Madani Mezrag, ancien chef de l'AIS (bras armé du FIS dissous), qui mène actuellement campagne pour le « oui » à la charte du Président Bouteflika, revient à la charge prenant la peau d'un « donneur » de leçons. A lire le communiqué envoyé, hier, aux rédactions de journaux, on ne dirait pas que son rédacteur était, des années durant, au maquis, traitant les Algériens de mécréants et faisant couler leur sang dans les rivières... Bénéficiant des dispositions de la concorde civile, décrétée en 1999, qui l'ont rétabli dans ses droits civils, Madani Mezrag continue à sévir verbalement. A prendre la parole et à dénoncer le comportement des gens et à leur intimer l'ordre de se taire. Des citoyens qu'il considère comme des ennemis de l'Algérie, lui qui a pris les armes contre cette même patrie. Evoluant en vedette sur le terrain de la campagne pour le référendum du 29 septembre, côtoyant sans vergogne les présidents d'associations de victimes du terrorisme et animant des meetings et rencontres aux côtés de militants de certains partis politiques, cet ex-émir d'une organisation terroriste s'arroge le droit de juger les actes des uns et des autres, en usant d'un langage de « purificateur ». Dans le communiqué d'hier, écrit en caractères arabes un peu chahutés, l'ex-terroriste en chef a enjoint l'ordre de se taire aux représentants du mouvement des archs de la Kabylie en leur déniant leur droit de représentativité. Il traite les animateurs de ce mouvement d'« étrangers à la région qu'ils essaient de représenter », croyant toujours au combat juste qu'il a mené contre les enfants du pays. Il les considère comme « ennemis de l'Islam qui mènent campagne pour la vulgarisation du christianisme en tentant de faire disparaître l'arabe dans la région en intégrant le français dans les pratiques quotidiennes, dans la culture et l'éducation ». Agissant dans la prévarication la plus totale, refusant de se taire à jamais rien que pour laisser les morts en paix, cet ex-émir déverse, encore une fois, son venin sans se soucier de la moralité dont il ne cesse de parler. « Ils combattent la morale et les bonnes valeurs en encourageant la perversité tout en visant l'unité de la nation en appelant à la division », écrit-il. Il ira plus loin dans sa nouvelle dérive en les accusant d'avoir utilisé « l'enthousiasme des jeunes innocents et leur désespoir de leur situ ation sociale critique afin de faire aboutir, avec l'aide des mains étrangères, leur projet laïque et occidentalisant ». « Ces voix ne sont pas les nôtres ni nous sommes leur. Elles n'ont rien à voir avec le nationalisme », poursuit-il, sans pudeur. Depuis quand un ex-émir ayant dirigé un groupe armé contre tout un peuple, tuant des bébés, des enfants et décimant des populations désarmées sans défense, donne-t-il des leçons de nationalisme, osant parler encore au nom de l'Islam et des bonnes valeurs ? Comment ose-t-il ouvrir la bouche après avoir bénéficié de la tolérance d'un peuple ravagé par les milices, agissant, entre autres, sous ses ordres ? Et jusqu'à quand ? Madani Mezrag, rappelle-t-on, n'en est pas à sa première sortie. Le 27 mai 2005, il avait, lors d'une conférence-débat sur l'amnistie organisée à Constantine, qualifié les archs de « minorité traîtresse à la solde des croisés et des puissances étrangères ». Depuis, il n'a cessé de multiplier ses sorties, se déclarant entièrement favorable au projet du Président Bouteflika. La semaine dernière, il a demandé à rencontrer Ali Gherbi, figure en vue des archs avant que ce dernier ne réponde par la négative. C'est ailleurs peut-être cela qui l'a poussé à produire le communiqué d'hier. Cet-ex émir d'un groupe armé, ayant émaillé de sang les monts jijeliens, semble utiliser son soutien pour la réconciliation nationale comme un « strapontin » pour s'initier dans la politique et pourquoi pas défendre ses intérêts et ses affaires, après un passé noir dans les maquis. Travaille-t-il sous la coupe de quelqu'un ? De qui ?