A quelques heures d'un duel crucial face à la Côte d'Ivoire, le Cameroun a décrété la mobilisation générale autour de ses Lions indomptables, menacés de manquer pour la première fois depuis 1990 la qualification pour une Coupe du monde de football. Pour les footballeurs camerounais, l'enjeu de la rencontre pour le compte du groupe 3, aujourd'hui à Abidjan, est simple. Soit les Rouge et Vert l'emportent et ils conservent une petite chance de décrocher un billet pour le Mondial 2006 lors de l'ultime journée des éliminatoires, soit ils perdent et sont définitivement privés du voyage en Allemagne. Dans les rues, les bureaux, les bars et les médias de tout le pays, la tension et l'effervescence montent. Pour soutenir ses troupes, la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) a affrété plusieurs vols charters à l'intention des supporters. « Nous pensons que les Camerounais seront nombreux dimanche à Abidjan », assure le vice-président de la Fécafoot Jean-René Atangana Mballa. Imam et Archevêque Le ministère des Sports a, lui, battu le rappel des anciennes gloires du onze camerounais. Un vol spécial de la Cameroon Airlines, la compagnie nationale, devait en embarquer vendredi une pleine fournée. Parmi eux, des joueurs qui ont remporté l'édition 1984 de la Coupe d'Afrique des nations, précisément face aux Ivoiriens. « La présence de ces anciens, parmi lesquels Abéga Docteur, Bonaventure Njonkep et Jean Paul Akono, devrait contribuer à revigorer nos troupes », a souhaité le ministre des Sports, Philippe Mbarga Mboa. Et comme rien n'a été laissé au hasard, le même ministre a organisé vendredi après-midi à l'aéroport de Yaoundé Nsimalen une « escale de bénédiction » à l'intention des joueurs en partance pour Abidjan.« Nous avons estimé que nos religieux devaient venir au secours des Lions », a plaidé le plus sérieusement du monde le secrétaire général du ministère, Paul Amadou. « C'est ainsi que l'archevêque de Yaoundé, le grand imam de la capitale et d'autres chefs religieux feront une prière oecuménique avant le départ définitif de l'équipe. » Plus prosaïquement, ce rendez-vous de la dernière chance est aussi l'occasion d'une ribambelle de concours de pronostics, organisés et récompensés par de nombreux prix. A grand renfort de publicité dans les journaux, la radio ou la télévision, la société nationale de télécommunications, Camtel, en propose un baptisé « Les onze de la victoire », qui consiste à déterminer l'équipe camerounaise qui débutera le match. « En trouvant les onze Lions indomptables entrants, vous êtes le coach ! », lance la réclame de ce jeu, qui offre de nombreux lots, dont une somme de 5 millions de francs CFA (environ 7600 euros). Dans cette agitation, les médias ne sont pas en reste. Même éloignés des joueurs, mis au vert en France, les journaux rivalisent de scoops sur les coulisses de la préparation de l'équipe. De la prime de 22 millions de francs CFA promise par l'attaquant du FC Barcelone Samuel Eto'o en cas de victoire, au refus de jouer de son coéquipier Etamé Mayer. Si c'était encore nécessaire, tous exacerbent l'importance du match. « Objectif : victoire à Abidjan ! », annonçait ainsi vendredi matin en une le quotidien gouvernemental Cameroon Tribune. La télévision publique camerounaise, elle, se frotte les mains. Détentrice exclusive des droits de retransmission du match, elle multiplie les appels du pied à ses concurrentes pour leur en vendre à prix d'or quelques images. Car même en cas de défaite des Lions indomptables, elle est assurée de réaliser un de ses meilleurs taux d'audience de l'année.