Après une arrêt de cinq ans, Warda El Djazaïria est remontée sur scène. Le geste est vu comme un événement au Moyen-Orient. Elle a subjugué le public de Baalbek, au Liban. L'artiste a surmonté une maladie doublée d'une fatigue. Cinq ans, c'est long dans la vie d'une chanteuse, désormais « diva incontestée du monde arabe », comme l'écrit le quotidien libanais L'Orient Le jour. Après Alger, en 1999, Warda a donné un dernier concert à Las Vegas, aux Etats-Unis, avant de prendre une halte. Nadjet, collaboratrice de l'artiste, est revenue heureuse du pays du cèdre. Déjà légendaire, le festival international de Baalbek, qui depuis 1955 se tient dans l'acropole romaine durant l'été, a gagné le pari de permettre à Warda de reprendre sa place sous les lumières. « La rose d'Alger a choisi les temples de Bacchus pour son come-back », souligne encore L'Orient Le Jour. « C'était merveilleux ! Jamais Baalbek n'a assisté à un tel spectacle », se souvient Nadjet. Baalbek, a voulu montrer sa gratitude à l'égard d'une artiste qui a défendu le Liban alors déchiré par la guerre civile avec sa célèbre chanson Loubnane ya djarih (Ô Liban meurtri). « Misir el ayam had dour ou Baalbek ha tchouf enour (les jours changeront et Baalbek retrouvera la lumière) », a-t-elle chanté. Le festival, dirigé par May Aridha, et qui est devenu une institution grâce au Président Camille Chamoun, s'est arrêté en 1975 à l'éclatement de la guerre. La paix rétablie, il a redémarré de plus belle. Le pays connaît Warda depuis les années 1970. Au Liban, comme en Egypte et en Algérie, on se rappelle qu'après une brutale rupture de neuf ans, la chanteuse a repris la scène en 1972. Un défi. Elle a réussi à damer le pion à des géants comme Oum Kalthoum, Abdelhalim Hafed et Farid Al Atrache, encore en vie, et elle s'est placée en tête du box-office avec Issmaouni (Ecoutez-moi) et Khalik hina (Reste ici). Deux chansons toujours réclamées par le public à Warda. L'artiste a déjà plus de 300 titres à son répertoire. La plupart ont été des succès. Comme en 1991, lorsque Warda entre par la porte de la jeel music et lance, soutenue par le jeune Salah Charnoubi, Batwaniss bik, Harmat Ahbik (véritable hit dans les discothèques européennes) et Garab nar el ghira (Les feux de la jalousie). A Baalbek, Warda a lancé, accompagnée par l'orchestre de Khaled Fouad : « Wahachtouni ! (vous m'avez manqué). » Titre d'une chanson tout aussi célèbre. Le nouveau Premier ministre libanais, Fouad Seniora, n'a pas raté le spectacle. Et l'actrice égyptienne Nabila Abid est sortie de sa réserve et a dansé. Abdelhalim Caracalla, qui a composé l'opérette Aïd El Karama dédiée à la Révolution algérienne, a reçu Warda chez lui et a rendu un hommage à « l'humanisme » de l'artiste et à son « caractère humble ». « La rose d'Algérie », pour reprendre l'expression des organisateurs du festival, l'une des rares chanteuses arabes capables de surmonter les barrières linguistiques et musicales. Et on se rappelle qu'elle avait repris, avec un certain charme, Les feuilles mortes d'Yves Montand sur des paroles de Jacques Prévert. « Oh ! Je voudrais tant que tu te souviennes des jours heureux où nous étions amis. En ce temps-là, la vie était plus belle et le soleil plus brûlant qu'aujourd'hui. Les feuilles mortes se ramassent à la pelle. Tu vois, je n'ai pas oublié... », racontait la chanson. Warda n'a rien oublié. Actuellement à Alger, elle est prête à remonter sur scène et à se lancer dans des aventures musicales. « Elle est en forme », lance Nadjet. Pour Alger, Warda, 65 ans, a chanté, dernièrement et sur un air chaâbi, Bil khir ttaâmar liyam (les jours se rempliront de bien »... Pourquoi pas ?