au début de l'année. Cependant, les organisations de défense des droits de l'homme, telles que Amnesty International, Human Rights Watch et Liberty, ainsi que le rapporteur de l'ONU sur la torture, Manfred Nowak, ont dénoncé la signature de l'accord d'extradition avec l'Algérie, estimant qu'« il ne vaut pas le papier sur lequel il sera signé ». Cette pression sur le gouvernement de Londres de « réfléchir à deux fois » avant de signer l'accord en question semble donc faire hésiter le Home Office, non sur le fondement de sa démarche, mais sur les garanties que les expulsés ne seront pas torturés à leur retour à Alger. Le ministre de l'Intérieur, Charles Clarke, a répondu sèchement à ceux qui l'accusent de faire l'impasse sur le respect des droits de l'homme des individus qui risquent l'expulsion en déclarant : « Je souhaite que l'ONU et les autres organisations appréhendent la question des droits de l'homme de manière globale et ne se fixent pas simplement sur les terroristes. » « Pour être franc avec vous, pour moi, les droits de l'homme de ceux qui ont péri lors des attentats du 7 juillet dernier (dans les transports publics londoniens) sont plus importants que les droits de l'homme de ceux qui ont commis les actes terroristes », a-t-il ajouté. De son côté, Lord Carlile, le magistrat indépendant chargé de s'assurer que l'accord d'extradition entre Alger et Londres ne fasse pas l'impasse sur les droits de l'homme, avait indiqué la semaine dernière que « la France expulse de manière régulière vers l'Algérie des personnes dont la présence en France constitue un danger pour la sécurité du public ». « Je n'ai pas eu de preuves qui tiennent la route que ceux qui ont été expulsés vers l'Algérie ont subi des tortures », a affirmé Lord Carlile. Le quotidien The Guardian rejette cet argument en estimant que le cas de la France est différent. « L'Algérie est une ancienne colonie française qui entretient une coopération étroite avec la France. » La question qui taraude les esprits est de savoir comment le gouvernement britannique peut compter sur de telles assurances qu'une fois expulsés les neuf Algériens ne seraient pas torturés. Charles Clarke avait annoncé mercredi dernier une liste de « comportements inacceptables » sur la base de laquelle ces comportements pourraient être opposés à tout ressortissant étranger, résidant en Grande-Bretagne ou à l'étranger, pour soit l'expulser du territoire britannique, soit lui interdire l'entrée sur le territoire britannique, rappelle-t-on.