En procédant, hier, à l'ouverture de l'année universitaire, organisée à l'auditorium de l'université de Sidi Bel Abbès, le président de la République a prononcé un discours (le dernier ?) dans lequel il s'est longuement étalé sur la portée de la charte pour la paix et la réconciliation nationale. « Une charte qui reflète la volonté du peuple, dont le désire de renouer avec une situation de paix est palpable », dira t-il, à J-2 du scrutin. S'adressant aux différents représentants de la communauté universitaire, il fera cette précision : « J'aurai bien voulu me contenter de ce qui a été dit, suffisamment dit, tout au long de cet campagne référendaire. Que voulez-vous ! J'estime qu'il va falloir, encore une fois, expliquer les contours de la charte même si, aujourd'hui, il n'est pas question de meeting. » Et d'enchaîner : « Dans les meetings, mon message s'adresse aux cœurs des gens et c'est des slogans qu'il faut pour les convaincre. Je ne sais pas si cela sera possible avec vous ! » Mettant de côté son discours écrit, Bouteflika se lance dans une longue rétrospective des différentes étapes politiques qu'a connues le pays, affirmant « n'avoir trouvé aucune autre alternative à la charte ». « Du Japon à l'Argentine en passant par l'ex-Yougoslavie, je vous assure que c'est la seule formule qu'il m'a été possible de proposer. » Citant des pays comme le Chili ou l'Argentine, il lâchera : « La solution à leurs problèmes n'est pas venue de l'étranger ! » « Le peuple est assez mûr, quoi que disent les détracteurs de la charte. Il (le peuple) doit se convaincre de l'opportunité d'une réconciliation qui mettra fin à des années de douleurs et de souffrances. Nous avons perdu trop de temps », clamera Bouteflika, qui, en évoquant la précédente décennie, a souligné que « le terrorisme ne peut être que barbare, inhumain et destructeur. Nous devons l'éradiquer par tous les moyens pour préserver notre souveraineté ». Et de s'exclamer par trois fois : « Plus jamais ça ! » Le Président reconnaît que l'Algérie a souffert d'un terrorisme « d'une violence rarement atteinte, n'épargnant rien ni personne ». Après avoir discouru durant une heure entière, M. Bouteflika emporté par sa verve s'arrête d'un seul coup, quelques secondes faites de silence. « Je disais quoi au juste ! », se demande-t-il. Et de se souvenir : « Oui, je parlais de la souveraineté du peuple. » Reprenant de plus belle : « On n'a pas le temps de savoir qui de l'œuf ou de la poule est venu en premier. » Tout en insistant sur la solidarité envers les familles de victimes du terrorisme, le chef de l'Etat s'est évertué à rappeler, à qui veut bien l'entendre, que l'Algérie a été, avant les autres, le pays qui a le plus souffert du terrorisme. Bouteflika a imputé la responsabilité de ce déchaînement de violence, non pas à « deux parties en conflit », mais à ceux qu'il a qualifiés de « marchands de sang ». « Bien des visages changerons de couleur au lendemain du scrutin », dira-t-il, et d'indiquer plus loin, « Les visages de ceux qui ont œuvré contre les intérêts du pays, bien sûr. » Décodés, les propos de Bouteflika se donnent à lire comme une réserve, voire un désaveu quant à la façon dont a été géré le pays, avec une promesse en prime : « Beaucoup de choses changeront. » Dans quel sens ? Le chef de l'Etat évoquera l'après-29 septembre en déclarant : « Après le référendum, la société devra s'adapter avec de nouvelles méthodes de gestion. » Lesquelles ? Il n'en dira pas plus. « Il faut oublier. Avec le temps, cela sera possible. Dans nos traditions séculaires, nous sommes plus près de l'oubli que du pardon. Pour ne plus ressusciter les blessures du passé, mieux vaut oublier », a-t-il fait remarquer, allusion faite à tous ceux qui réclame « vérité et justice » pour les crimes qui ont été commis en Algérie. « Je sais que vous souffrez ! Mais que voulez-vous, tournez-vous vers Dieu », suggérera-t-il.